Incident au procès du 28 septembre : voici ce qui a opposé Toumba à Me Pépé Antoine Lamah

Le procès du massacre du 28 septembre a repris ce mardi, 1er novembre 2022, au tribunal criminel de Dixinn, délocalisé dans l’enceinte de la Cour d’Appel de Conakry. À la reprise de la séance question-réponse, un incident a été enregistré entre le Commandant Aboubacar Toumba Diakité et Maître Pépé Antoine Lamah, un des avocats du capitaine Moussa Dadis Camara lorsque l’accusé a qualifié l’avocat de désagréable.  Un propos qui a mis Me Pépé Antoine Lamah en colère. Et, après plusieurs interventions, Toumba Diakité lui a présenté des excuses, rapporte l’équipe de Guineematin.com qui est sur place.

Guineematin.com vous propose, ci-dessous, l’échange entre les deux :

 

Me Pépé Antoine Lamah : Devant ce tribunal, on est d’accord que ce n’est pas votre signature sur le procès verbal d’interrogatoire de Dakar ?

Aboubacar Toumba Diakité: Maître, je viens de reconnaître la plupart des signatures. Vous êtes désagréable.

Me Pépé Antoine Lamah : Monsieur le Président, vous avez un accusé qui me qualifie de désagréable.

Le juge Ibrahima Sory 2 Tounkara : C’est parce que vous ne voulez pas laisser le tribunal parler.

Me Pépé Antoine Lamah : Donc, le tribunal admet qu’un accusé traite un avocat de désagréable ?

Le juge Ibrahima Sory 2 Tounkara : Si vous le dites, le tribunal l’admet parce que vous ne laissez pas le tribunal parler. Le tribunal veut intervenir ; mais, vous ne voulez pas qu’il parle, alors le tribunal vous suit.

Me Pépé Antoine Lamah : Vous cautionnez un manque de respect à l’égard d’un avocat. Je ne peux pas admettre qu’un accusé traite un avocat de désagréable et que le tribunal l’accepte. Je le regrette vivement.

Aboubacar Toumba Diakité : Je retire le mot Maître.

Le juge Ibrahima Sory 2 Tounkara : S’il vous plaît, il faudrait que chacun comprenne que les règles de jeu de ce procès sont les mêmes contenus dans le code de procédure pénale. Je n’ai pas cessé de le répéter. Et à cette Phase, ce n’est pas à un conseil de dire au tribunal ce qu’il doit faire. Le tribunal respect tout le monde depuis le début de ce procès. Le tribunal a toujours respecté toutes les parties dans cette affaire. Mais, en retour, il faudrait qu’on respecte aussi le tribunal. Quand le tribunal vous dit de vous arrêter, vous devez vous arrêter. C’est ce qui est édicté par les dispositions du code de procédure pénale. Le tribunal tient à ce que ce procès aille dans les meilleurs conditions. Mais, tout en respectant des dispositions du code de procédure pénale. Il faut que chacun joue sa partition et surtout le tribunal estime qu’on est ici entre professionnels. Rien ne se dira ici qui n’est pas contenu dans les différents textes qui nous gèrent. Donc, il faudra que chacun se calme, qu’on s’écoute. Ce n’est qu’un procès. Si ce tribunal respect tout le monde, au retour, ce tribunal a besoin de respect. C’est un accusé qui est là, il n’est pas encore condamné, rien ne dit qu’il est encore coupable, on doit le respecter. C’est comme l’accusé aussi doit respecter toutes les autres parties à ce procès. C’est réciproque. Donc, une fois de plus, il faut qu’on respecte ce tribunal pour qu’on puisse évoluer. Si le tribunal veut que vous arrêtez, vous devez vous arrêter. Il est clair que c’est seul le président qui a la police de cette audience. C’est lui qui a la direction des débats. Quand il dit de vous arrêter, vous devez vous arrêter. L’audience est publique. Quand on est en train de juger, le public aussi nous juge à travers notre façon de faire. Donc, une fois de plus, il faut qu’on se respecte et il faut qu’on respecte les règles qui gèrent ce procès.

Me Pépé Antoine Lamah : Monsieur le Président, je suis respectueux.

Le juge Ibrahima Sory 2 Tounkara : Vous avez la parole et vous n’avez pas à discuter ce que le tribunal a dit.

Me Pépé Antoine Lamah : Je ne discute pas, Monsieur le Président. Si vous ne voulez pas que nous existions dans cette salle, vous pouvez me dire, Monsieur le Président. Mais, je remarque honnêtement un manque de respect à l’égard des avocats de la défense. Ça, je ne peux pas tolérer. Je ne peux pas admettre cela Monsieur le Président. Ce n’est pas du tout normal. Je ne l’admets pas du tout.

