Dadis Camara voulait-il livrer Toumba Diakité à la CPI ? La version de l’ancien aide de camp de l’ex chef de la junte

Commandant Aboubacar Toumba Diakité, ancien aide de camp de Moussa Dadis Camara

C’était le 14ème jour d’audience ce mercredi, 02 novembre 2022 et 7ème (et dernier jour) de comparution du commandant Aboubacar Toumba Diakité dans ce procès du massacre du 28 septembre, au tribunal criminel de Dixinn, délocalisé dans l’enceinte de la Cour d’Appel de Conakry. L’ancien aide de camp de l’ex chef de la junte du CNDD, Moussa Dadis Camara, a continué à répondre aux questions des avocats de ses coaccusés qui tentaient aujourd’hui encore de lui faire porter le chapeau des crimes commis le 28 septembre en 2009.

Habillé en boubou blanc, Toumba Diakité a sereinement répondu jusqu’à la fin aux questions des avocats du Capitaine Moussa Dadis Camara dont celles de Me Dinah Sampil. 

Ci-dessous, Guineematin.com vous propose une partie de la phase de questions-réponses entre Me Dinah Sampil et le Commandant Aboubacar Toumba Diakité.

Me Dinah Sampil : Ces hommes que vous avez vus au camp qui pour vous apparemment ne justifiaient d’aucune identité. Est-ce que vous aviez attiré l’attention du président Dadis là-dessus ?

Aboubacar Toumba Diakité : Ils sont entretenus par le président. Leur venue a été ordonnée par lui. Je vous ai dit, Maître, que l’accès chez le président Dadis, c’est difficile pour certains mais d’autres non. La garde parallèle n’a de contact avec personne. Même pour parler avec moi, c’était des problèmes, juste par jalousie. Donc, je n’ai pas besoin de dire au président tel ou tel. Les personnes qu’ils ont envoyées ont été claires. Ce n’était pas caché à la présidence. Chez Gono Sangaré, il y avait un rassemblement, chez Makambo, il y avait un rassemblement aussi. Alors que le rassemblement du régiment se tient à la place publique sous demande du président. Je vais aider Maître par rapport à la sécurité présidentielle. Pourquoi on ne choisit pas les gardes d’un président pour lui. C’est lui-même qui choisit et personne d’autre encore ne les commande, c’est le président même qui commande ces gens. 

Me Dinah Sampil : Ces gens, vous n’avez pas compris, qui ils étaient, pourquoi étaient-ils là ?

Aboubacar Toumba Diakité : J’ai compris. Je suis là-bas pour ça. 

Me Dinah Sampil : Lorque ces troupes-là vous ont vu en train de porter secours aux leaders politiques. Ce qui, à mon humble avis serait contraire à leurs objectifs, comment se fait-il que vous vous soyez tirer indemne ?

Aboubacar Toumba Diakité : Premièrement, c’est contre mon gré que le capitaine Marcel et d’autres hommes sont venus soustraire Elhadj Cellou et blesser Sidya Touré. Lorsque également je suis arrivé avec les leaders à la clinique, vous comprendrez,  celui-là que vous commandez ne peut pas se permettre de brandir 2 grenades contre toi. Donc, ça prouve à suffisance que je ne commandais pas ces gens-là. 

Me Dinah Sampil : Si donc, parce que les gens ont remarqué sur vous, ils apprennent que c’est Monsieur Toumba et ses hommes qui ont débarqué au stade. Est-ce qu’ils auront une seule minute avant de croire à ce qu’ils ont entendu ?

Aboubacar Toumba Diakité : J’ai dit ici qu‘au stade c’était la confusion. C’est un peu difficile lorsqu’on caricature l’homme, lorsqu’on veut monter un scénario contre la personne. Sauf qu’ici j’ai rappelé que je suis né ici, grandir ici, faire toutes mes études ici (…) J’ai dit ici comment j’ai fait la connaissance avec le président Dadis. J’ai fait ça pour que les gens comprennent comment ils m’ont plongé. Je ne suis pas surpris que les avocats dans leurs rôles soient surpris est-ce que c’est le même Toumba ? Mais c’est le même Toumba qui a une vision, qui exprime sa pensée de façon rationnelle et structurée. Contrairement à ce qu’ils ont voulu me faire passer. C’est très difficile. 

