Labé : Cellou Diallo, le coordonnateur régional des enseignants contractuels, défend la cause de ses pairs

La situation des enseignants contractuels constitue une réelle préoccupation dans la région administrative de Labé. Elle suscite assez de complications et des remous, à en croire le coordonnateur régional des enseignants contractuels de Labé. Alpha Mamadou Cellou Diallo, interrogé par un reporter de Guineematin.com, est revenu sur ces difficultés des contractuels avant d’apporter des conseils aux autorités pour en finir avec ce problème.

La situation est confuse pour les contractuels de Labé, soutient Alpha Mamadou Cellou Diallo, coordinateur régional des enseignants contractuels, chargé des cours de français au collège de Tountouroun, localité située à une quinzaine de kilomètres de la commune urbaine.

Guineematin.com : tout récemment, le gouvernement, à travers une note circulaire, a instruit aux gouverneurs, aux préfets et aux maires de procéder au recrutement des enseignants contractuels dans notre pays. Qu’est-ce qui prévaut dans votre région administrative actuellement ?

Alpha Mamadou Cellou Diallo, coordonnateur régional des enseignants contractuels de Labé

Alpha Mamadou Cellou Diallo : globalement, la situation est un peu confuse dans la mesure où c’est un travail qui se fait dans la précipitation. C’est un travail qui aurait dû être fait pendant les vacances. Mais, attendre juste à la veille de l’ouverture et programmer un recrutement des enseignants contractuels, je pense que c’est créer une certaine confusion. Nous attendons la fin du processus pour pouvoir donner notre avis par rapport à ça. Mais le problème, il y en a.

Tout dernièrement, le coordonnateur national a, par voie de presse, dénoncé le comportement des certains DPE qui font une interférence autour du recrutement des enseignants contractuels. Quelle est votre position face à un tel agissement ?

Pour la région de Labé, on s’était entendu avec le gouvernement de privilégier essentiellement les contractuels de 2018 qui ont une liste propre avec une authentification de tous les diplômes et qui ont une certaine expérience de 5 ans, 8 ans sur le terrain. On s’attendait, puisque le gouvernement a manifesté un besoin de recrutement de 15 650 et que nous ne sommes que 10 585. Après, le recrutement de ces 10 585, on allait maintenant prendre les 5 000 autres pour pouvoir compléter. Ça aurait été très facile puisque déjà, tous ceux qui sont sur cette liste sont déjà en situation de classes. Ça allait faciliter les choses. Mais, vouloir dire que non, il faut recruter…. Vous connaissez un peu, ce n’est pas les DPE qui recrutent. Ce sont les communes qui recrutent avec l’appui technique des structures de l’éducation. Mais vous connaissez un peu ce que cela veut dire parce que la plupart de ces élus locaux sont issus des partis politiques. Vouloir leur dire de faire un recrutement, c’est automatiquement ouvrir la boîte de Pandore pour recruter leurs militants, leurs parents et autres. Mais nous y veillons, nous aviserons au moment opportun. Si toutefois, les 10 587 ne sont pas recrutés et qu’on recrute d’autres à leurs places, nous réagirons pour pouvoir rétablir tout un chacun dans ses droits.

Cela veut dire que vous n’appréciez pas cette nouvelle décision gouvernementale ? 

Si réellement les conventions entre l’Etat et nous étaient respectées à la lettre, je pense que ça serait salutaire. C’est parce que déjà pour ce qui est de ces 10 587 dont je vous parle sont tous déjà postés, ils sont en situation des classes. Donc en principe, il ne devrait pas y avoir des mouvements, chacun allait rester dans son lieu d’affectation antérieure et on allait recruter les 5 000 autres. Mais vouloir reprendre tout un processus, c’est chercher à déplacer les uns. La dernière fois, quand nous étions avec Mr le gouverneur et Mr le préfet, nous avons eu des assurances que ce sont eux qui vont piloter le recrutement. Donc, quand tous les dossiers vont remonter à leur niveau, ils ont une liste qu’on leur a demandé par une note circulaire de privilégier et qu’ils veilleront. Nous aussi, nous serons là pour veiller.

Mais tout porte à croire que les enseignants contractuels qui exercent sur le terrain n’ont pas le critère qu’il faut par manque de qualification et de diplômes requis. A votre avis, tous ceux qui sont contractuels aujourd’hui répondent-ils au besoin de l’État ?

