« Toutes les personnes qui ont détourné ou dilapidé les biens de l’Etat répondront », prévient le procureur spécial de la CRIEF

Aly Touré, Nouveau Procureur Spécial de la la Cour de répression des infractions économiques et financières (CRIEF)

Depuis le 02 décembre dernier, la Guinée est dotée d’une Cour de répression des infractions économiques et financières (CRIEF). La création de cette Cour vise à traquer des personnes soupçonnées de crimes économiques dans notre pays. Et, le président de la Transition, Mamady Doumbouya, a jeté son dévolu sur Aly Touré, précédemment procureur de la république près le tribunal de première instance de Kankan, pour diriger le parquet de cette Cour en tant que procureur spécial.

Ainsi, dans un entretien accordé récemment à Guineematin.com, ce parquetier a exprimé son engagement à faire appliquer la loi. Le procureur Aly Touré a prévenu que « toutes les personnes qui ont détourné ou dilapidé les biens de l’Etat répondront devant la loi ».

Décryptage !

Guineematin.com : Le 29 décembre dernier, le chef de l’Etat vous a nommé procureur spécial de la CRIEF. Lorsque vous avez appris la nouvelle, quels ont été les sentiments qui vous ont saisi ?

Aly Touré : C’est vrai, comme vous l’avez dit, le 29 décembre j’ai été gratifié d’un décret me nommant procureur spécial de la CRIEF. J’ai accueilli ce décret avec une grande satisfaction, un sentiment de joie ; mais, également, un sentiment de responsabilité. Parce que c’est une Cour qui a une compétence nationale. Le moment de joie et d’euphorie passé, il faut se remettre au travail et prendre la mesure du travail avec toute la responsabilité pour y mettre dedans.

Guineematin.com : Les guinéens sont assoiffés de justice. Lorsqu’on regarde dans le rétroviseur, on se dit que ce pays a été victime de crimes économiques et financiers. Et, certains dossiers explosifs de ces présumés détournement dorment actuellement dans les tiroirs de la justice. Il y a notamment le dossier des 200 milliards sous le fameux nom de « Nabaya Gate) et récemment le dossier explosif de la CENI (commission électorale nationale indépendante). Comment comptez-vous vous y prendre ?

Aly Touré : Ecoutez ! La gestion de la vie publique mérite d’être moralisée, ce pays n’a que trop souffert de ces différentes infractions qu’il faut absolument poursuivre pour aboutir à une condamnation. Non seulement la création de cette Cour est un signal très fort à l’endroit de tout agent qui gère le bien public ; mais, également pour ceux qui en ont déjà gérer pour qu’ils rendent compte. On doit assainir les finances publiques, on doit moraliser la vie publique, c’est dans ce cadre que la CRIEF a été créée. Donc, tout ce qui a été fait comme détournement de deniers publics, dilapidation des biens publics, toutes ces personnes vont répondre devant la loi. Déjà, il y a des dossiers qui sont prêts à être jugés, nous attendons notre installation pour nous mettre au travail pour que toutes les personnes qui ont dilapidé, qui ont pataugé dans les biens publics puissent répondre de leurs actes. Nous attendons seulement l’installation pour que nous nous mettions au travail. Déjà, nous avons fait une réunion préliminaire avec tous les magistrats qui composent cette CRIEF. Nous avons donné des conseils, nous avons attiré leur attention sur ce que le peuple attend de nous. Donc, la Guinée connaîtra l’importance de cette Cour lorsqu’on commencera à travailler, parce que tous les dossiers qui attendent vont passer. Et, sincèrement, ces différents dossiers connaîtront une issue judiciaire satisfaisante.

Guineematin.com : Quelques jours après la création de la CRIEF, les compétences de la Haute Cour de Justice lui ont été transférées par le chef de l’Etat. Ce qui confère désormais à la CIREF les prérogatives de juger les ministres et présidents en fonction. Alors, est-ce que vous êtes déterminés à poursuivre un ministre ou le président de la république lui-même lorsqu’il commet des crimes ?

Aly Touré : Absolument ! Dura Lex Sed Lex (la loi est dure mais c’est la loi, du latin). Et, elle est là pour tout le monde, que ce soit ministre, directeur, président de la république, lorsque vous faillissez à la loi, vous devez répondre de vos actes. C’est bien qu’une disposition de l’ordonnance créant la CRIEF puisse transmettre les compétences de la Haute Cour de Justice à la CRIEF, c’est pour dire aux dirigeants qu’ils ne sont pas permis de tout. Donc, c’est une épée Damoclès. Tous ceux qui feront de mauvaise gestion vont répondre de leurs actes. Là (à la CRIEF), on a aucun complexe et on n’aura aucun recul.

Guineematin.com : A quand votre prise de fonction en tant que procureur spécial de la CRIEF ?

Aly Touré : Les autorités sont à pied d’œuvre par rapport à notre installation, elles sont en train de rénover le bâtiment qui doit nous accueillir. Je ne sais pas quand est-ce que cela va finir ; mais, certainement, c’est à la fin de janvier que nous allons commencer à être fonctionnel.       

Guineematin.com : Après 3 années et quelques mois à Kankan comme procureur de la république, qu’est-ce que vous retenez de vos années de service dans cette préfecture ?

Aly Touré : Kankan m’a donné tout, Kankan m’a grandi et m’a propulsé de l’avant. Chaque fois que quelqu’un rentre dans mon bureau, il fait des bénédictions pour moi. J’ai été adulé à Kankan, j’ai été vraiment chouchouté. Les autorités, les sages et les populations, tout le monde nous a permis de bien faire notre travail avec des conseils, de l’assistance et du soutien. Franchement, on n’a pas eu de difficultés majeures quant à l’exercice de notre fonction pendant tout le temps qu’on a passé à Kankan. Franchement, c’est le moment de remercier tout Kankan, les hommes, les femmes et les sages.

Guineematin.com : Au regard de bon nombre de citoyens de Kankan, le parquet près le tribunal de première instance de Kankan a véritablement changé depuis votre prise de fonction en 2018. Mais, en réalité, c’est quoi l’héritage que vous laissez dans ce parquet ?

Aly Touré : Nous laissons un parquet bien organisé, un parquet qui a la confiance de la population, un parquet qui est à l’écoute des officiers de polices judiciaires et suffisamment collaborateurs avec les officiers de polices judiciaires. Donc, les nouvelles autorités qui sont venues au compte du parquet doivent s’inscrire dans cette logique pour maintenir le cap, pour ne pas que la confiance entre le parquet et les citoyens s’effrite.

Guineematin.com : Merci beaucoup M le procureur

Aly Touré : c’est moi qui vous remercie

Entretien réalisé et décrypté par Abdoulaye N’koya SYLLA pour Guineematin.com

Facebook Comments Box