Conakry : Plusieurs familles déguerpies de force d’une maison à étage à Kipé

Dans la nuit d’hier à aujourd’hui, mardi 18 janvier 2022, des gendarmes à bord de six (6) pick-up et plusieurs dizaines de jeunes ont fait irruption dans un domicile à ‘’Kipé-Métal Guinée’’ (tout près de l’hôpital Sino-guinéen) pour déloger les familles qui y habitent. Ils ont fait usage de la force et ont saccagé plusieurs objets appartenant aux occupants des lieux.

Selon les informations confiées à Guineematin.com, c’est aux environs de 3 heures que ces gendarmes et ces groupes de jeunes sont venus envahir ce bâtiment à étage (R+2) pour sommer les gens à déguerpir des lieux. Et, apparemment, ils étaient venus écouter des ordres de la famille d’un certain Souleymane Conté qui serait propriétaire de cette concession.

Joseph Pierre Touré, fonctionnaire en service au ministère de l’enseignement technique

Joseph Pierre Touré, fonctionnaire en service au ministère de l’enseignement technique et habitant de concession, dit avoir tout perdu dans ce déguerpissement forcé. Il crie à l’injustice et implore l’aide des autorités pour être rétabli dans ses droits.

« Nous avons été victime d’une grande injustice dans un grand pays où on est en train de prôner le changement. On a été attaqué à 3 heures du matin par des loubards, sous prétexte que nous devons quitter les lieux. Alors que les lieux nous ont été affectés par le patrimoine bâti public. C’est un lieu qui a été saisi pour malversation financière et qui a été reversé au compte du patrimoine bâti public. Le patrimoine bâti, à son tour, a logé les fonctionnaires. C’est quand-même très regrettable que ce matin près de 200 loubards arrivent avec des gendarmes à 3 heures pour nous déguerpir. Et, dans le déguerpissement, on a tout perdu. Ils ont pris nos effets à l’étage en prétextant qu’ils les font descendre. Mais, ils les ont emportés avec eux. On ne peut pas évaluer la perte. J’ai personnellement tout perdu. Si au moins on nous avait informés, à travers le patrimoine bâti qui nous a logés, on aurait libéré les lieux à temps. Mais, là, on est victime d’une injustice. Nous interpellons les nouvelles autorités du CNRD pour qu’elles nous viennent en aide et qu’elles mettent un terme à ce genre de comportement en Guinée. C’est inimaginable. Le président Mamadi Doumbouya a prôné la lutte contre la corruption ; mais, malheureusement, la corruption bat encore son plein en Guinée. Parce que selon les informations reçues, les loubards ont reçu 1 500 000 chacun et la gendarmerie près de 300 millions pour venir nous déguerpir. Cela ne devrait pas se faire. On serait passé par le patrimoine bâti ou par le quartier pour intenter une telle action. Mais, ça n’a pas été le cas. Le bâtiment appartenait à un particulier ; mais, il a été saisi par l’État pour malversation. Celui à qui on a retiré le bâtiment, du nom de Souleymane Conté, a détourné de l’argent à l’État. Mais, comme la corruption est devenue monnaie courante, il est revenu à la charge. Ils ont fait un autre jugement nous déguerpissant sans passer par le patrimoine bâti qui nous a officiellement logés », a déploré Joseph Pierre Touré.

Pour cette autre victime de ce déguerpissement forcé, madame Tiguidanké Diallo ce sont des « bandits » qui ont envahi sa maison et saccagé ses biens.

Madame Tiguidanké Diallo

« D’abord, j’ai passé la nuit à faire des prières nocturnes. Donc, au petit matin, je me suis levée afin de pouvoir prier. Je suis sortie attendre dehors jusqu’à l’heure de la prière. Et, c’est là que j’ai vu plus 200 bandits accompagnés de gendarmes qui m’ont demandé si c’est là que j’habite. Je leur ai dit : oui. Entre-temps, ils m’ont poussé et sont rentrés dans la maison. Ils ont arraché toutes les portes pour les jeter. Mes enfants dormaient, ils les ont réveillés avec les cris en disant : sortez ! Foutez le camp d’ici ! Ma fille s’est levée pour commencer à parler, je suis venue lui dire de se calmer. C’est là  qu’un d’entre eux a essayé de me gifler, j’ai esquivé la gifle en m’abaissant. C’est en ce moment que j’ai pris mes enfants et nous sommes sorties.

Dans le déguisement, j’ai perdu des choses importantes. De l’argent et tous mes bisous ont été emportés par les bandits. Même les gendarmes ont arrêté des jeunes qui étaient venus voler. Il y a certaines personnes qui passaient par derrière la cour  pour entrer et voler. Ils ont même attrapé d’autres personnes qui volaient des stabilisateurs, des sacs et d’autres objets. Il y a beaucoup de nos objets qui ont été emportés, je ne peux connaître exactement ce qui a été volé jusqu’à ce qu’on fasse un contrôle de nos affaires… Que les nouvelles autorités n’acceptent pas ces genres de chose dans ce pays, parce que c’est un détournement qui a été effectué. Si on n’accepte ça, on donne maintenant l’occasion à tous les fonctionnaires de voler les biens de l’État. Parce qu’on sait que désormais si on vole les biens de l’Etat et qu’on saisisse nos biens, si nous on ne récupère pas, à la longue nos parents vont récupérer. Je vous informe qu’il y a plusieurs cas comme ça… Ici, ils ont pris ces dossiers et les ont falsifiés. Car, ce dossier est une saisie économique ; mais, aujourd’hui, ils ont pris ces documents pour les mettre en un dossier de saisie politique. Donc, ici appartient au gouvernement et la famille de Souleymane Conté est venue s’accaparer du bâtiment », s’est indignée madame Tiguidanké Diallo.

Présent sur les lieux de ce déguerpissement très dénoncé et contesté, le président de la chambre des huissiers n’a pas voulu se prêter à nos questions sous prétexte qu’il est pressé. C’est également bouche cousue du côté de la famille de feu Souleymane Conté où on se contente de dire elle que « c’est la justice qui a été rendue ».

Au moment où nous quittions les lieux, les six (6) familles déguerpies étaient toujours dehors, aux chevets de leurs effets.

Malick Diakité et Fatoumata Djouldé Diallo pour Guineematin.com

Tel : 626-66-29-27

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