Le président de la transition, le Général Mamadi Doumbouya, a accueilli son homologue du Rwanda à l’aéroport international Ahmed Sékou Touré de Conakry dans l’après-midi de ce lundi, 13 mai 2024. C’est la deuxième visite en Guinée de Paul Kagamé en l’espace de treize mois, et la troisième rencontre entre les deux chefs d’Etat. Seulement, cette fois on nous apprend que c’est une visite d’amitié. Pour mieux cerner les enjeux de cette visite, un reporter de Guineematin.com a interrogé le politologue Kabinet Fofana, directeur de l’Association guinéenne des sciences politiques.
Pour cet analyste politique, cette visite du président rwandais peut-être perçue comme une volonté de celui-ci de renforcer son influence sur le continent.
« Il s’agit pour Kagamé de positionner son pays à travers un soft power gagnant ». Pour Kabinet Fofana, la stratégie est de parler à tout le monde autant aux présidents élus qu’aux chefs de juntes. Et ceci est important, souligne notre interlocuteur.
Cette visite est une visite d’amitié, nous dit-on. Mais, à l’instar de toutes les rencontres, il y a évidemment ce qu’on confie au public de façon officielle et il y a toujours du off.
Par ailleurs, Kabinet Fofana explique que l’axe Conakry-Kigali semble s’être raffermi davantage. « Les deux pays sont dans une dynamique de raffermissement des liens de coopération bilatérale. Certes, ils entretenaient des relations bien avant l’arrivée de cette junte mais ces relations se sont consolidées avec la venue des militaires au pouvoir, notamment avec l’ouverture en début de cette année d’une ambassade de Guinée à Kigali ».
Assurément, des opportunités d’affaires pourraient être évoquées sur divers domaines entre Conakry et Kigali, notamment sur le volet militaire et sécuritaire, les mines, les technologies, l’assainissement et l’aménagement du territoire. Ce sont des axes sur lesquels ces deux Etats pourraient s’engager dans une relation de coopération sud-sud. Surtout que le Président du Rwanda évoque souvent des partages de connaissances et d’expertise entre les pays africains et le reste du monde comme étant indispensable pour créer de meilleures conditions pour nos populations.
« Aujourd’hui, le Rwanda est dans une dynamique de vendre sa sécurité et son expertise militaire. Deux domaines susceptibles d’intéresser les autorités de la transition Guinéenne. Le Rwanda peut être un partenaire dans le domaine technologique sans parler des mines. Concernant le secteur minier, il faut indiquer qu’en 2019 le Rwanda a lancé sa raffinerie d’or, ne disposant pas de ressources minières importantes, comme la Guinée, il est possible que les autorités Rwandaises convoitent notre or pour alimenter sa raffinerie », estime Kabinet Fofana.
Sur un hypothétique intérêt de la Bank of Kigali pour la Société générale, l’analyste politique, n’exclut pas une telle possibilité mais il reste toutefois assez dubitatif.
« Nous savons que les Etats sont parrains de leurs entreprises nationales, dit-il. Mais, il faut tenir compte du fait que la Société générale appartient à un groupe français, alors je pense que la Guinée n’est pas la destination la mieux indiquée ni l’interlocuteur approprié pour un éventuel rachat ou d’une cession ou d’une joint-venture. De mon avis personnel, Paris serait la destination idéale…»
Au-delà du raffermissement des liens diplomatiques et économiques entre les deux pays, les multiples visites du Président Rwandais pourraient être une stratégie visant à démontrer la capacité de son pays à influencer et à orienter les relations internationales en sa faveur. Car, à l’image du Nigeria, de l’Afrique du Sud et de la Côte d’Ivoire, le Rwanda cherche à prouver qu’il a de l’influence, qu’il est un pays leader.
Issiaga Barry pour Guineematin.com
