
L’association des victimes du camp Boiro (AVCB) va commémorer demain, mardi 25 janvier 2022, les pendaisons publiques du 25 janvier 1971 commis par le régime Sékou Touré. A la veille de cette commémoration, les membres de cette structure ont animé une conférence de presse ce lundi à Conakry pour parler de ces tristes événements dont leurs parents ont été victimes.
Invité à cette conférence, Elhadj Sény Facinet Sylla, membre de la commission provisoire de la réconciliation nationale (CPRN) et 2ème vice-président du Conseil national de la transition (CNT), a dénoncé le manque de volonté politique de faire la lumière sur le passé douloureux de la Guinée, caractérisé par des crimes répétitifs. Le leader religieux dit espérer que les autorités actuelles vont changer cette donne, a constaté un journaliste de Guineematin.com qui était sur place.
« Il faut que la Guinée assume son histoire. La fracture mémorielle en Guinée est extrêmement importante. Et si nous n’arrivons pas à nous donner une politique mémorielle appropriée à notre histoire, nous serons toujours tirés vers le bas, nous allons rater tous les rendez-vous de développement de notre pays. La Guinée a une histoire tumultueuse. C’est vrai que nous avons des pages importantes de notre histoire, mais, il y a aussi des pages sombres qu’il faut assumer.
Sinon, ce que les victimes demandent n’est pas de la mer à boire. Ils demandent simplement la reconnaissance des torts qui leur ont été faits, identifier les charniers, édifier des stèles,… Certains demandent réparation, mais c’est surtout la reconnaissance. Quand on arrache votre papa, qu’on en fasse un apatride, qu’on efface son histoire dans votre pays, c’est difficile à gérer. Ce qui est fait est fait et on ne peut pas ramener ces gens-là à la vie.
Mais il faut quand même faire une relecture de notre histoire, essayer de situer certaines responsabilités, reconnaître à ceux qui ont subi du tort qu’ils ont subi du tort et en fonction de cela, réformer les institutions pour que cela ne se répète plus. Tout ce qui a manqué à la Guinée jusqu’à maintenant, c’est cette volonté politique d’aller à la réconciliation », a dit ce doyen.
Il rappelle que la commission provisoire de la réconciliation nationale (co-présidée par le Premier imam de Conakry, Elhadj Mamadou Saliou Camara et l’archevêque de Conakry, Monseigneur Vincent Koulibaly) a mené une consultation nationale il y a plusieurs années, qui lui a permis de faire des propositions pertinentes pour réconciliation nationale effective. Mais, regrette-t-il, ces propositions n’ont pas été prises en compte par les autorités.
« Le rapport a été déposé dans les mains du président déchu, Alpha Condé, en juin 2016. Mais, malheureusement, il est resté dans les tiroirs. Et avec l’arrivée du CNRD, nous avons pensé qu’une nouvelle opportunité, une nouvelle fenêtre nous était ouverte pour que nous puissions faire valoir le travail que nous avons effectué. Nous nous sommes adressés à monsieur le Premier ministre qui nous a reçus et nous avons expliqué ce qui a été fait.
Il a dit soutenir notre démarche et nous a demandé de travailler à lui présenter un projet de relance des activités de la CPRN. Et c’est le 6 janvier dernier que ce projet a été remis au Premier ministre. Nous avons pensé qu’il serait bon, ne serait-ce qu’une commission ad-hoc soit mise en place pour relancer la commission, parce qu’il y a un besoin d’actualisation du rapport qui a été déposé.
Le mandat qui nous avait été donné, c’était d’étudier les faits de violences en Guinée de 1958 à 2015. Mais, Dieu sait que de 2016 où nous remettions le rapport jusqu’à maintenant, il y a eu encore d’autres faits de violences très graves. Donc, il faut actualiser le rapport si nous voulons mettre en place une commission de réconciliation nationale », a dit Elhadj Facinet Sylla.
Alpha Assia Baldé pour Guineematin.com
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