Procès de l’ex préfet Aziz Diop et Cie au TPI de Coyah : les parties civiles chargent Ousmane Lansari, directeur préfectoral de l’habitat

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Le procès de l’ex préfet de Coyah, Aziz Diop et Cie s’est poursuivi ce lundi, 09 mai 2022, au tribunal de première instance de Coyah. Et, pour la présente audience, ce sont les parties civiles (au nombre de 47), toutes victimes du déguerpissement de l’année 2021 dans la commune urbaine de Coyah, qui se sont relayées à la barre pour exposer le préjudice qu’elles ont subi de la part des prévenus. Des prévenus qu’elles accusent de destruction d’édifices privés et menaces, rapporte Guineematin.com à travers un de ses journalistes.

C’est Ousmane Sylla, un vieil homme âgé de 70 ans, qui a ouvert le bal des dépositions. Et, avec beaucoup d’émotions, cet électricien à la retraite a expliqué comment il s’est vu contraint d’exhumer les corps de ses parents enterrés dans le cimetière familial au quartier ‘’Labo’’ pour les transporter au cimetière de la ville de Coyah.

« C’était 2021, quand Lansari (directeur préfectoral de l’habitat), le préfet et leur équipe sont partis chez nous… Ils ont pris assez de temps avec nous là-bas en train de mesurer. Après, ils ont mis les croix sur la case de ma grand-mère et l’annexe d’une chambre salon, en épargnant le bâtiment principal. Mais, ce qui m’a le plus touché, c’est que derrière la case de ma grand-mère se trouvait un cimetière familial où se trouvent les corps de nos parents. Quand ils ont fini de cocher, je suis allé voir Ousmane Lansari pour lui dire que nous avions 11 corps de nos parents derrière cette case et qu’on voulait qu’on nous accorde un temps pour qu’on puisse les déplacer. Il m’a répondu qu’ils peuvent bien nous accorder cela avant de casser là-bas. La machine devrait venir chez nous un vendredi. Le jeudi déjà, mes sœurs et moi avions décoiffé la case et l’annexe, puis on a détruit l’annexe, parce que la machine était chez nos voisins. Malgré qu’ils ne sont pas venus casser eux-mêmes, mais c’est grâce à eux qu’on a nous-mêmes détruit notre maison… Ce qui m’a encore de plus frustré ce jour, c’est quand on n’était obligé de déterrer le corps d’un de nos frères qu’on venait d’enterrer il y a moins de 40 jours », a expliqué Ousmane Sylla.

De son côté, Aboubacar Demba Camara, couturier de profession, dit avoir tout perdu dans ces opérations. Cet homme âgé de 54 ans assure qu’il habite actuellement sous un hangar.

« Un jour, Ousmane Lansari est venu avec son équipe, les centimètres en main, sans nous informer encore moins nous sensibiliser au préalable. Ils ont dit qu’ils sont venus pour faire la route. Je lui ai dit que depuis l’indépendance nos parents habitent là et que ce lieu n’a jamais été une route. Ils ont fait leur dimension, puis ils ont mis la croix sur nos mûrs pour 72 heures. Pourtant, il y a 30 mètres entre notre concession et la clôture de l’hôpital préfectoral. Et, 50 mètres nous séparent de l’autoroute. Bien avant la fin des 72 heures, Lansari est venu avec sa machine et a commencé à détruire. Le bâtiment principal de 5 chambres-salon-douche et l’annexe d’une chambre-salon ont été tous démolis. Trois jours après cette démolition, nous avons suivi le premier ministre d’alors à la télé dire que ce ne sont pas eux qui les ont commis à la tâche. Qu’ils étaient censés déguerpir les emprises. Depuis lors, Lansari a arrêté  l’opération sur le terrain. Aujourd’hui, moi j’ai érigé une cabane en tôle sur le même domaine pour pouvoir dormir là-bas. Nous sommes réduits à néant. C’est pourquoi je suis venu pour qu’on nous restitue notre concession », a déclaré Aboubacar Demba Camara.

Pour sa part, Ansou Sylla a accusé le directeur préfectoral de l’habitat de Coyah, Ousmane Lansari, d’avoir démoli sa maison pour se frayer un chemin pour son domaine qui était derrière sa concession.

« Nous avons vu monsieur Lansari Sylla, en compagnie de certaines personnes, en train de marquer les bâtiments. Quand je lui ai demandé pourquoi il coche nos maisons, Lansari m’a répondu que c’est Alpha Condé (ex président de la République) qui l’a commissionné. Du coup, on a vu un jour, à 20 heures, des machines garées près de chez nous. Il est venu, accompagné des forces de l’ordre et les deux machines, pour démolir notre concession de 20 heures à 22 heures. Moi, étant en colère contre lui, je voulais même me jeter sur lui. Mais, j’ai été empêché par les policiers qui étaient tous armés. Après le passage des machines, je suis allé  me plaindre à la préfecture. Quand le préfet s’est rendu sur le terrain et qu’il a vu ce qui s’est passé là-bas, il a lui-même constaté qu’il y a eu abus dans le travail de Lansari. Nous avons perdu tout notre bâtiment. C’est seulement quelques feuilles de tôles et quelques meubles que nous avons pu récupérer. Sinon, tout a été détruit par les bulldozers. Nous, nous sommes derrière l’hôpital préfectoral, loin de la route. Il a dégagé chez nous pour se frayer une route qui mène vers son domaine qui est situé en bas de chez nous », a expliqué Ansou Sylla.

Âgée d’environ 80 ans, Hadja Makalé Soumah déplore la façon dont sa maison a été démolie et la vie misérable à laquelle a été réduite par la faute de Ousmane Lansari, directeur préfectoral de l’habitat de Coyah.

« Ce jour, j’ai vu la machine venir vers nous. Nous sommes tous sortis pour regarder. La machine est venue racler mon tas de sable pour permettre l’accès à la concession. Quand ils ont fini d’éparpiller partout le sable, ils sont venus cocher notre bâtiment pour 72 heures. Un jour, j’étais à la mosquée pour la prière du crépuscule, mes petits-enfants sont allés me chercher en m’informant que la machine est arrivée. À mon arrivée, j’ai trouvé la machine déjà en action. J’ai demandé à Ousmane Lansari : mon enfant, qu’est-ce que j’étais fait pour mériter ça ? Il m’a répondu que ce n’est pas lui, qu’il est chargé d’une commission des autorités et qu’il ne peut rien. Les policiers sont venus me menacer. C’est lui-même Lansari qui leur a dit de me laisser. C’est ainsi que mes enfants sont venus m’extirper de la foule. Je leur ai signalé que tout mon meuble se trouvait dans la maison. Lansari a ordonné aux agents d’aller faire sortir mon armoire et ma bibliothèque. Après, mon fauteuil et tous mes biens qui étaient au salon, à la véranda ont été détruits par la machine. La partie qui n’a pas été détruite ce jour, a été cochée le lendemain. Depuis lors, je vis dans une cabane sur le même domaine. Cette concession appartient à mon époux malade. Je suis venue dans cette maison depuis toute petite. Mais, jamais un jour une quelconque autorité ne m’a dit que nous sommes sur la route. Il y a une route bien tracée qui passe près de chez moi. Nous ne sommes pas sur la route. Même le président Doumbouya est une fois passé sur la route », a indiqué Hadja Makalé Soumah.

Finalement, le tribunal a renvoyé l’affaire au 6 juin prochain pour la suite des débats.

De Coyah, Malick Diakité pour Guineematin.com

Tel : 626-66-29-27

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