Accueil A LA UNE Labé : les bévues du porte-parole de la notabilité

Labé : les bévues du porte-parole de la notabilité

Elhadj Safioulaye Bah, ancien préfet de Labé, porte parole de la notabilité

Durant les 11 années de règne du président Alpha Condé, Labé a connu ce que Kankan vécut durant le règne du président Lansana Conté. La cité de Karamoko Alpha était le fief du principal parti de l’opposition au régime Condé. Avec tout ce que cela implique en termes de répressions. Les habitants de cette ville ont été si malmenés que même les malades alités à l’hôpital régional furent molestés en 2014. Et durant la crise consécutive au troisième mandat, pour la première fois dans l’histoire de la violence d’Etat en Guinée, une ambulance a été prise pour cible à Labé. Le chauffeur succombera.

Un militant très zélé du régime Condé – ressortissant de cette région de Labé – avait, au pire moment de la répression contre les citoyens de cette ville, écrit sur sa page Facebook « Aujourd’hui, Labé est si chaud que personne ne pourra sortir la nuit pour ses besoins. Les maisons vont donc puer ». C’est tout dire.

Au terme de cette épreuve douloureuse, les membres du nouveau gouvernement séjournent à Labé comme ils l’ont fait dans les régions de N’zérékoré et de Kankan.

Comble de paradoxe, c’est l’occasion choisie par le porte-parole de la notabilité de cette région pour jeter l’opprobre sur certains citoyens. Déclarant en substance qu’il y a quelques années, un homme, appartenant à un courant religieux, avait revendiqué la présence de Boko Haram dans la ville. De passage, ce porte-parole n’est pas allé par quatre chemins pour stigmatiser certains musulmans. Lesquels construiraient des mosquées sans autorisation ou avec une autorisation obtenue ailleurs. Dans la foulée, motus et bouche cousue sur les coupeurs de route qui, pourtant, ont endeuillé beaucoup de familles dans cette partie du pays ces derniers temps.

Prétendre que Labé est menacé à cause de sa proximité avec la République du Mali alors que Kankan et Siguiri n’ont pas les mêmes inquiétudes relève d’un objectif difficilement avouable. Il faut noter que durant la décennie 2010-2020 les femmes portant le voile intégral faisaient l’objet de violences et d’humiliation au camp Elhadj Oumar de Labé. Ces femmes étaient débarquées des véhicules de transport et mêmes personnels et astreintes d’ôter leur voile sous le prétexte qu’elles représentaient une menace pour la sécurité du pays.

Alors que dans le reste du pays, de la Basse Guinée à l’Ouest jusqu’en Haute Guinée à l’Est, en passant par la Guinée forestière au Sud, les femmes qui portant ce voile circulaient librement. Aujourd’hui, dans les trois autres régions du pays, le principe de la laïcité et de la liberté de culte est respecté. D’ailleurs, les autorités viennent d’autoriser le voile dans les salles d’examen. Les différents courants religieux cohabitent pacifiquement partout. Comment et pourquoi alors le Fouta en général et Labé en particulier pourrait faire exception ? Dans tous les cas, cette déclaration apporte de l’eau au moulin de ceux qui souhaitent le retour à la fameuse « situation particulière du Fouta » qui faisait de cette région le paria de la Guinée dans les années 70.

La vérité, c’est qu’il y a une certaine oligarchie dont les avantages et les privilèges sont menacés par une mondialisation – qui n’épargne pas la religion- et ses corolaires de liberté et de rupture avec le passé. Ils voudraient donc s’appuyer sur les pouvoirs publics pour reconquérir ces privilèges. Malheureusement pour eux, comme dit le vieil adage, quand le soleil est au Zenith, il n’est pas possible de l’éclipser avec la paume de la main.

Habib Yembering DIALLO

Habib Yembering Diallo pour Guineematin.com

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