Boubacar Kanté : la disparition d’une icône

Feu Boubacar Kanté
Feu Boubacar Kanté

(Par Amadou Diouldé Diallo) Abidjan, 24 octobre 1997 : Après 23  ans d’exil au bord de la lagune Ebrie, le célébrissime journaliste reporter Boubacar Kanté a bouclé ses valises pour un retour définitif en Guinée où il venait d’être nommé Directeur du bureau de presse de la présidence de la République par le général Lansana Conté. Mais, il ne foulera plus jamais la terre de ses ancêtres ; car, il sera nuitamment assassiné à son domicile par des inconnus qui courent toujours. 

Feu Boubacar Kanté

La triste nouvelle se répand comme une trainée de poudre et consterne le monde entier. Ce qui n’est pas surprenant dans la mesure où Boubacar Kanté était un journaliste reporter de renom, doublé d’un homme de culture qui avait donné à la régie « Syliphone » ses lettres de noblesse. 

Rarement ou presque jamais un journaliste reporter n’a su allier le génie à l’élégance au point de faire de ce beau métier, un art avec une noblesse de cœur et de caractère. Volubile à la voix grave, il avait constitué avec le doyen Pathé Diallo, le premier duo au monde : narrateur -commentateur techniquement appelé de nos jours : J1-J2.

c’est encore les deux qui prirent part au congrès constitutif de l’UJSA (union des journalistes sportifs africains) en 1970 à Khartoum au Soudan qui accueillait la CAN, la première du Sily national de Guinée. 

C’est deux ans plus tard que boubacar Kanté va définitivement entrer au Panthéon des monstres du micro lorsqu’il assura la retransmission en direct de la première finale de la coupe d’Afrique des clubs champions du Hafia fc de Conakry dont la phase retour se disputait au Nakivubo stadium de Kampala contre le Simba Ouganda Army.

ce jour de triomphe et d’apothéose pour le représentant guinéen et notre peuple tout entier, n’aurait peut-être pas eu son nectar de Babylone sans cette aisance dans la narration de l’événement. 

un événement auquel le président Ahmed sekou toure donna son cachet politique quand de son palais à Conakry, il intervint en direct pour s’entendre dire qu’il est le plus grand lion d’Afrique par boubacar Kanté qui lui transmettait là un message du président Idi Amin Dada d’Ouganda. 

Ce premier sacre du Hafia du capitaine soumah Soriba « édenté « sera suivi de la désignation de souleymane cherif 3e ballon d’or africain. 

une distinction qui porte la marque de boubacar Kanté qui avait le talent magique de pousser les joueurs au surpassement. 

or comme Soundiata Keita, souleymane chérif avait la fougue du buffle et la majesté du lion et constituait avec maxime le bijoutier du clair de lune et petit Sory le poète du dribble, l’un des meilleurs trios du continent. 

Malheureusement le journaliste sportif au style aveuglant de clarté et à la popularité grandissante était dans le viseur des politiques. 

c’est pourquoi en 73 ,il opta pour l’exil en côte d’ivoire à partir de Tunis qui accueillait le festival panafricain des arts et de la culture auquel la Guinée prenait part et dont boubacar Kanté était membre de la délégation. 

L’exil durera 23 ans sans qu’il n’altéra le patriotisme de  celui que toute la côte d’ivoire appelait affectueusement « Bouba » et qui avait pris une part considérable dans la promotion de son football par son verbe et sa verve. 

Les éléphants de côte d’ivoire remportent leur premier titre continental en 92 à Dakar. Ce patriotisme boubacar Kanté va le prouver en terre sénégalaise en renonçant à ses privilèges et honneurs d’envoyé spécial senior de Africa no1 pour venir sur Radio Guinée, sa Radio de cœur, et faire duo avec le jeune reporter à sa première CAN que j’étais. 

face à ceux qui trouvaient son attitude comme une violation de son contrat avec la station panafricaine, boubacar Kanté répondait sans sourciller « si c’est pour votre argent, garder le, je reste sur radio Guinée car c’est sur elle que ma chère m’écoute à dabola « .

cette mère Hadja Doussou Kanté dont il était l’aîné et l’unique garçon, suivi de 7 filles, était  sa raison d’être, elle qui l’appelait Bakary dans une complicité que même la mort fût obligée de succomber car mère et fils reposent côte à côte au cimetière de dabola. 

Ainsi va la vie. quand DIEU rend sa copie, on ne se sauve pas du destin. 

Repose en paix Koro Bouba. 

AMEN !

Par Amadou Diouldé Diallo, journaliste-historien

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