Vacances à Conakry : des élèves ‘’marchands ambulants’’ pour préparer la rentrée des classes

En cette période de vache maigre pour l’écrasante majorité des Guinéens, subvenir aux besoins de sa famille est un honneur pour les parents. Car, il n’est pas évident pour beaucoup de gagner tous les jours la dépense quotidienne. Et, dans les familles, les enfants sont très souvent conscients de cette triste réalité, d’autant plus qu’ils peuvent rester jusque dans l’après-midi avant de trouver quelque chose à se mettre sous la dent pour le petit déjeuner.

Ces enfants savent aussi qu’avec une situation, il est difficile pour leurs parents de leur trouver des fournitures scolaires. Et donc, pour avoir la chance de continuer leurs études, certains optent pour le ‘’marchand ambulant’’ pendant les vacances. Alors que certains de leurs camarades suivent des cours de vacances et se familiarisent avec les programmes de leurs classes prochaines, ces enfants de familles démunies passent leur temps dans la rue et dans les différents marchés à déambuler avec de la petite marchandise en main et sur la tête.

Dans la commune de Dixinn où un reporter de Guineematin.com est allé à la rencontre de ces jeunes ce mardi, 23 août 2022, on y découvre une véritable vente à la sauvette. Ces gamins profitent des embouteillages pour serpenter entre les véhicules et proposer leurs articles aux usagers. Mais, avec l’idée de se faire un peu de sous, les risques d’accident liés à cette pratique sont vite écartés des pensées. Layeba Sacko, élève en 10ème année, assure qu’il peut gagner plus de 100 000 francs guinéens par jour avec la vente de cotons-tiges et de pinces.

« Je fais le commerce ambulant parce que ce n’est pas en restant à la maison que quelqu’un va me donner quelque chose ou subvenir à tous mes besoins. Tu ne peux pas passer tout le temps à demander de l’argent ou à solliciter l’aide des gens. D’ailleurs, c’est difficile pour moi de quémander. Donc, voilà pourquoi je fais cette activité… Je le fais pendant les vacances. Mais, à l’ouverture, je profite parfois pour le faire aussi. Je peux gagner 100.000 francs par jour, voire au-delà. Cela dépend de la vente que je fais. Nous profitons des embouteillages pour nous faufiler entre les véhicules pour revendre nos articles. Parfois nous nous arrêtons sur le terre-plein pour vendre nos marchandises ; mais, ce sont les embouteillages qui nous arrangent dans cette activité. Je revends des cotons-tiges et des pinces. Il y a trop de souffrances dans cette activité, parce qu’on est obligé  de courir derrière les voitures pour faire notre commerce. Cela est très fatiguant. Je rentre à la maison complètement abattu et je marche difficilement », a expliqué Layeba Sacko.

Pour Bountouraby Bangoura, une autre élève de la 10ème année qui vend actuellement des bonbons, c’est le manque de moyens de ses parents qui l’a conduite à pratiquer ce petit commerce.

« Je fais cette activité parce qu’il n’y pas de soutenance, ma famille n’a pas assez de moyens. C’est pourquoi je profite des vacances pour revendre des bonbons au bord de la route, ou même dans la circulation à Dixinn ici quand il y a l’embouteillage, afin de subvenir à mes petits besoins. Mais, actuellement, je ne fais pas beaucoup de ventes. Car, je ne gagne que 30.000 francs par jour, alors que je pouvais avoir 50.000 francs ou plus par jour. Tout ceci parce qu’il n’y a pas d’embouteillages et les véhicules qui passent ne font pas d’achat. Donc, les marchands ambulants, ce sont les bouchons qui nous arrangent. Mais, pour dire vrai, ce n’est pas du tout facile de pratiquer cette activité. Parce que c’est très fatiguant. Parfois je rentre à la maison complètement anéantie par la fatigue et je n’arrive plus à faire quelque chose d’autres à part aller au lit », a indiqué Bountouraby Bangoura.

De son côté, Mamadou Djawo Sow, élève de la terminale Sciences Sociales, vend actuellement des porte-manteaux.

« Je fais du commerce ambulant pendant ces vacances pour satisfaire à mes besoins. Parce que ce n’est pas toutes les choses qu’il faut demander aux parents. Je revends des porte-chemises et des porte-manteaux. Je peux gagner jusqu’à 50.000 francs par jour, voire 100.000 francs. Seulement, la recette dépend du marché. Moi je ne me faufile pas entre les véhicules ou courir derrière les véhicules. Même si je le fais, c’est des cas rares. Je m’arrête sur le terre-plein pour écouler mes articles en faisant des va-et-vient », dit Mamadou Djawo Sow.

Abondant dans le même sens, Ousmane Sylla assure que sa vente de thé l’épargne de la mendicité et du vol.

« Je viens revendre sur le terre-plein ou au beau milieu de la circulation à Dixinn pour ne pas être toujours dépendant de quelqu’un. C’est pour subvenir à mes petites dépenses, tel que le loyer et autres. Au lieu de rester à la maison comme ça, passer toute une journée à faire du thé, j’ai préféré entreprendre. C’est pourquoi je me suis lancé dans cette pratique. Je revends le thé et je peux avoir jusqu’à 100.000 francs par jour comme recette. Et ça, c’est pour moi. Cet argent, c’est le fruit de mon travail digne. Car, je ne l’ai volé à personne, ni quémander », a-t-il dit, tout en laissant transparaître une certaine fierté de soi.

Fatoumata Diouldé Diallo et Mohamed Doré pour Guineematin.com

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