Liste des membres du CNRD, chronogramme de la Transition, élections… Ce que le NDI recommande à la junte guinéenne

Colonel Mamadi Doumbouya, président du CNRD

Comme indiqué dans nos précédentes dépêches, une équipe d’évaluation technique du NDI est en Guinée depuis une semaine. En fin de mission et avant son départ de Conakry, les émissaires du National Democratic Institute (NDI) ont produit plusieurs recommandations adressées aux parties prenantes de la Transition. 

Cette mission qui a commencé le 8 mars était conduite par Dr Christopher Fomunyoh, Directeur Afrique (NDI-DC), avec la participation de Mme Ulrike Rodgers, Directrice de programme pour l’Afrique de l’Ouest et Centrale (NDI-DC) ; Mlle Emily Fournier, Associée des programmes pour l’Afrique de l’Ouest et Centrale (NDI-DC) ; M. Alioune Tine, Président de AFRIKA-JOM Center (Sénégal) ; et M. Kevin Koffi Adomayakpor, Directeur Résident au NDI – Burkina. 

À la fin de leurs activités dans notre pays, ils ont rendu public une déclaration dans la soirée de mardi, 15 mars 2022. Dans cette communication, la délégation a par exemple noté « Un manque de clarté sur le chronogramme de la transition et l’ordre des priorités pour la période de transition. De nombreux Guinéens se sont plaints des actions récentes des autorités de transition qui contredisent certaines de leurs déclarations antérieures, faites dans les moments qui ont suivi la prise de pouvoir ». 

Par ailleurs, dans les différents entretiens, le refus de la junte militaire de publier la liste nominative des putschistes du Comité national du rassemblement pour le développement (CNRD) est dénoncé par nos compatriotes. « De nombreux Guinéens estiment qu’il n’est pas raisonnable de s’attendre à ce que les populations fassent confiance à des décisions prises par un organe dont la composition nominative reste inconnue. Une telle opacité génère une méfiance croissante et un manque potentiel de responsabilité et de redevabilité qui pourraient affaiblir la confiance nationale et internationale dans le processus de transition », indique la mission du NDI.

Ci-dessous, Guineematin.com vous propose l’intégralité de cette déclaration :

DECLARATION DE LA MISSION D’EVALUATION TECHNIQUE DU NDI_15 mars 2022

Du 9 au 15 mars 2022, l’Institut national démocratique (NDI) a mené une mission d’évaluation technique à Conakry, en République de Guinée. Le but de la mission était d’évaluer les priorités des citoyens pendant le processus de transition de la Guinée après le coup d’État du 5 septembre 2021 et d’explorer les possibilités d’assistance technique aux institutions dirigées par des civils et aux organisations de la société civile œuvrant pour une transition inclusive, transparente et crédible.

La délégation était composée de Dr Christopher Fomunyoh, directeur régional Afrique au NDI ; M. Alioune Tine, directeur du Centre Afrikajom (Sénégal); Mme Ulrike Rodgers, directrice de programme pour l’Afrique de l’Ouest francophone au NDI; M. Kevin Adomayakpor, directeur résident du NDI au Burkina Faso; et M. Paul Komivi Sémeko Amegakpo, directeur résident du NDI en Guinée.

La délégation a été reçue en audience par le Président de la Transition, Chef de l’Etat, S.E. Colonel Mamadi Doumbouya; la délégation a aussi rencontré le Premier ministre Mohamed Béavogui; le président du Conseil national de transition (CNT), Dr Dansa Kourouma, et des membres de son cabinet; le ministre de l’Administration du Territoire et de la Décentralisation (MATD), M. Mory Condé; le ministre, secrétaire général chargé des Affaires religieuses, El Hadj Karamo Diawara; les dirigeants de quatre coalitions de partis politiques représentant l’ensemble des principaux partis politiques du pays; les dirigeants d’un échantillon représentatif d’organisations de la société civile, y compris des associations de médias; des autorités traditionnelles des quatre régions naturelles du pays; et des représentants des partenaires au développement. La délégation exprime ses remerciements à tous ceux qu’elle a rencontrés pour leur accueil et pour avoir partagé leurs points de vue.

La visite de la délégation a coïncidé avec un certain nombre d’actions entreprises par les acteurs guinéens qui visent à renforcer la crédibilité de la transition. Il s’agit notamment : d’une déclaration signée par 58 partis politiques et associations exigeant une plus grande transparence et plus d’inclusion dans le processus de transition ; une mission d’écoute et de sensibilisation nationale par le CNT dans toutes les régions du pays sur la réforme constitutionnelle ; et l’annonce par le gouvernement de transition de son intention d’organiser des assises nationales 2 dont le lancement est prévu pour le 22 mars 2022, pour solliciter la contribution des citoyens sur différents aspects de la transition.

