Sékouba Konaté à Conakry : « une plainte l’attend pour les crimes du 28 septembre », dit Me Hamidou Barry

Général à la retraite Sékouba Konaté, ancien chef de la junte guinéenne

Le Général à la retraite Sékouba Konaté est arrivé à Conakry hier, vendredi 24 décembre 2021. Après le retour de Moussa Dadis Camara, c’est son successeur à la tête de la Transition du CNDD (post Lansana Conté) qui fait son retour d’exil après la chute du régime Alpha Condé, auquel il avait transmis le pouvoir à la tête de la Guinée en décembre 2010.

Avant l’atterrissage de l’avion transportant Sékouba Konaté, un journaliste de Guineematin.com a joint au téléphone Maître Hamidou Barry, l’un des membres du collectif des avocats pour la défense des victimes des massacres du 28 septembre 2009, perpétrés dans le stade portant le même nom. Selon lui, une plainte déposée devant la justice guinéenne attend cet ancien Président de la Transition, puisque le général à la retraite Sékouba Konaté était ministre de la Défense nationale et 2ème Vice-président du Conseil national pour la démocratie et le développement (CNDD) au moment de la commission de ces crimes.

Aujourd’hui, Maître Hamidou Barry est tout heureux d’apprendre que le général à la retraite Sékouba Konaté sera dans quelques petites heures dans la capitale guinéenne.

Maître Hamidou Barry, avocat à la Cour

« Nous saluons et accueillons favorablement le retour du Général Sékouba Konaté. Nous rappelons qu’au-delà du fait qu’il soit un citoyen guinéen, un nombre important de victimes ont  porté plainte contre lui le 26 septembre 2017 devant le tribunal de première instance de Dixinn. Cette plainte a été enregistrée sous le numéro 702 à la même date.  Pourquoi nous avons porté plainte contre lui ? Premièrement, il était le deuxième vice-président du CNDD (le Conseil national pour la démocratie et le développement, l’organe de la junte militaire qui avait pris le pouvoir le 23 décembre 2008, après le décès du Général Lansana Conté).

Deuxièmement, il était le ministre à la présidence chargé de la défense nationale au moment des massacres du 28 septembre.

Et, le 3ème motif, je peux dire le motif le plus important, il a été cité dans la commission d’enquête internationale des Nations Unies à travers un rapport qui a été bien fourni. Vous savez que les Nations Unies avaient dépêché en Guinée des experts en matière de crimes internationaux qui ont indiqué que les crimes commis au stade du 28 septembre, entrent dans le cadre des crimes contre l’humanité. Et des enquêtes devraient être menées à l’égard des Chefs militaires et du Chef d’Etat d’alors. C’est pourquoi, nous avons porté plainte contre le Général Sékouba Konaté en septembre 2017. L’objet de la plainte porte sur les infractions de responsabilité de commandement des chefs militaires et autres supérieurs hiérarchiques. Ce sont des faits prévus et punis par les articles 194 et suivants et 198 et suivants du Code pénal guinéen. A notre grande surprise, le pool des juges d’instruction a rendu public l’ordonnance numéro 4 du 19 octobre 2017 ; une ordonnance de non informé de la part de cette ordonnance rejetant l’information sollicitée par les victimes des massacres du 28 septembre 2009. Et nous dire qu’après enquête auprès de la Direction nationale des frontières et de l’air, ils n’ont pas pu avoir la filiation complète du Général Sékouba Konaté. C’est pourquoi nous nous réjouissons du fait que le Général Sékouba Konaté rentre en Guinée. Lorsque cette ordonnance a été rendue, le 20 octobre 2017, nous avons relevé appel. Et, cette ordonnance a été signifiée au Procureur de la république près le tribunal de première instance de Conakry 2 (à Dixinn). La même lettre d’appel a été signifiée au domicile du Général Sékouba Konaté, à la date du 23 octobre 2017. Nous attendons de la Cour d’appel de Conakry au niveau de ses chambres de contrôle de l’instruction qu’elle se prononce sur l’appel que nous avons interjeté », a indiqué l’avocat.

Pour Me Hamidou Barry, la déclaration solennelle du Colonel Mamadi Doumbouya, lors de la prise du pouvoir par le CNRD, « que la justice servira de boussole de la Guinée », fait espérer à tous les Guinéens d’un changement de comportement, notamment au niveau de la justice.

« Et, lors des concertations nationales ouvertes au Palais du peuple, les magistrats procureurs et juges ont déclaré qu’ils n’étaient pas indépendants sous le règne du président Alpha Condé. Maintenant, sous la présidence du Colonel Mamadi Doumbouya, c’est l’occasion pour la justice de s’affirmer et de se prononcer sur l’appel que nous avons interjeté depuis le 20 octobre 2017, il y a un peu plus de 4 ans. Nous, on savait que sous le règne du président Alpha Condé, il n’était pas facile d’examiner une telle plainte. Ce que je voulais ajouter, c’est que cette plainte a créé des problèmes au sein des organisations qui accompagnent les victimes, ces évènements du 28 septembre, notamment la FIDH, l’OGDH et même l’AVIPA. A l’époque, ces institutions s’étaient farouchement opposées à la citation du Général Sékouba Konaté puisqu’elles avaient chacune son agenda à elle. Et, je voudrais vous rappeler que le collectif des avocats pour la défense des victimes des massacres du 28 septembre a été créé sous l’égide de Maître Bassirou Barry et de Dr Thierno Madjou Sow (ancien Président de l’OGDH, décédé). Notre agenda, c’est de défendre les victimes du 28 septembre, conformément à la loi. Mais, on s’est rendu compte dans ce dossier qu’il y avait beaucoup d’agendas. Et, ces agendas seront révélés au public sous peu… Heureusement, le collectif n’a jamais trahi les victimes et est toujours là pour les défendre », a rappelé Maître Hamidou Barry.

Estimées à plus de mille personnes, les victimes des massacres du 28 septembre ont vu 430 parmi elles, auditionnées et des PV dressés. Un travail qui est à mettre à l’actif du pool des juges, en dépit de certaines difficultés, reconnaît l’avocat.

Si dans ce dossier, c’est seul le cas du Général Sékouba Konaté qui fait débat, d’autres personnes pourraient s’ajouter à la longue liste des personnes déjà inculpées. Selon Maître Hamidou Barry, des militaires et aussi des civils encore en vie, dont l’ancien Chef d’Etat (dont il s’est gardé de prononcer le nom) pourraient comparaître pour aider à la manifestation de la vérité dans ces massacres.

Pour cet avocat au barreau de Guinée, ce dossier offre à la justice guinéenne une occasion inouïe pour s’affirmer et redorer son blason. Un vœu qui sonne comme un appel du pied à la justice de notre pays. Sera-t-il entendu ? Attendons de voir !

Abdallah BALDE pour Guineematin.com

Tél : 628 08 98 45

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