Journée d’assainissement à Conakry : malades, journalistes et autres voyageurs pénalisés

Instituée le 23 juillet dernier par le ministre de l’Administration du territoire et de la décentralisation, la journée civique d’assainissement général a démarré ce samedi, 06 août 2022, en Guinée. A Conakry, cette journée suscite de l’engouement au niveau des différentes mairies. Mais, elle est aussi une source de peines pour les usagers de la route. De nombreux citoyens, dont des malades, ont été bloqués ce matin au niveau des petits barrages érigés çà et là à travers la ville pour faire respecter l’interdiction de circuler pendant les heures d’assainissement (de 8 heures à 12 heures).

Au niveau des barrages où deux reporters de Guineematin.com ont fait le tour entre 6 à 7 heures dans la commune de Ratoma, les agents de la police sont plutôt à cheval sur le respect des consignes. Personne sur un engin ne passe ; même pas les journalistes ! Il faut négocier avec les agents, qui font parfois la sourde oreille, pour obtenir une levée de barrage. « On nous a dit de ne laisser passer que les ambulances et les agents de sécurité. Personne n’a dit de laisser passer les journalistes », a répondu un agent responsable du barrage ‘’Carrefour Ambiance’’ à un journaliste  de Guineematin.com qui lui a montré sa carte de presse (délivrée par la HAC) et son gilet de presse. Il était pourtant 7 heures (une heure avant le début des travaux d’assainissement) et le journaliste était en route pour la couverture de cette activité… 

Au niveau de ce même barrage, au ‘’Carrefour Ambiance’’ et à la même heure, les agents ont aussi refusé le passage à un malade, un jeune garçon, de teint noir. « Je pars à l’hôpital comme ça », a plaidé ce jeune, en montrant son ventre ballonné aux agents.

« Personne ne passe ici », a répondu un des agents, tout en mettant sa radio à l’oreille comme pour dire « on s’en fout de toi ». Ce malade a dû descendre de sa moto pour traverser à pied le barrage et négocier avec un taxi-motard de l’autre côté pour continuer sa route.

Trois autres femmes, qui étaient à bord d’un même véhicule de couleur cendre, ont également dû abandonner leur véhicule au niveau de ce même barrage pour traverser à pied, valises sur la tête, et emprunter des taximotos pour continuer leur route. Elles étaient en instance de voyage et craignaient d’arriver en retard.

A Sonfonia T7, de nombreuses femmes vendeuses de poissons ont été bloquées pendant plus d’une demi-heure par les agents. C’était aussi avant 8 heures. Face à la réticence des agents, ces vendeuses se sont données en spectacle pour impressionner (pour ne pas dire intimider) les policiers pour finalement obtenir une ‘’levée de barrage’’.

Également, au rond-point Enco5, aux environs de 6 heures 45’, plusieurs usagers de la route, à bord de véhicules et de motos, étaient bloqués au niveau du marché où des policiers avaient érigé deux barrages. Les agents s’en pressaient de retirer les clés des motos de ces personnes. « Vous n’êtes pas informés qu’il n’y a pas de circulation ce matin ? » demande un agent, le visage serré, avant de s’emparer des clés de la moto d’un jeune.

« Mais, c’est à partir de 8 heures qu’ils ont dit dans le communiqué », a répondu ce jeune qui, apparemment, voulait profiter de la matinée pour faire quelques courses.

Un confrère qui a son cher papa souffrant, nous informe que leur véhicule est bloqué à Coyah depuis l’aube de ce matin ; alors qu’ils ont quitté Labé la nuit à cause de la rapide dégradation de sa santé avec l’espoir de se faire hospitaliser dans la matinée de ce samedi au plus tard.

Des malades qui souffrent d’insuffisance rénale et qui avaient des rendez-vous au centre d’hémodialyse de Donka sont également bloqués (certains chez eus et d’autres en cours de route) à cause de l’érection très matinale de ces barrages de sécurité…  

C’est autant dire que cette journée dite d’assainissement est plutôt une journée de peines et d’inquiétude pour de nombreux citoyens de Conakry et environs. Les autorités devraient demander aux agents de sécurité d’être compréhensifs en traitant les usagers au cas par cas et surtout en tenant compte des cas d’urgence. Tout le monde sait que tous les malades n’ont pas les moyens de déplacer une ambulance pour se rendre à l’hôpital. Et, les médecins n’avaient pas intégré cette journée d’assainissement dans les rendez-vous médicaux donnés à leurs patients.

Mamadou Baïlo Keïta et Thierno Hamidou Barry pour Guineematin.com

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