En République de Guinée, les enfants atteints du cancer pédiatrique (cancer de l’enfant) arrivent tardivement dans les centres de soins. Selon les spécialistes, si ces enfants sont reçus avec des signes identifiés tôt, ils ont plus de chance d’être diagnostiqués. Pour mieux comprendre le cancer pédiatrique dans toute sa diversité (les types, les causes, les facteurs de risques, les conséquences, les moyens de prévention, le diagnostic…), un reporter de Guineematin.com a donné la parole au Dr Mamadou Moustapha Diop, pédiatre onco-pediatre, responsable de l’unité derma pédiatre de l’hôpital national Donka et enseignant chercheur.
Décryptage !
Guineematin.com : qu’est-ce que le cancer de l’enfant ?
Dr Mamadou Moustapha Diop : avant de parler c’est quoi le cancer de l’enfant, il faut savoir que l’organisme humain contient des milliards de cellules. Au sein de ces cellules, il y a des gènes. C’est les gènes qui véhiculent l’information génétique. Quand vous avez une cellule cancéreuse qui là, c’est-à-dire une cellule qui est déformée, elle donne d’autres cellules qu’on appelle des cellules filles et elles se multiplient. Donc c’est ces multiplications là qui peuvent entraîner des cancers chez les enfants. Le cancer de l’enfant, c’est un cancer qui touche les enfants de 0 à 14 ans généralement.
Guineematin.com : quels sont les types de cancer de l’enfant ?
Dr Mamadou Moustapha Diop : Les leucémies aiguës lymphoblastique, les tumeurs SNC, les lymphome de Burkitt, le retinoblastome, le nephroblastome, la maladie de hodgkin, le système nerveux central sont les principaux types de cancer chez l’enfant. Parmi ces types de cancer, selon les statistiques mondiales, c’est les leucémies qui occupent la première place. Suivis de lynphomes et les autres tumeurs qu’on appelle des tumeurs solides. Tels que rétinoblastomes, les neuroblastomes et les néphroblastomes.
Quand on veut parler de rétinoblastome, c’est une tumeur qui touche l’œil. C’est ce qu’on appelle le rétinoblastome et le néphroblastome, c’est l’ensemble des tumeurs qui touchent le néphron c’est l’unité structurale psychologique du rein. Donc c’est une tumeur qui dépend du rein. Les lymphomes c’est des tumeurs qui peuvent être maxillo-faciale ou des tumeurs qui touchent l’abdomen. Les leucémies c’est des cancers du sang qui touchent beaucoup plus les enfants.
Guineematin.com : comment se manifeste le cancer de l’enfant ?
Dr Mamadou Moustapha Diop : les manifestations des cancers de l’enfant varient selon les types de cancer. Quand vous avez par exemple le cancer de l’œil qu’on appelle le rétinoblastome , il se manifeste par une tâche blanche au niveau de l’œil ou un enfant qui a un œil kilose . Ou vous avez un enfant qui a un œil enflammé, vous faites tout le traitement qui ne marche pas. Dès que vous avez des signes d’orientation, vous pensez que vous avez à faire avec un cancer de l’œil. Surtout s’ils touchent les enfants de 0 à 5 ans, parce que c’est extrêmement important l’âge.
Guineematin.com : quels sont les facteurs de risques de cette maladie ?
Dr Mamadou Moustapha Diop : les cancers de l’enfant diffèrent les cancers de l’adulte. C’est-à-dire si vous regardez parmi les facteurs de prédispositions, 85 pour cent pratiquement des cancers de l’enfant surviennent de façon sporadique, cest-à-dire sans cause. Ce n’est que 5 à 10 pour cent de ces cancers là qui surviennent sur un certain nombre de facteurs. Des facteurs qu’on appelle des facteurs de prédispositions génétiques ou des facteurs qui peuvent être des facteurs environnementaux.
Guineematin.com : quelles sont les conséquences du cancer pédiatrique ?
Dr Mamadou Moustapha Diop : vous savez quand un cancer est dépisté chez un enfant, dès que vous dépistez de façon précoce un cancer chez un enfant, il a plus de chance de guérir. Mais un cancer dépisté à un stade évolué de la maladie déjà la thérapeutique devient beaucoup plus compliquée et complexe. Et aussi le pronostic devient sombre.
