Affaire M’mah Sylla : Hadja Djamilatou Sow (sa grand-mère) et Dr Djalikatou Soumah témoignent

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Renvoyé lors de la dernière audience pour la comparution des témoins cités par la défense et la partie civile, le procès dans l’affaire M’mah Sylla a repris au tribunal de première instance de Mafanco ce mardi, 20 décembre 2022. Hadja Djamilatou Sow, âgée de 90 ans et grand-mère de M’mah Sylla et Dr Djalikatou Soumah, médecin à Ignace Deen ont livré leurs témoignages dans la présente affaire. La vieille dame pour sa part impute la responsable de la mort de sa petit-fille à Dr Patrice Lamah. Alors que Dr Djalikatou Soumah dit avoir demandé que la patiente soit orientée vers un CHU, rapporte un journaliste que Guineematin.com a dépêché au tribunal.

Munie d’une béquille, Hadja Djamilatou Sow a été la première à passer devant le tribunal criminel. Bien que âgée, elle dispose visiblement de toutes ses facultés mentales, car elle a donné sa déposition sans tâtonnements. Assise sur chaise fournie par le tribunal, la grand-mère, qui est entendue à titre de simple renseignement, a promis de dire la vérité entre elle et Dieu avant de commencer sa narration.

« M’mah Sylla était malade au niveau du cœur et ses menstrues ne venaient pas régulièrement. Ce jour, je suis allée chercher de l’argent pour qu’elle aille se soigner, je l’ai laissée, quand je suis rentrée, je ne l’ai pas trouvée, les voisins m’ont dit qu’elle était partie chez le médecin. Je l’ai appelée mais c’est Dr (Patrice Lamah) qui a pris le téléphone, il m’a dit qu’elle avait un kyste. Je suis allé la voir mais elle avait changé de couleur, elle ne parlait pas et ne pouvait pas s’asseoir. Il a sorti des documents pour me dire qu’elle avait un kyste et que si elle n’était pas opérée, elle allait mourir. Il a demandé 1 500 000 GNF alors je suis allé trouvé 1 000 000 GNF, le reste allait être payé après l’opération. J’ai demandé à Sayon de venir prendre M’mah Sylla mais elle ne pouvait rien faire. Cela s’est passé le vendredi mais si vous opérez quelqu’un après il peut se lever mais elle ne s’est pas levée, elle n’a pas mangé. Je suis parti voir les médecins mais celui qui est en fuite (Célestin Millimono) a dit de ne pas les déranger, qu’ils ont l’habitude de faire les opérations. Le samedi elle n’était plus elle-même, j’ai appelé Sayon nous sommes allés chez les médecins cette nuit. Le lendemain (dimanche) nous sommes partis chez Dr Cissé mais il a dit qu’il ne l’a touche pas. Le lendemain (Lundi) il a appelé les médecins (Patrice et ses collègues) pour envoyer du sang et de l’eau. Dr Cissé a emmené M’mah Sylla dans la salle, c’est lui qui m’a dit qu’elle avait été violée et opérée. Il a montré M’mah à sa maman, dès qu’elle l’a vue, elle est partie à Gaoual en disant qu’elle n’allait pas assister à la mort de sa fille. Après, Dr Cissé a dit qu’elle (M’mah) était ensorcelée, donc je lui ai donné 3 poulets et 50 000 GNF en lui disant de tuer celui qui la suivait même si c’était ma maman[…]. C’est Patrice Lamah qui a tué ma petite-fille », a-t-elle affirmé en larmes et pointant du doigt l’accusé. Elle a également estimé que Dr Sébory Cissé n’a pas été franc avec elle parce qu’il ne lui a pas dit qu’il ne pouvait pas soigner sa petite-fille.

Habillée d’un basin de couleur rouge et portant un foulard, Dr Djalikatou Soumah, médecin à Ignace Deen, a également fait sa déposition. Elle dit avoir été contactée par Célestin Millimono qui a demandé son assistance, mais elle explique tout de même avoir demandé que M’mah Sylla soit admise dans un centre hospitalier universitaire (CHU) au vu de son état.

« J’ai été appelée par Célestin Millimono (homonyme de l’accusé qui est en fuite) qui m’a dit que ses amis ont opéré une patiente mais que cela n’a pas réussi et qu’il y avait les selles qui sortaient par la partie génitale (fistule digestif). Je lui ai dit de l’emmener dans un CHU et pas dans une clinique. Après, il a insisté pour que j’aille voir la patiente, je lui ai dit d’accord en rentrant je vais le faire mais je n’ai pas pu le faire ce jour. Le lendemain, il m’a appelé à 6 heures du matin pour me demander de passer la voir, il nous a attendus, j’étais avec mon mari. Nous sommes partis à la clinique (de Dr Sébory Cissé), où nous avons traversé une salle obscure avant d’arriver là où était la patiente. Il s’est présenté comme chef chirurgien de l’hôpital de Pita mais que ses assistants avaient fait une intervention chirurgicale sur la patiente sans succès et que lui avait essayé en vain de réparer celà. Elle (M’mah Sylla) avait un pansement, les selles sortaient sur ce pansement alors j’ai dit de l’emmener dans un CHU. Nous nous sommes embarqués dans un taxi mais quand on est arrivés à Yimbaya, il y’ avait trop d’embouteillage alors j’ai pris un taxi moto pour aller à Ignace Deen puisque j’étais en retard. Ils sont arrivés à Ignace Deen, mon chef a examiné la patiente et il a dit qu’elle devait être hospitalisée. Il a ordonné un bilan biologique, il a fait une ordonnance et m’a demandé d’aller acheter le dossier médical. Le soir, je suis allée faire son (M’mah Sylla) observation médicale, les résultats de ses examens étaient sortis donc j’ai tout mis dans son dossier médical et le lendemain, elle a été opérée », a relaté Dr Soumah. La victime a au total été opérée deux fois à Ignace Deen avant d’être évacuée en Tunisie où elle a finalement rendu l’âme, en novembre 2021.

Hadja Djamilatou Sow et Dr Djalikatou Soumah ont longuement répondu aux questions du tribunal, du parquet et des avocats des deux parties. 

Ceux de la défense ont d’ailleurs sollicité que le tribunal ordonne la comparution de tous les médecins qui ont opéré M’mah Sylla mais également la projection d’une vidéo de l’interview de la victime faite avant son décès.

Mais pour le parquet, il n’y a pas nécessité de faire comparaître d’autres personnes alors que les rapports médicaux sont versés au dossier de la procédure. Alors, il souhaite plutôt qu’un juge d’instruction soit saisi pour un complément d’informations.

La seule avocate de la partie civile présente aujourd’hui dans la salle d’audience a dit être favorable aux demandes de ses confrères de la défense. Elle a également demandé que d’autres vidéos robotiques, qui montrent comment un avortement est fait, soient aussi projetées.

Après la tentative de projection à huit clos de la vidéo demandée par les avocats de la défense sans succès, le tribunal a renvoyé l’affaire au 28 décembre pour la comparution des professeurs Houssain Fofana et Aboubacar Touré, tous travaillant au moment des faits à Ignace Deen, et pour la suite des débats.

Mamadou Yahya Petel Diallo pour Guineematin.com 

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