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Choix constitutionnel pour la Guinée : le Pr Salifou Sylla conseille la prudence

Pr Salifou Sylla, ancien ministre de la justice

La Guinée vit sa 3ème transition de son histoire depuis le 5 septembre 2021 avec la chute du Pr Alpha Condé par le Colonel Mamadi Doumbouya et le Comité national pour le rassemblement et le développement (CNRD). Conformément à la Charte du CNRD, le CNT est chargé d’élaborer un projet de Constitution qui sera soumis à un référendum pour son adoption.

En application de cette disposition, le CNT a organisé les 21 et 22 février 2023 un symposium sur le constitutionnalisme en République de Guinée, pour revisiter les anciens textes constitutionnels, ressortir leurs forces et faiblesses mais également débattre de certaines thématiques par des sommités en vue d’aider les Conseiller nationaux d’asseoir leur conviction et faciliter leur travail. Parmi ces personnalités ressources, figure le Pr Salifou Sylla, juriste de profession, ancien ministre de la justice et expert.

Il a accepté de répondre aux questions d’un journaliste de Guineematin.com, le mercredi 22 février 2023, sur le type de texte constitutionnel qui pourrait coller aux besoins de la Guinée.

Tout naturellement, cet homme de droit a catégorisé les textes constitutionnels en deux périodes dans la gestion de l’Etat.

Pr Salifou Sylla, ancien ministre de la justice

«  La Guinée a connu deux grandes périodes constitutionnelles différentes. La première période qui totalise deux Constitutions, celle de novembre 1958 et du 14 avril 1982. Là, la Constitution avait une existence formelle. La gestion était purement partisane. Il existait des institutions constitutionnelles mais c’est le parti qui primait sur tout. C’est le parti qui commandait. L’autre période, nous l’avons expérimentée en décembre 1990, complétée par la Constitution du 7 mai 2010. Elle était libérale avec l’existence de trois pouvoirs distincts. Nous avons donc mis un système constitutionnel avec des principes classiques. On a estimé que cela n’a pas été une grande réussite mais les textes étaient là. Mais j’ai dit que ma préoccupation principale et je la maintiens, s’il y avait eu respect des textes, il y n’aurait pas eu beaucoup de crises qu’on aurait pas pu éviter », a reconnu ce magistrat.

Pour l’ancien ministre de la justice, il n’y a aucun texte immuable et qui ne peut faire l’objet de modification par les hommes. D’où sa prudence et son conseil aux rédacteurs de la prochaine Constitution à faire preuve de sagesse.

« Je dois vous dire que je n’aurai pas la prétention d’indiquer qu’il y a un type de Constitution que nous avons l’intention d’élaborer. Les gens disent qu’il y a des réalités et tout cela. Il faudra attendre que les gens définissent ces réalités-là. Je ne vais pas anticiper. Je voudrais que le travail résulte de notre effort commun et de notre réflexion commune. Et nous allons voir ce qui peut être fait et ce qui va changer fondamentalement. Je dis simplement que quand on prétend qu’on va élaborer une Constitution qui va être inaltérable, qui va perdurer pour des générations futures et tout, moi je dis qu’il faut être très prudent. Les règles de droit s’élaborent en fonction des situations dans le pays, des situations politiques, économiques, culturelles et tout. Ça peut changer et si ça change, on doit changer les règles de droit », a rappelé ce spécialiste des questions constitutionnelles.

Pour finir, cet universitaire prévient que ce n’est pas parce qu’on écrit tout dans la Constitution, qu’elle sera garantie et ne fera pas l’objet de changement.

« En fait, ça va être un travail d’ensemble. La Constitution est un texte de référence. C’est le texte fondamental. Mais on n’a pas besoin de mettre tout dans ce texte. Ce n’est pas parce qu’on a tout écrit qu’elle sera garantie. Non. La Constitution c’est un texte fondamental, un texte de référence. On n’a pas besoin de tout mettre dedans. Parce que ce que j’écoute ici, les gens pensent que la constitution va résoudre tous les problèmes. Mais ce n’est pas vrai. Alors, il faut être prudent et aller doucement. Mais, je crois souvent que c’est l’enthousiasme du néophyte. Quand les gens ne connaissent pas, ils pensent qu’il faut tout mettre dedans. Mais non, on ne doit pas tout mettre dedans », a conclu l’universitaire.

Après ce symposium sur le constitutionnalisme en République de Guinée, le CNT prévoit d’organiser très prochainement un débat d’orientation sur la même question.

Abdallah BALDE pour Guineematin.com

Tél. : 628 08 98 45

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