Guineematin.com : quelles sont les complications du cancer de l’enfant ?
Dr Mamadou Moustapha Diop : vous savez, les complications des cancers dépendent des types de cancer. Mais les complications les plus récurrentes c’est la mort, c’est le décès.
Guineematin.com : comment diagnostiquer cette pathologie ?
Dr Mamadou Moustapha Diop : pour diagnostiquer un cancer chez un enfant, c’est tout un ensemble. En amont, si l’enfant est suspecté d’un cas de rétinoblastome. Un enfant qui vient avec un œil rouge ou un œil qui est avec une tâche blanchâtre. La première fois d’abord c’est de consulter chez un ophtalmologue qui va avec le fond d’œil pour confirmer le diagnostic de rétinoblastome. Et si ce diagnostic là est établi pour l’ophtalmologiste, qu’est-ce qu’il faut ? C’est de demander des bilans qu’on appelle des bilans d’extensions et parmi ces bilans d’extensions, il y a le scanner cérébral, un scanner orbito-célebral qui touche et la face et le cerveau pour voir est-ce-que le cancer n’a pas touché certains organes comme le cerveau. Et d’autres examens, quand tu vois un enfant qui a un cancer, obligatoirement il faut le faire une énumération pour savoir son taux d’hémoglobine, il faut faire un examen pour savoir réellement si l’enfant n’a pas une hépatite, il faut faire les sérologies pour voir si c’est un enfant porteur de VIH. Donc cet ensemble de facteurs concoure à instaurer un climat serein, un diagnostic pointu pour que la thérapeutique puisse aboutir.
Guineematin.com : quels sont les moyens de prévention du cancer de l’enfant ?
Dr Moustapha Diop : Vous savez, le cancer de l’enfant n’est ni dépistable, ni prevenable comme le cancer du cold de l’utérus ou le cancer du sein. Le meilleur moyen de prévention du cancer infantile c’est le diagnostic précoce. C’est-à-dire on insiste sur les signes précoces de la maladie pour pouvoir détecter très tôt cette maladie et pouvoir guérir. Imaginez un rétinoblastome diagnostiqué à un stade très précoce, c’est pratiquement cent pour cent de guérison. Vous avez un néphroblastome diagnostiqué à un stade 1, à un stade très précoce, c’est pratiquement cent pour cent de guérison. Vous avez un néphroblastome diagnostiqué à un stade 1, c’est la maladie, pratiquement c’est 93 à 98 pour cent de guérison. Donc nous nous insistons sur le diagnostic précoce. C’est l’élément clé, l’objectif même de l’OMS, d’ici 2030 de pouvoir au moins diagnostiquer dans les pays africains plus de 60 pour cent des enfants atteints de cancer. Mais ça passe par la formation des prestataires de soins, l’information et la sensibilisation de la population sur les signes précoces des cancers.
Guineematin.com : quelles sont les statistiques du cancer de l’enfant à l’hôpital national Donka de Conakry ?
Dr Mamadou Moustapha Diop : depuis que nous nous sommes revenus de notre formation en 2016, on ne diagnostiquait qu’autour de 20 à 30 cas de cancer pédiatrique. L’année 2019 à elle seule, nous avons pu diagnostiquer autour de 160 nouveaux cas de cancer pediatrique. Actuellement, nous sommes autour de 150 à 180 cas annuels. Et n’oubliez pas que ces 20 à 30 pour cent de ces enfants qui viennent dans les structures sanitaires selon l’OMS, normalement en Guinée, nous devons diagnostiquer autour de 440 à 600 cas annuels de cancer pédiatrique. Mais malheureusement, on ne reçoit que 20 à 30 pour cent des enfants dans nos structures sanitaires d’où la pertinence de faire des séances de sensibilisation et de formation du personnel de santé ici à Conakry et à l’intérieur du pays. Déjà en 2021, nous avons fait une formation de plus de 100 prestataires de soins entre la région de Mamou, la région de N’Zérékoré, la région de Conakry sur les signes précoces du cancer pédiatrique.
Entretien réalisé par Kaïn Naboun TRAORÉ pour Guineematin.com
Tel : 00224 621144891