Me Dinah Sampil : Puisque le président Dadis avait été atteint à la tête, l’organe le plus précieux du corps humain, est-ce que vous n’étiez pas surpris à son retour sain et sauf indemne et conscient ?

Aboubacar Toumba Diakité : Je ne suis pas Dieu. L’âme appartient à Dieu. Mais, comme vous l’avez si bien fait remarquer que le président Dadis rarement il apparaissait dans les images sans moi, c’est est vrai. Moi aussi j’ai été surpris, vue tout ce qui est entre moi et lui, je suis avec lui à la présidence. Le matin, on s’est quitté comme d’habitude. Et, à mon fort étonnement, je vois la présidence à la tête le capitaine Dadis et le Général Baldé venir. Au camp Koundara, c’est le président Dadis que je vois descendre de la voiture. L’état dans lequel il est descendu, j’ai vu le Général Baldé qui n’était même pas là quand on prenait le pouvoir. Je me suis dit que le président ne devait pas être ici. J’aurais voulu qu’il m’appelle Toumba où tu es ? Mais, il descend de la voiture sans tarder, je suis encerclé avec des propos, il criait. Il disait « tu vas le regretter ». Les Cessé sont arrêtés eux ils ne parlaient pas. On était six.  J’étais assis, je n’ai pas bougé. J’étais assis je les regardais. On m’a encerclé, les armes s’engagent. C’est lorsqu’il (Dadis) est venu, il m’a frappé à la tête. Mon béret est tombé. Je dis tu me frappes ? Makambo a fui pour aller prendre l’arme-là, voilà d’où est venu le problème. 

Je sais ce qui se tramait parce qu’il y a des gens qui devaient être livrés à la CPI. Si je ne me trompe, le 30, la présidente de la CPI devait faire une visite en Guinée. Donc, c’était le plan qu’ils ont monté. Il fallait sacrifier. Et moi je suis au courant de tout ce qu’il fait. Donc, moi, je vais me laisser sacrifier là-bas ? Je suis militaire et dans le passé j’ai vécu des expériences. Je connais ce qui se passe dans le pays. Beaucoup ont disparu, on entend plus parler d’eux. Donc, le pouvoir, c’est autre chose. Ce n’est pas une chose simple (…).

Me Dinah Sampil : Si vous devriez être livré à la CPI, n’avez vous pas l’assurance que vous vous seriez tiré d’affaire en tenant compte de l’objectivité avec laquelle travaille cette institution ?

Aboubacar Toumba Diakité : Ils ont lu ici le rapport de la commission d’enquête internationale où Maître Lamah a dit que le 30, la commission de la CPI devait rencontrer le président pour un rapport préliminaire. Donc, quelqu’un qui est visé, moi-même je suis conscients qu’il fait partie. Moi, je n’ai pas fait toutes les études là pour souffrir, pour me sacrifier pour quelqu’un comme ça. J’ai une famille, j’ai une descendance qui attend quelque de chose de moi que de me voir subir ce que je n’ai pas fais. Je me suis sacrifié pour le pouvoir mais me sacrifier pour ce que je n’ai pas commis, c’est difficile Maître. Donc, quelqu’un qui est en concert avec cette commission, ils élaborent tout pour me nuire.

Me Dinah Sampil : Quand vous êtes venu au stade, est-ce que votre constat a été effectivement le « pouvoir était dans la rue » ? 

Aboubacar Toumba Diakité : Moi, je ne calculais pas tout ça. Dès lors que je me suis opposé qu’on ne sort pas et personne ne sort. Moi, je n’ai pas vu le pouvoir dans la rue. Le président est au camp moi je suis au camp. Le pouvoir est dans la rue, c’est l’appréciation du président.

Me Dinah Sampil : Est-ce que vous avez constaté que le pouvoir était dans la rue ?

Aboubacar Toumba Diakité : Je ne pense pas si quelqu’un pouvait à l’époque nous soustraire ce pouvoir-là. Ce n’était pas possible. Nous avons retiré le pouvoir-là… Non ! Ce n’était pas possible. 

Propos enregistrés et décryptés par Mohamed Guéasso DORÉ pour Guineematin.com

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