François Louncény Fall à la barre : « je n’ai jamais senti la volonté politique du président Alpha Condé d’organiser ce procès »

François Lounceny Fall, victime du massacre du 28 septembre 2009

C’est avec une grande sérénité que Français Louncény Fall répond ce mercredi, 29 mars 2023, aux nombreuses questions des avocats de la défense. L’homme politique et diplomate guinéen est à la barre en qualité de partie civile et c’est à charge qu’il a déposé contre le capitaine Marcel Guilavogui devant cette juridiction de première instance. Ainsi, en réponse à l’une des questions de Me Lazare Gbilimou (un des avocats de Marcel Guilavogui), Français Louncény Fall a déclaré qu’il n’a jamais senti la volonté d’Alpha Condé (ex chef de l’Etat guinéen) d’organiser le procès du massacre du 28 septembre 2009.

Guineematin.com vous propose ci-dessous un extrait de cette phase de questions-réponses entre Me Lazare Gbilimou et François Louncény Fall.

Me Lazare Gbilimou : Est-ce que saviez que Monsieur Toumba a déclaré sur les ondes des médias le 11 juin 2016 être créancier de Monsieur Alpha Condé d’une somme de neuf milliards par rapport à son rôle qu’il a joué aux événements du 28 septembre ?

François Lounceny Fall : J’ai quitté le gouvernement en janvier 2016, je n’étais plus là. Mais, Toumba est entre les mains de la justice. La justice peut lui poser la question. Qu’il l’explique. Moi je ne suis pas au courant de ça.

Me Lazare Gbilimou : Est-ce que cela ne prouve pas la volonté manifeste du gouvernement que vous avez appartenu de refuser d’organiser ce procès, le fait que Monsieur Toumba soit créancier de Monsieur Alpha Condé d’une somme de neuf milliards de nos francs ?

François Lounceny Fall : J’ai été dans ce gouvernement, j’ai été proche du président Alpha Condé. Je suis devant la justice. Je n’ai jamais senti la volonté politique du président Alpha Condé d’organiser ce procès. Nous nous avions d’autres compréhensions de cette question. Et, pour nous, il y avait d’autres raisons, mais ce n’est pas une histoire de complot. Mais, je n’ai jamais senti de volonté politique de vouloir organiser ce procès. Je suis sûr que si le 5 septembre n’était pas arrivé, ce procès ne se serait pas tenu maintenant. Je ne suis pas sûr.

Me Lazare Gbilimou : Est-ce quand vous avez constaté le refus, le manque de volonté du gouvernement Alpha Condé, vous avez pris la peine de démissionner ?

François Lounceny Fall : J’ai publié un livre où j’ai raconté tout du 28 septembre. Pourquoi je vais démissionner pour ça ? Je ne pouvais pas démissionner pour ça. J’en parlais tout le temps. Et moi, ma part de vérité, je l’ai livré d’ailleurs publiquement dans un livre où j’ai tout dit. Le livre ne portait pas sur le 28 septembre. Le livre portait sur une série d’événements qui commençait à partir des forces vives, au 28 septembre, à l’élection de 2010, l’arc-en-ciel et tout. Mais, il y avait des chapitres dans lesquels j’ai longuement parlé du 28 septembre. Je pense que parmi tous les hommes politiques, je suis le seul à l’avoir fait. Je voulais dégager réellement ma responsabilité, montrer aux gens que je suis conscient qu’il y a eu des crimes, des gens qui ont été tués, que des militants que nous nous avons mobilisés au stade ont été massacrés et violés. Je ne pouvais pas me taire sur ça. Je ne me suis jamais tue. Et, c’est la raison pour laquelle je suis devant vous.

Me Lazare Gbilimou : Est-ce que cela ne sous-entend pas que vous, membres des forces vives à l’époque, n’étiez associés à ce plan de Monsieur Alpha Condé et Toumba ?

François Lounceny Fall : Ce serait vraiment extraordinaire. Quel plan d’Alpha Condé ? Moi je ne savais pas qu’Alpha allait partir en France. Il est parti, moi je n’ai pas su. On était ensemble aux forces vives, Alpha était très actif dans toutes les réunions. Dès lors qu’on a compris que les choses se passaient de cette manière. D’ailleurs, un moment, je vais vous dire une chose, quand il y a eu l’avènement du CNDD au pouvoir, moi je n’étais pas là. Mais, tous les principaux responsables des forces vives étaient très proches du capitaine Moussa Dadis Camara. Ils le fréquentaient régulièrement, et tous, ils y allaient. Ils étaient convaincus qu’il allait organiser les élections. C’est quand ils ont commencé à comprendre qu’il ne va pas organiser les élections, que tous se sont vraiment démarqués. Mais, moi je n’étais pas avec eux. Et, comment voulez-vous que nous qu’on soit associés à un complot ? Contre qui ? Contre nous-mêmes ? Non ! Notre volonté, c’était qu’il fallait organiser les élections. Et, nous étions dans cette logique.

Propos enregistrés et décryptés par Mohamed Guéasso DORÉ pour Guineematin.com

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