Glycémie et tension élevées : le procureur Aly Touré justifie la non-exécution du mandat d’amener contre Damaro Camara

Amadou Damaro Camara, ex président de l'Assemblée nationale

Le procès de l’ancien président de l’Assemblée nationale, Amadou Damaro Camara, s’est poursuivi ce jeudi, 4 mai 2023, devant la Cour de répression des infractions économiques et financières (CRIEF). Le patron de la neuvième législature était fortement attendu devant cette juridiction, d’autant plus qu’un mandat d’amener avait été décerné contre lui à l’audience précédente. Mais, il a brillé par son absence à la barre. Le procureur spécial de la CRIEF, Aly Touré, a invoqué l’état de santé du prévenu pour justifier sa non-comparution devant la Cour. Le parquetier a notamment indiqué que la glycémie et la tension de Damaro Camara étaient élevées et que sa « saturation en oxygène » était en dessous de la normale, rapporte Guineematin.com à travers un de ses journalistes.

Dans ce dossier devant la CRIEF, il est reproché à Amadou Damaro Camara des faits présumés de « détournement de deniers publics, enrichissement illicite, blanchiment de capitaux, corruption dans le secteur public et privé, prise illégale d’intérêt et complicité ». L’ancien président de l’Assemblée nationale est poursuivi dans cette affaire avec Michel Kamano, Zenab Camara et l’expatrié chinois Jin Sun Cheng. Ces trois derniers ont comparu ce jeudi devant la Cour, mais Amadou Damaro Camara a brillé par son absence. Son état de santé n’a pas permis l’exécution du mandat d’amener qui a été délivré à son encontre par la Cour.

Aly Touré, procureur spécial près la CRIEF

« Il se trouve qu’il (Amadou Damaro Camara) n’était pas à la maison centrale, il est encore hospitalisé à l’hôpital Sino-Guinéen. Mais, puisque c’est un mandat dans lequel il est dit qu’ordre est donné à tout dépositaire de la force publique de prêter main forte à l’exécution du présent mandat, et le mandat d’amener, sa teneur c’est de présenter celui qui en est le principal concerné devant votre cour, c’est pourquoi nous avons attendu la date d’aujourd’hui pour pouvoir l’exécuter. Parce que c’était pour les audiences. Monsieur le président, lorsque les gardes pénitentiaires sont allés à la maison centrale, ils ont exhibé le mandat comme cela se doit dans les règles de l’exécution du mandat, les médecins ont laissé libre cour d’extraire Amadou Damaro Camara, de le mettre dans le pick-up et de l’envoyer devant votre cour. Sauf que le médecin traitant a attiré l’attention des gardes pénitentiaires sur l’état pathologique de monsieur Damaro. Il leur a dit : le mandat, c’est une décision de justice qui s’exécute d’accord, c’est votre devoir. Mais, nous avons l’obligation de vous donner les paramètres vitaux du patient (Amadou Damaro Camara) que nous avons ici. Alors, c’est en ce moment qu’ils ont déroulé tout ce qu’ils savent faire là-bas dans leur jargon. Nous, on ne maîtrise pas cela. Lorsque les gardes m’ont remonté l’information, j’ai tenu à échanger directement avec le médecin traitant pour savoir quelles sont les difficultés liées à l’exécution de ce mandat, parce que nous en sommes les principaux concernés. C’est alors que le médecin m’a dit que le patient a une glycémie actuelle de 2 grammes. Je lui ai dit : la normale c’est combien ? Il m’a dit : c’est aux alentours de 1,1 ou 1,2 grammes. Il a dit que la tension est très élevée et la tension serait à 15, 9 ; alors que la normale avoisinerait 12, 8. Il a ajouté également que la saturation en oxygène était de 86 ; alors que dans les conditions normales, la saturation en oxygène qui pourrait passer à la normale devrait être au-dessus de 95%. Il m’a dit voilà en tout ce que j’ai à vous dire sur la situation de son état… J’ai tenu à demander au médecin traitant : qu’est-ce qu’il fallait pour lui (Amadou Damaro Camara) en ce moment ? Il m’a dit : il lui faut un repos d’au moins une semaine. Et, je le garantis que dans 10 jours, il pourra être disponible. C’est pourquoi monsieur le président, honorables assesseurs (…), nous suggérons à votre Cour, nous demandons à votre Cour, de nous donner l’opportunité d’exécuter votre décision. Cette opportunité, c’est de vous demander encore une fois un délai raisonnable pour que celui qui fait l’objet de ce mandat soit apte à être conduit devant vous pour que nous le fassions conformément à ce que vous avez exigé dans l’acte du 27 avril dernier… Le ministère public estime que l’inexécution de ce mandat n’est nullement liée à un manque de volonté de notre part. Mais, on a juste été confrontés à l’avis des médecins. Ce pourquoi nous vous avons été saisis. C’est pourquoi nous vous suggérons humblement d’accorder au ministère public un délai minimum de 10 jours tel que le médecin nous l’a dit pour que nous présentions monsieur Amadou Damaro Camara devant votre auguste barre », a dit le procureur Aly Touré.

Finalement, la cour a accédé à cette demande du ministère public, tout en ordonnant la continuation des débats dans ce dossier avec les prévenus Michel Kamano, Zenab Camara et Jin Sun Cheng.

« La Cour est très sereine. Nous contribuons à la manifestation de la vérité, personne n’est coupable désigné. Quand la Cour écrit à un prévenu, suite doit être donnée à ses écrits. La cour n’a aucun rapport pour savoir ce qu’il en est… Donc, le mandat est maintenu, c’est une décision. Sauf qu’il faut toujours humaniser la démarche. Il faut tenir compte de son état ; et, l’État est invité à prendre ses responsabilités pour soigner et veiller à l’état de santé du prévenu afin qu’il comparaisse ici serein et que l’on puisse avoir plus de lisibilité dans nos démarches, parce qu’on veut voir clair dans ce dossier. Monsieur le procureur, le mandat est maintenu. Nous continuons les débats jusqu’à ce qu’il comparaisse, et il comparaîtra », a déclaré le président Francis Kova Zoumanigui.

Parmi les trois prévenus présents à la présente audience, seul Michel Kamano est passé à la barre pour répondre aux questions des avocats de la défense et à celles de la partie civile. Et, dans ses explications, l’ancien député et questeur à l’assemblée nationale, a nié une fois encore toutes les infractions articulées contre lui, tout en expliquant à la Cour comment et pourquoi les 15 milliards de francs guinéens incriminés dans cette affaire ont été utilisés.

Après que les avocats de la défense et la partie civile aient fini de poser leurs questions, c’était le tour du ministère public de poser les siennes. Mais, celui a sollicité un renvoi afin de pouvoir poser toutes ses questions. La Cour accède à cette demande et renvoie finalement l’affaire au 15 mai prochain pour la comparution d’Amadou Damaro Camara, la production d’un relevé de compte bancaire des 5 milliards de francs guinéens reliquataires allégués par Michel Kamano lors de sa déposition et la suite des débats.

Mamadou Laafa Sow et Fatoumata Djoulé Diallo pour Guineematin.com

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