Libération de Foniké Mengué, Ibrahima Diallo et Billo Bah : ouverture d’un autre front

En détention à la maison centrale de Conakry depuis le 1er août 2022 (pour certains), les leaders du Front national pour la défense de la constitution (FNDC) ont recouvré leur liberté dans la soirée d’hier, mercredi 10 mai 2023. Oumar Sylla alias ‘’Foniké Manguè’’, Ibrahima Diallo et Mamadou Billo Bah ont été libérés par les autorités de la Transition, en signe d’apaisement du climat politique et social en Guinée. Ces activistes ont été sortis de prison « sans procédure, sans condition ». Et, leurs avocats flétrissent cette situation. Cependant, ils disent quand-même prendre acte de cette libération et réitèrent leur engagement à continuer à assurer la défense de ces activistes, rapporte Guineematin.com à travers un de ses journalistes.

Oumar Sylla alias ‘’Foniké Manguè’’, Ibrahima Diallo et Mamadou Billo Bah étaient poursuivis pour un chapelet d’infractions dont « attroupement illégal sur la voie publique et complicité de destruction d’édifices publics et privés ». Mais, ils ont toujours clamé leur innocence et n’ont jamais été jugés pour ces infractions.

Leur détention à la maison centrale de Conakry a toujours été dénoncée par le collectif des avocats en charge de leur défense. Ces derniers ont sans cesse appelé à l’organisation de leur procès pour qu’une juridiction de jugement se prononce sur leur sort, en vain.

Cependant, ces dernières semaines, avec la médiation des leaders religieux, ce dossier qui jouait au ping-pong entre la cour d’appel et la cour suprême a connu une célérité qui a permis à la cour suprême de statuer ce mercredi sur le pourvoi du parquet général de la cour d’appel dans cette affaire. Cette audience était initialement prévue pour le 16 mai prochain devant la première chambre pénale de ladite cour, mais elle a eu lieu plus tôt que prévu. Et, la cour a déclaré irrecevable le pourvoi du parquet général de la cour d’appel.

Les regards étaient ainsi tournés vers le tribunal de première instance de Dixinn pour la fixation d’une date pour la tenue d’un procès dans cette affaire, mais la libération de Foniké Manguè et Cie est intervenue quelques heures après la décision de la cour suprême. Leurs avocats se réjouissent de cette « libération met fin à une injustice d’un autre âge », mais ils dénoncent aussi une violation des règles de procédure et des principes de droit. Me Salifou Béavogui et ses pairs auraient souhaité qu’un procès juste et équitable départage leurs clients et les autorités de la Transition dans cette affaire.

« Le collectif des avocats chargés de la défense de monsieur Oumar Sylla alias ‘’Foniké Manguè’’, monsieur Ibrahima Diallo, monsieur Billo Bah et monsieur Saïkou Yaya Barry vient d’apprendre à l’instant la libération de nos clients sans procédure, sans condition. Le collectif prend acte de cette remise en liberté des personnes qui avaient été arbitrairement arrêtées, jetées et maintenues en prison au-delà tout délai de détention préventive et en violation manifeste de toutes les règles de procédure. Le collectif a exigé la tenue d’un procès juste et équitable dans lequel le droit de la défense de nos clients serait respecté pour que la justice et elle seule décide du destin et du sort du dossier. Parce que force doit rester à la loi. Et, pendant que le collectif s’attendait à l’ouverture de ce procès, parce qu’ayant appris que dès ce soir le fond du dossier a été transmis du greffe de la cour suprême au greffe du tribunal de première instance de Dixinn, le collectif a appris que les susnommés ont été libérés. Le collectif réaffirme son attachement aux principes et règles de droit qui gouvernent la procédure pénale dans le cadre d’un procès juste et équitable. Pour le collectif, seule une décision de justice peut libérer ou départager les parties. Le collectif n’a jamais été associé à cette forme de libération qu’il rejette et qu’il flétrit avec une dernière énergie, parce que n’étant pas conforme à la loi. Pour le collectif, nos clients auraient été libérés à l’audience publique et à travers des débats contradictoires sur la base d’une décision de justice. Mais, qu’à cela ne tienne, s’ils ont été libérés, le collectif prend acte et continuera à assurer leur défense conformément à la loi et aux principes qui gouvernent tout procès pénal. Le collectif regrette que pendant onze mois que des citoyens soient privés de leur liberté, sans procès. Le collectif regrette que tout le temps qu’a duré cette détention irrégulière, toutes les demandes régulièrement introduites devant les cours et tribunaux aient été systématiquement rejetées sans le moindre examen pour statuer sur leur pertinence… Le collectif se réjouit quand-même du fait qu’il ait été mis fin à une injustice d’un autre âge », a réagi Me Salifou Béavogui quelques instants après la libération de ces leaders du FNDC.

Dans la foulée de cette libération, le Bâtonnier de l’ordre des avocats de Guinée a programmé un point de presse pour ce 11 mai 2023. Un point de presse qui portera sur « le dysfonctionnement de la justice guinéenne ». Mais, on ignore si ces dysfonctionnements portent sur cette procédure politico-judiciaire qui vient de s’éteindre.

Mamadou Baïlo Keïta pour Guineematin.com

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