Calendrier de la transition : la junte militaire guinéenne sous le coup de sanctions de la CEDEAO

Le 25 avril 2022, expirera le délai que la CEDEAO (Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest) avait donné au CNRD (la junte militaire qui dirige la Guinée) pour proposer un « calendrier acceptable pour la transition ». L’organisation sous régionale avait menacé de sanctionner la Guinée si cette exigence n’était pas respectée. A quatre jours de cette échéance, qu’en est-il de la situation ? Elle est plutôt préoccupante. Car pas grand-chose n’a évolué dans ce sens à Conakry.

Les autorités guinéennes ont attendu que cette mise en demeure de la CEDEAO tire à sa fin pour commencer à se bouger. Le gouvernement de transition a d’abord publié une proposition des activités à mener pendant cette transition, mais sans fixer aucun délai. Ensuite, le ministre de l’Administration du territoire et de la décentralisation a envoyé un courrier aux différentes coalitions politiques du pays pour leur demander de faire des propositions par rapport à la durée de la transition. Mais cette demande a été rejetée par les acteurs les plus importants de la classe politique guinéenne.

Les coalitions dont sont membres le RPG Arc-en-ciel (l’ancien parti au pouvoir), l’UFDG (le parti de Cellou Dalein Diallo) et l’UFR (le parti de Sidya Touré), n’ont pas donné de suite favorable au courrier du gouvernement. Tout en rappelant qu’ils ont déjà fait des propositions par rapport à la durée et au chronogramme de la transition, qui ont été envoyées il y a quelques mois au gouvernement, ces acteurs politiques estiment que cette autre démarche des autorités n’est pas la bonne.

Pour faire un travail sérieux, qui permettra un retour rapide à l’ordre constitutionnel en Guinée, les camps de Cellou Dalein Diallo, de Sidya Touré et d’autres, réitèrent leur appel à la mise en place d’un cadre de dialogue politique, regroupant le CNRD, le gouvernement, les partis politiques et la société civile autour d’un ordre de jour précis, défini sur une base consensuelle et portant exclusivement sur les conditions nécessaires au retour à l’ordre constitutionnel, en présence des partenaires du G5 et d’un facilitateur désigné par la CEDEAO.

En divorce d’avec les acteurs politiques majeurs, le CNRD a vu aussi sa côte de popularité dégringoler au sein de la population. Une bonne partie des Guinéens ne se reconnaissent pas aujourd’hui dans les actions du colonel Mamadi Doumbouya et son équipe, qui ne sont plus perçus comme ces héros qui ont libéré le peuple de Guinée de la dictature d’Alpha Condé, mais comme une junte pas différente de celles que la Guinée a connues jusque-là. Ce qui veut dire que les autorités guinéennes ne jouissent plus de la légitimité qui leur permettait au départ de tenir tête à la CEDEAO.

Sanctions inévitables ?

Aujourd’hui, à l’interne comme à l’externe, le CNRD et son gouvernement sont sous pression. Et même si elles ont toujours clamé qu’elles n’ont pas d’injonctions à recevoir de l’étranger, les autorités guinéennes montrent ces derniers jours qu’elles ne sont pas insensibles à ces pressions. Sauf que les actes posés jusque-là ne permettent pas d’éviter à la Guinée de connaître le même sort que son voisin malien. En janvier dernier, la CEDEAO avait pris des sanctions très dures contre le Mali, après le refus de la junte au pouvoir dans ce pays de respecter le calendrier qui prévoyait d’organiser les élections en février.

Parmi ces sanctions, il y a la fermeture des frontières entre le Mali et les pays membres de la CEDEAO, le gel des actifs maliens au sein de la Banque Centrale des États d’Afrique de l’Ouest, la suspension des transactions sauf pour les produits de première nécessité et pharmaceutiques, coupure des aides financières, rappel des ambassadeurs des pays membres au Mali. Et ces mesures devraient, pour la plupart, être imposées à la Guinée aussi dans les prochaines semaines. A moins que le CNRD propose un « calendrier acceptable pour la transition » avant l’ultimatum qui lui est fixé. Ce qui est peu probable, au regard du temps qui reste à la junte.

Alpha Fafaya Diallo pour Guineematin.com

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