Tous les enseignants contractuels sont issus des institutions d’enseignement habilitées par l’État guinéen. Le contrôle est déjà fait. C’est authentifié, je ne peux pas vous dire qu’il ne peut pas y avoir des lacunes puisque la perfection n’est pas humaine. Mais pour la plupart, ce sont des enseignants qui ont fait leurs preuves. Si vous prenez par exemple, ne serait-ce que les derniers examens nationaux, vous avez vu la réussite est beaucoup plus du secteur privé. Dans ce secteur là, ce ne sont que les enseignants contractuels qui donnent les cours. Alors, cela prouve à suffisance que nous avons quand même pour l’essentiel. Cela ne se discute même pas. Il y a eu un problème en 2018 parce que certains enseignants pensaient que quand l’État lançait un appel à la candidature pour pouvoir donner les cours dans les écoles, c’est contre leur gré. Ce n’est pas ça. Quand vous êtes diplômé et que vous n’avez pas d’emploi et qu’on vous demande de postuler pour un emploi, c’est la moindre des choses vous les ferez. Ce n’est pas contre Paul ou Pierre. La formation doit être continuelle, le savoir est une quête perpétuelle. Donc l’essentiel, quand un enseignant a le niveau académique, a le b.a.-ba pédagogique. Dans toutes les écoles, il y a formellement des groupes techniques… Dans chaque établissement, je pense que ceux qui enseignent la même matière se concertent à chaque fois pour pouvoir permettre se performer dans son domaine où il a des lacunes.  Je dispense les cours de Français au niveau de 9ème et 10ème années au collège de Tountouroun.

La région administrative de Labé a combien d’enseignants contractuels ?

La région administrative de Labé a 3 555 enseignants contractuels, toutes catégories confondues, qui sont indispensables pour le fonctionnement des écoles. Si vous faites la soustraction de ce nombre, est-ce que l’école va continuer ? Ça ne fonctionnera pas. Si vous prenez par exemple le collège de Tountouroun, là où j’enseigne les cours de français, les cours d’Histoire et de Mathématiques sont tenus par des enseignants contractuels. Si ces enseignants contractuels cessent tout de suite les cours, automatiquement il y aura un grand vide. Et c’est valable pour toutes les autres écoles de la région. Quand vous allez dans la préfecture de Mali, vous pouvez trouver dans un établissement secondaire où il n’y a que le principal qui est titulaire. Tous les autres sont des contractuels. Même chose que Tougué ou Lélouma. Donc, c’est un problème. Le rôle régalien de l’État c’est d’assurer, l’éducation, la formation, la santé, les services sociaux de base. C’est-à-dire, l’effort collectif que tous les guinéens fournissent la redistribution, c’est à travers l’éducation, la formation, la santé… Il faut que le gouvernement se bouge. Quand le gouvernement prend 18 milliards pour construire combien de salles de classes en raison de 700 millions par salle de classe, cela ne répond pas aux besoins actuellement de la population. Il y a des écoles déjà qui ne sont pas fonctionnelles par manque d’enseignants. Il faut déjà résoudre ce problème là avant de penser maintenant à autres choses. Si l’enseignant est recruté, pris en charge, c’est-à-dire ses conditions de vie et de travail sont satisfaisantes, je pense que même sous un hangar, sous un arbre il peut donner les cours. Mais un enseignant qui peine à se nourrir lui-même ou à plus forte raison nourrir sa famille, si vous voulez, vous allez le mettre dans une salle climatisée, il ne donnera pas satisfaction. Donc, il faut penser au recrutement, à l’amélioration des conditions de vie et de travail des enseignants en particulier, des travailleurs en général. Vous êtes ici au collège de Tountouroun. Vous avez vu combien de fois l’État est absent. Nous sommes dans un établissement péri-urbain. Vous avez vu l’état des salles de classe, des bancs et la cour ? L’État ne bouge pas. Il faut que l’État accepte d’assumer son rôle. Je demande à l’État de rectifier le tir et de résoudre les vrais problèmes qui assaillent la société.

Quel est le mot de la fin ?

C’est toujours de lancer un appel à l’endroit des autorités, notamment le gouvernement de veiller à ce recrutement là parce que les mêmes problèmes se posent depuis 2018, c’est-à-dire c’est une patate chaude qu’on ne peut pas jeter.

De retour de Labé, Amadou Baïlo Batouala Diallo pour Guineematin.com

Tél : (00224) 628 51 57 96

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