Le juge Ibrahima Sory 2 Tounkara : Si vous continuez comme ça, je serai obligé de vous dire de quitter la salle. Jusqu’à preuve du contraire, j’ai la police de l’audience.

Le ministère public (Procureur, Alseny Diallo): Le point notable, c’est vraiment par rapport aux différentes phrases du procès pénal que nous connaissons tous. Le fait est qu’à chaque fois qu’il s’agit de poser des questions, il va falloir que nous nous limitions exclusivement à poser des questions sans commentaire. Tout le problème est né de ceci. Il faudrait que nous sachions tous raison gardée. La courtoisie. elle doit être mise entre les tous les acteurs que nous sommes. Nous autres parties, nous nous devons respect mutuel entre nous. Et nous devons du respect pour ce tribunal et vice-versa.

Me Amadou Oury Diallo (avocat de la partie civile) : Je crois avoir entendu le commandant Diakité dire qu’il retire le mot. Ça veut dire qu’il reconnaît avoir prononcé ce propos qui est vraiment déplacé. Je voudrais l’informer qu’ici que ce sont les avocats qui doivent retirer. Les accusés doivent tout simplement présenter les excuses. Et, c’est pourquoi, Monsieur le Président, pour clore cet incident, je souhaite que vous ordonniez à Monsieur Diakité, de présenter des excuses à notre confrère pour que nous puissions continuer.

Me Lancinet Sylla (avocat de Toumba) : Monsieur le Président, avec votre permission, nous sommes tous des avocats. Il faut avoir l’honnêteté et la sincérité lorsque son client tient des propos inadmissibles. Et, franchement, les propos tenus par notre client à l’égard de notre confrère sont inadmissibles. Nous lui demandons de présenter des excuses au confrère. On ne peut pas traiter un avocat de désagréable.

Le juge Ibrahima Sory 2 Tounkara : J’ai toujours dit que nous sommes entre professionnels ici. Quand je dis ce mot, je ne le dis pas pour le dire tout simplement. À mon sens, ça veut dire assez de choses. Moi, je pensais qu’à cette audience, tout le monde allait comprendre qu’on a à faire à des profanes. Les accusés qui vont défiler devant ce tribunal et des victimes qui viendront, des éventuels témoins qui seront là, ce sont des profanes. Et, nous professionnels, il faut qu’on les comprenne. Des termes parfois peuvent leur échapper. Il faut qu’on comprenne. C’est pourquoi, quand le tribunal vous dit de vous arrêter, vous devez vous arrêter. C’est au tribunal de corriger ça. Comme on le dit souvent, on ne peut pas se faire justice soi-même. Quand le tribunal vous dit d’arrêter et vous continuez, ça va être compliqué. Donc, une fois de plus, nous sommes des professionnels. Donc, ayons le dos large. Ça ne veut pas dire aussi que les accusés doivent parler comme ils veulent. Il doivent comprendre également qu’ils sont à un endroit où ils ne doivent pas tout dire. Il doivent réfléchir plusieurs fois avant de prononcer un mot. Donc, une fois de plus que chacun ait le dos large. Surtout ce tribunal, comprenez qu’il n’est qu’un arbitre. Il n’est pas dans le match. Il n’est pas l’adversaire de quelqu’un. Parce qu’à partir du moment où il va devenir adversaire de quelqu’un, on ne peut plus continuer. Donc, ce tribunal est un arbitre. Le jour où ce tribunal va comprendre qu’il ne peut plus être arbitre, il ne va pas attendre que les parties mêmes le soulève. Il va quitter de lui-même. Jusqu’à preuve du contraire, nous nous considérons comme des arbitres. À toutes les parties prenantes, ce tribunal a les prérogatives d’arrêter tout le monde et à tout moment. Il faudrait que vous compreniez ça. Monsieur Diakité, vous devez accepter toutes les parties dans cette affaire. Parce que vous-même vous êtes accusé. Donc, à ce titre, vous allez présenter vos excuses.

Aboubacar Toumba Diakité : Maître Lamah, veuillez m’excuser.

Le juge Ibrahima Sory 2 Tounkara : Maître, allez y avec des questions et évitez de faire assez de commentaires.

Me Pépé Antoine Lamah : Excuses acceptées. Toutes mes excuses également Monsieur le Président si mes propos ont à un certain moment donné vexés le tribunal. Toutes mes excuses.

Propos enregistré et décryptés par Mohamed Guéasso DORÉ pour Guineematin.com

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