Camayenne : le patrimoine bâti accusé d’avoir causé la mort d’une vieille femme

Djefadima Condé, défunte

C’est une situation dramatique et surprenante qui est survenue dans l’après-midi du mercredi, 14 décembre 2022, au quartier Camayenne, dans la commune de Dixinn. Une vieille femme de 80 ans est décédée juste après le passage d’une équipe du patrimoine bâti public, venue mettre des croix rouges sur sa maison et celles de ses voisins pour les informer qu’ils seront bientôt déguerpis des lieux. Choquée par cette mauvaise nouvelle, Djefadima Condé a subi un arrêt cardiaque et a rendu l’âme, a appris Guineematin.com à travers un de ses journalistes.

Selon Abdoulaye Cissé, un voisin de la défunte, c’est aux environs de 18 heures que des agents du patrimoine bâti public les ont surpris chez eux. En compagnie de plusieurs gendarmes, ils ont marqué leurs maisons de croix rouges. Une façon pour les autorités de demander à ces citoyens de libérer les bâtiments qu’ils occupent et qui appartiennent à l’État. Malheureusement, la vieille Djefadima Condé n’a pas supporté le coup.

Abdoulaye Cissé , voisin de la défunte

« Quand ils sont entrés dans la cour, ils n’ont pas salué quelqu’un, ils se sont directement mis à mettre des croix sur nos maisons. Quand elle a vu ça, la vieille femme a été un peu tourmentée. Elle a demandé à une autre vieille, qui était assise à côté d’elle, si ces gens-là sont venus nous faire sortir. Celle-là lui a dit que c’est apparemment ça, donc on doit se préparer pour partir.

Quand elle a compris que c’est vraiment sérieux, elle a poussé des cris en disant qu’elle a mal au niveau de la poitrine. C’est à travers ses cris que nous nous sommes rendu compte qu’il y avait quelque chose. J’ai dit à mon ami de redresser son pied pour voir si elle n’a pas un problème à ce niveau. Mais le temps pour lui de voir son pied, elle était déjà tombée et a rendu l’âme directement », a expliqué ce témoin.

Les bâtiments en question appartiennent à l’État. Ils étaient occupés par des fonctionnaires, dont la plupart sont décédés aujourd’hui, laissant leurs familles sur les lieux. Leurs occupants soutiennent qu’ils ne s’opposent pas au fait de libérer les lieux, mais ils disent n’avoir pas été informés par rapport à leur déguerpissement. C’est le cas de Sayon Camara, qui demande aux autorités de leur accorder du temps pour leur permettre de se préparer.

Sayon Camara, voisine proche de la défunte

« C’est de la tristesse et la désolation qui nous animent actuellement. Les gens du patrimoine bâti public devaient vraiment prévenir d’abord avant de venir marquer les maisons des gens. Parce que nous, nous sommes nés ici, nous avons trouvé nos parents ici, toutes nos familles sont là depuis très longtemps. On nous a bien sûr fait savoir que ces maisons-là ne nous appartiennent pas, elles appartiennent à l’État, on est conscients de ça, et on savait qu’un jour, on allait quitter ici.

Donc, ce n’est pas le fait de quitter ici qui nous fait mal, mais c’est la manière de le faire. Parce que même si les maisons leur appartiennent, il faut savoir faire faire les choses correctement pour les récupérer, ce qui n’est pas le cas ici. Nous ne refusons pas de libérer les lieux, mais nous ne sommes pas préparés moralement et financièrement. Comme vous le savez, ce n’est pas facile de trouver une maison à Conakry actuellement.

Non seulement les maisons disponibles sont rares, mais aussi l’avance qu’on demande est très élevée. Donc, je demande aux autorités, particulièrement au président Mamadi Doumbouya, de nous accorder un peu de temps pour nous préparer à partir. En plus du manque de moyens, il y a aussi les enfants qui sont à l’école, si on déménage maintenant, ils vont perdre l’année scolaire », a souligné cette citoyenne.

Fatoumata Dioulde Diallo pour Guineematin.com 

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