Conakry : Maïmouna Kibola Camara, une femme qui défie les hommes dans le métier de paveur

Le métier de paveur, qui consiste à poser des pavés sur la chaussée, est considéré comme le travail des hommes par bon nombre d’observateurs. Mais, ce n’est pas le cas de dame Maïmouna Kibola Camara qui veut briser cette barrière. Cette veuve, mère de trois garçons, s’est lancée dans cette activité de paveur pour subvenir à ses besoins. Elle l’exerce depuis 4 bonnes années, après avoir bénéficié d’une formation grâce au projet Intégra Enabel, de la Coopération Belge, à Bonfi dans la commune de Matam. Interrogée par un reporter de Guineematin.com, dame Maïmouna Kibola Camara est revenue sur son aventure.

Maimouna Kibola CAMARA

Aujourd’hui, Maïmouna Kibola Camara et ses amis évoluent avec une société de sous-traitance de la place dans le cadre du pavage. Elle dit avoir choisi ce métier par passion. « J’ai choisi ce métier parce que j’aime le faire. Je me considère comme un paveur, et non une paveuse, parce que ce métier est celui des hommes et si moi je me lance dedans, c’est vraiment du lourd, je dirai. Ce ne sont pas toutes les femmes qui peuvent faire ça. Les pavés 11, ce n’est pas moins de 15 kilogrammes. Je n’ai pas pu terminer l’école. J’étais mariée et mon mari est mort. Donc, avec ça, je n’ai pas pu aller loin dans mes études. En ce moment, je me suis dit d’aller faire ce travail de paveur. C’est un travail des hommes, mais je me suis dit que je peux le faire aussi comme les hommes. Avec les collègues, nous sommes là, et on est très d’accord dans le travail, on se comprend. Je suis vraiment très fière de pratiquer ce métier. Ce que je peux dire aux femmes qui disent souvent, comme elles n’ont pas terminé les études, elles ne pourront pas faire certains métiers, de ne pas penser ainsi. Moi, je dirai que c’est faux, on peut bien le faire si on le veut. Vous pouvez vous battre comme le font les hommes. Au lieu de courir derrière les hommes pour demander quelque chose, il faut travailler pour soi-même », conseille-t-elle.

Maïmouna Kibola Camara a perdu son mari en 2020. Ce décès est venu s’ajouter à celui de son père. Elle n’avait plus le choix que de foncer. Aujourd’hui, elle vit avec ses trois garçons sans aucun soutien. À travers son métier, elle subvient à leurs besoins. « Le pavage, c’est un peu compliqué, parce qu’il y a beaucoup de chichis dedans. Avant de poser les pavés par exemple, on doit faire beaucoup de choses d’abord le remblai, le lit de pose et autre. Mais, je gagne ma vie dans ce métier. C’est dans ça que j’assure les frais de scolarité de mes enfants, les médicaments pour ma mère… ».

Actuellement, Maïmouna Kibola Camara exerce son métier dans un chantier à Nongo, dans la commune de Ratoma. Elle et ses amis font le pavage des routes à l’intérieur du quartier. La jeune dame travaille, selon elle, sans aucune complication liée à ce métier : dresser le sable, poser les pavés et puis faire le niveau… elle sait tout faire. L’ambition de Maïmouna aujourd’hui est de créer sa propre entreprise de pavage. Déjà, elle a commencé le processus. Elle a même initié un logo et le nom qu’elle veut attribuer à son entreprise. Avec cette passion, Maïmouna Kibola Camara lance un appel pour demander de l’aide aux bonnes volontés. « Je demande de l’aide aux bonnes volontés. J’en appelle à la sagesse de tout un chacun. Certains ont déjà commencé à l’assister. Il y’a un Monsieur, dont je tais le nom, qui m’a donné une tonne de ciments. Et je l’ai remercié pour ça. C’est dans ce sens que je demande au président Mamadi Doumbouya, de m’aider en tant que femme pour que je puisse asseoir mon entreprise. J’ai même commencé les démarches avec la confection du logo « MKC Vision ». Aujourd’hui, j’ai un terrain où je peux faire une clôture pour asseoir mon entreprise, mais les moyens me manquent », a-t-elle déclaré.

Il est très rare de voir une femme exercer un métier de ce genre en Guinée. Maïmouna Kibola Camara s’est donc distinguée des autres pour franchir ce pas jugé par certains très difficile pour les femmes. Mohamed DOGO, un ouvrier paveur, travaille avec Maïmouna Kibola Camara.

Mohamed DOGO

« C’est très rare de voir des femmes d’aujourd’hui pratiquer cette activité qui n’est rien d’autre que le pavage, surtout considéré comme un métier des garçons. Et quand on voit une femme opter pour un tel métier, nous sommes ravis parce-que ce n’est pas un travail aussi facile. Mais, elle a décidé de faire partie des élites guinéennes, nous ne pouvons que lui souhaiter la bienvenue ; et nous aussi les garçons, nous allons faire tout possible pour qu’elle réussisse dans ses projets. Ça fait au moins trois ans que je collabore avec elle et pendant ces temps, on a tissé de bonnes relations. J’espère que dans le futur, ça sera plus que ça. On est maintenant une famille. Maïmouna est assidue dans le travail, elle est dynamique et surtout motivée, parce que ce travail, c’est la motivation qui compte le plus… ».

Ansou Baïlo Baldé pour Guineematin.com

Tel : 622 56 11 82

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