Stupéfaction et consternation, ce sont les sentiments qui animent de nombreux habitants de Mamou, suite au lancement des travaux de dégagement des emprises de la voie publique dans cette ville. Entamée ce vendredi, 3 juin 2022, l’opération a déjà eu des impacts assez remarquables sur le terrain. Les machines ont démoli de nombreuses boutiques et maisons, ainsi que d’autres encombrants physiques situés au bord des routes. Choqués par cette situation, les victimes dénoncent l’attitude des autorités, qui auraient lancé ce déguerpissement sans même avertir les concernés. Certains d’entre eux ont réagi au micro du correspondant de Guineematin.com à Mamou.
Elhadj Boubacar Talibé Diallo, professeur à la retraite, devenu vendeur de matériaux de construction, a assisté, impuissant, à la démolition de son magasin.
« Si nous étions informés à l’avance au moins, on allait prendre des dispositions pour ne pas que notre marchandise soit à la portée de n’importe qui. Mais ils sont venus nous surprendre. Moi, j’avais au moins 20 tonnes de ciment dans mon magasin, ce sont les citoyens qui sont venus m’aider à le vider dans la précipitation. Ça, ce n’est pas une bonne manière. Pour mener ce genre d’opérations, les autorités doivent informer les citoyens à l’avance. Parce que comme on le dit : prévenir vaut mieux que guérir. Pour que l’imam puisse diriger la prière, il faut qu’il y ait des fidèles derrière. Et dans un pays, le chef de l’Etat est l’imam, et les citoyens sont les fidèles ».
Mamadou Moussa Hamdallahi, lui, est venu trouver que son bar café, situé à la conserverie, a déjà été complètement détruit par la machine. Il déplore le fait de n’avoir pas été informé pour qu’il puisse au moins sauver ses biens qui étaient à l’intérieur. « J’étais au travail, lorsqu’on m’a appelé pour m’informer qu’ils sont venus démolir mon bar café. A mon arrivée, j’ai trouvé qu’ils ont tout détruit, y compris les tasses, les cuillères, les marmites, tout le matériel qui était à l’intérieur. Il faut que nos autorités apprennent à communiquer avant d’agir. Les médias sont là, ils peuvent passer par eux pour informer et préparer les gens. Vraiment, je ne suis pas content, mais je m’en remets à la volonté de Dieu ».
Alpha Oumar Diallo, qui a perdu aussi son magasin de vente de matériaux de construction, implore Dieu à sauver les Guinéens des agissements des autorités du pays. « Nous demandons à Dieu de nous venir en aide. On ne pensait pas que le CNRD était venu pour faire du mal aux Guinéens. Cette opération touche tous les Guinéens. Vous verrez ici plus de dix personnes qui sont nourries par un magasin ou une boutique. Et ce sont ces magasins et boutiques que les autorités sont venues démolir, sans même nous prévenir. Nous demandons à Dieu de sauver les Guinéens ».
Même s’il n’est pas personnellement victime de ce déguerpissement, Mamadou Madjou Diallo, le secrétaire fédéral de l’UFDG à Mamou, observe aussi cette situation avec beaucoup d’amertume. Tout en dénonçant le manque de communication autour de l’opération, cet acteur politique indique que cette situation va entraîner de graves conséquences.
« Ce qui se passe à Mamou n’honore personne. C’est comme si ce sont des envahisseurs qui sont rentrés ici. C’est comme si nous étions en guerre. Je n’en reviens pas. Je ne pouvais pas croire qu’une telle situation était possible actuellement, car à l’avènement du CNRD, ils nous ont promis le paradis.
Mais aujourd’hui, ce sont eux qui se retournent contre nous. Cette opération aura des conséquences néfastes. Il y a beaucoup de familles qui vivaient de ces boutiques et magasins. Certains également se sont battus des années et des années pour avoir une maison, et ils se retrouvent aujourd’hui sous la pluie et sous l’obscurité. Comme le colonel Mamadi Doumbouya a dit qu’ils feront le sale boulot, c’est ce qu’ils sont en train de faire. Mais le moment venu, les Guinéens vont leur répondre », a dit Mamadou Madjou Diallo.
Propos recueillis par Boubacar Ramadan Barry pour Guineematin.com
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