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Mohamed Diané à la CRIEF se fâche : « je ne vais cautionner une parodie de justice à connotation politique »

Dr Mohamed Diané, ancien ministre de la défense nationale et ministre chargé des affaires présidentielles sous le règne d'Alpha Condé

Le barreau de Guinée n’a pas commis d’avocats d’office pour la défense des intérêts de Dr Mohamed Diané, ancien ministre de la Défense nationale sous le régime Alpha Condé. L’annonce, rendue publique ce lundi 13 mai 2024 à la Cour de Répression des Infractions Economiques et Financières (CRIEF), intervient alors que les avocats de cet ancien dignitaire, se sont retirés de la procédure. Une situation qui complique davantage ce dossier à l’épilogue incertain. Dr Mohamed Diané n’a pas caché son  désarroi face à la tournure des événements, a constaté un reporter que Guineematin.com avait dépêché à la CRIEF.

Les débats au fond dans cette affaire, qui oppose le Ministère public et l’Etat guinéen, à Dr Mohamed Diané tardent toujours à se poursuivre devant la  chambre de jugement de la CRIEF. Les avocats que le prévenu a constitués pour défendre ses intérêts dans la présente procédure ont suspendu leur assistance.

Face cet état de fait, la Cour, sur demande de la partie civile et du ministère public, avait demandé au bâtonnier de l’ordre des avocats de Guinée de commettre d’office des avocats pour défendre la cause de l’ancien ministre de la défense nationale.

En réponse à cette demande, le bâtonnier de l’ordre des avocats, maître Mamadou Souaré Diop a adressé un courrier à la Cour dont le président Yagouba Conté a fait lecture après avoir appelé le dossier. « Monsieur le président, nous accusons réception de votre courrier relatif à la commission d’office d’avocats en faveur de monsieur Mohamed Diané, ancien ministre de la défense, dans l’affaire l’opposant au parquet spécial près la Cour de Répression des Infractions Economiques et Financières (CRIEF). Nous vous remercions vivement de votre souci en tant que président de cette chambre du respect des droits de la défense de monsieur Mohamed Diané en raison de leur sacralité constitutionnelle. Le barreau dont la mission principale est la défense des droits humains, partage largement votre préoccupation. Répondant à votre demande, de prime abord, dès réception de votre courrier précité, le secrétaire général de notre ordre s’est entretenu avec les avocats de monsieur Diané pour en débattre et en même temps faire suite également à une correspondance qu’ils avaient adressée à cet effet au bâtonnier de l’ordre des avocats. Après analyse, il ressort que ces avocats, ont simplement suspendu leur participation au procès car ils estiment que des garanties d’une bonne administration de la  justice ne sont pas observées en raison entre autres de l’inexécution des décisions de justice des libertés pourtant exécutoires de Droit selon eux en faveur de leur client dans ce dossier. Ils ont invoqué à l’appui de leur décision rendue par Cour de justice de la CEDEAO qui sont insusceptibles de recours en vertu de l’article 19 du protocole additionnel de cette communauté dont la Guinée, notre pays, a ratifié en rappelant la portée obligatoire des traités internationaux adoptés, qui s’imposent aux autorités judiciaires exécutives. Eu égard à ce qui précède, vous conviendrez avec que les conseils de Monsieur Diané n’ont déposé, encore moins signifié aucune formalité de déport ou mettre fin à leur constitution, ni exprimé leur refus de participer au procès. Dès lors, à l’absence des preuves de ces actes, nous sommes au regret de ne pouvoir satisfaire à votre demande ; et en conséquence, nous ne saurions commettre d’office des avocats en remplacement des confrères actuels constitués personnellement par l’accusé monsieur Mohamed Diané », a lu Yagouba Conté, avant de donner la parole au ministère public et à la partie civile pour leurs avis respectifs sur le contenu de la correspondance et la suite à en donner.

« Nous sommes surpris par une telle réaction monsieur le président. Dans la mesure où votre la procédure que Cour a entreprise pour s’adresser au bâtonnier est tout à fait une procédure et légale. Et la base, vous l’avez évoquée dans votre courrier. Il s’agit d’abord des dispositions du code de procédure pénale par rapport aux droits de la défense, puis les dispositions de l’article 13 de l’ordre portant création, attributions, organisation et fonctionnement de la Cour de Répression des Infractions Économiques et Financières (CRIEF) qui rend obligatoire le droit à la défense de toute personne poursuivie devant la Cour. C’est en vertu de ces dispositions que vous vous êtes adressé au bâtonnier par ce courrier. Et moi je pense que c’est une décision de justice dont nul ne doit se soustraire. Et nous sommes en face d’une difficulté. Peu importe qu’il y ait une lettre indiquant le déport de l’avocat ou des avocats du prévenu. Mais ce qui reste clair, c’est que leur attitude est de nature à entraver la poursuite de cette procédure dans l’affaire ministère public et l’Etat guinéen contre monsieur Mohamed Diané. Moi je pense que cela est largement suffisant pour que monsieur le bâtonnier comprenne qu’il devait commettre d’office un avocat. Mais très majoritairement, cela n’a pas été le cas, monsieur le président », a déclaré le parquet spécial.

Une position pas forcément partagée par la partie civile. « Je vais à contre-sens de ce que le ministère public vient de dire parce que je suis d’accord avec le bâtonnier par rapport aux avocats de monsieur Diané. Parce que ses avocats n’ont signifié aucune lettre de déport. Donc, monsieur le président, s’ils ne viennent pas, ça c’est de leur faute. Ça ne peut pas empêcher la Cour de tenir ses audiences. C’est pourquoi, moi je ne fais aucun procès à monsieur le bâtonnier et c’est ce que moi d’ailleurs j’ai toujours dit ici. Les avocats ont été constitués. S’ils ne viennent pas, à qui la faute ? La loi dit que les prévenus devant cette Cour doivent avoir des avocats et le prévenu a pris des avocats. Si ses avocats ne viennent pas, ça ne peut pas empêcher le déroulement de vos audiences. C’est pourquoi moi je pense que le bâtonnier a bien fait de ne pas constituer des avocats. C’est pourquoi je vous prie monsieur le président de bien vouloir ordonner la continuation de cette affaire, que le débat soit ouvert et que des questions soient posées à monsieur Mohamed Diané. Ce n’est pas de violer ses droits. Ses droits ont été respectés mais s’il veut mettre le bâton dans les roues de la Cour, je crois qu’on doit prendre nos responsabilités. Cette affaire ne va pas demeurer sempiternellement ici. Je vous prie de vouloir ordonner la continuation des débats monsieur le président », a dit Me Amadou Baben Camara

Interrogé sur le contenu du courrier adressé à la Cour par le bâtonnier de l’ordre des avocats de Guinée, Dr Mohamed Diané se déchaîne et exprime sa colère contre la non exécution des décisions de justice rendues en sa faveur.

« Monsieur le président, je pense que dans le courrier, le bâtonnier a bien précisé. La non exécution de la décision de la Cour de justice de la CEDEAO et de celle même de la chambre de contrôle de l’instruction de la CRIEF ; donc, tant que ces décisions ne sont pas exécutées, moi je ne n’ai rien à dire. Vous pouvez prendre toute décision que vous voulez, je ne vais cautionner une parodie de justice à connotation politique …»

Après ces déclarations du prévenu, la Cour a renvoyé l’affaire au 27 mai prochain pour une nouvelle fois la commission d’office d’avocats de la défense dans cette affaire.

Mamadou Laafa Sow pour Guineematin.com

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