 Résumé des principales observations

● La délégation a noté une grande attente de la part des Guinéens à ce que le pays revienne à l’ordre constitutionnel et à un régime démocratique dans des délais raisonnables, après des réformes inclusives de la constitution et du cadre électoral, et à travers des élections crédibles et transparentes.

● La délégation a également observé un fort désir chez la plupart des Guinéens de voir naître un dialogue fécond et constructif avec leurs compatriotes, pendant qu’ils continuent à partager leurs opinions librement et à faire preuve d’une prise de conscience quant à leurs rôles et responsabilités durant le processus de transition et au-delà.

● Les Guinéens comprennent que le processus de transition doit inclure des mesures durables, délibérées et sérieuses pour la réconciliation nationale, afin de surmonter les profondes divisions politiques et ethniques de la Guinée, et de guérir les blessures liées aux répressions violentes des manifestations pacifiques qui se sont produites de manière récurrente ces dernières décennies. De nombreux Guinéens de tous bords ont exprimé l’espoir que la transition en cours vers un régime civil et démocratique soit couronnée de succès et soit la dernière dans l’histoire du pays. En dépit de ces notes d’optimisme, la délégation a identifié des risques potentiels à même de raviver les tensions politiques, voire la violence, s’ils ne sont pas traités rapidement. Ceux-ci comprennent :

● Un manque de clarté sur le chronogramme de la transition et l’ordre des priorités pour la période de transition. De nombreux Guinéens se sont plaints des actions récentes des autorités de transition qui contredisent certaines de leurs déclarations antérieures, faites dans les moments qui ont suivi la prise de pouvoir.

● Si les membres d’autres organes de la transition sont connus, notamment les membres du gouvernement et du CNT, la composition nominative des membres de l’organe décisionnel central de la transition, le Comité national du rassemblement pour le développement (CNRD), reste inconnue. De nombreux Guinéens estiment qu’il n’est pas raisonnable de s’attendre à ce que les populations fassent confiance à des décisions prises par un organe dont la composition nominative reste inconnue. Une telle opacité génère une méfiance croissante et un manque potentiel de responsabilité et de redevabilité qui pourraient affaiblir la confiance nationale et internationale dans le processus de transition.

● La délégation a également noté un très faible niveau de représentation et d’inclusion des femmes au sein des institutions de transition. Le CNT compte 24 femmes (sur 81 membres) ; cependant, une seule des huit gouverneurs est une femme. Sur 33 préfets et 304 sous-préfets, aucun n’est une femme. En outre, le nombre de femmes dans le gouvernement de transition est faible.

● Six mois après le début de la transition, un nombre important d’acteurs politiques et civiques réputés pour leur plaidoyer en faveur de la démocratie et de la bonne gouvernance dans le pays ressentent qu’ils n’ont pas la possibilité de contribuer de manière significative au processus de transition. Certains se demandent si le CNT est suffisamment représentatif pour prendre des décisions au nom des forces vives de la société guinéenne, notamment en ce qui concerne le chronogramme de la transition.

Recommandations

La délégation formule les recommandations suivantes : Aux autorités de transition guinéennes :

⮚ Tirer profit de cette occasion historique pour donner l’exemple en réalisant des réformes constitutionnelles et électorales inclusives et en organisant des élections démocratiques à temps et de manière transparente.

⮚ Publier un chronogramme de la transition pour clarifier et cibler les actions des entités gouvernementales, des partis politiques, de la société civile et des autres parties prenantes, afin de renforcer la confiance et la participation des citoyens et de garantir ainsi le succès de la transition.

⮚ Protéger et garantir les droits et libertés des citoyens, y compris la liberté d’expression et le pluralisme des opinions.

⮚ Initier et maintenir un processus de consultation permanente, flexible et inclusif entre les principales parties prenantes afin de promouvoir de meilleures, et plus solides, lignes de communication avec les acteurs politiques et civiques, sans faire duplication des institutions de la transition et/ou de leurs compétences.

⮚ Prendre des mesures délibérées pour inclure les femmes dans les institutions de transition et élaborer des politiques sensibles au genre, y compris pour ce qui est des réformes constitutionnelles et électorales.

⮚ Donner la priorité aux réformes qui démontreront l’engagement public de l’armée à ramener le pays à un régime civil et démocratique, et développer un consensus national autour de questions importantes qui seront mieux prises en charge à long terme par un gouvernement et une législature élus.

⮚ Publier la liste nominative des membres du CNRD dans un souci de transparence et du renforcement de la confiance entre Guinéens.

Guineematin.com vous propose de cliquer sur le lien suivant pour visionner l’intégralité de cette déclaration :

DECLARATION DE LA MISSION D’EVALUATION TECHNIQUE DU NDI_15 mars 2022

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