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Kankan : ce qu’on ne vous a pas dit sur l’origine et l’expansion de la célèbre danse Mamaya

El Hadj Mohamed Lamine Kaba, président de la coordination des sèdès et conseiller auprès de la notabilité

Dans quelques heures, les fidèles musulmans vont célébrer la fête de Tabaski. Dans la commune urbaine de Kankan, l’on se prépare activement pour la traditionnelle danse Mamaya, devenue un patrimoine du Nabaya. Elle sera célébrée pendant 3 jours, à compter du jour de la fête, dans une grande ferveur. Pour parler de cette Mamaya, les reporters de Guineematin.com basés dans la préfecture, ont donné la parole à Elhadj Mohamed Lamine Kaba, alias Ringo, historien de son état, qui a donné d’amples informations sur le sujet.

Décryptage !

Guineematin.com : Bonjour M. Kaba, aujourd’hui nous parlons de la Mamaya, cet événement culturel qui réunit beaucoup de monde à Kankan. Dites-nous, qu’est-ce que la Mamaya ? Quelle est son histoire ?

El Hadj Mohamed Lamine Kaba: Merci de m’avoir posé cette question. Vous savez, la Guinée est composée de quatre régions naturelles, et chacune a ses spécificités culturelles. Par exemple, à Kouroussa, c’est le Doumdoumba ; à Kérouané, c’est le Coucou ; et ici à Kankan, c’est la Mamaya. La Mamaya est une activité culturelle, une danse folklorique qui a commencé vers 1936 -1937. Elle a été vulgarisée en 1945, en pleine Seconde Guerre mondiale. C’est une danse folklorique que nos artistes émérites, notamment la grande famille artistique de Sididou, ont popularisée. Cette famille, connue de tous, comprend des personnalités comme Oumou Diabaté, Djanka Diabaté, et Missia Saran Diabaté, ainsi que les 22 bandes et bien d’autres. La Mamaya est donc une partie intégrante de notre culture et de notre authenticité.

En 1936, nos aînés, notamment El Hadj Sékou Bayo, El Hadj Frantoma Camara et d’autres, voyageaient à Bamako en petits bateaux. Ces jeunes ont découvert cette activité là-bas, mais à l’époque, elle ne s’appelait pas encore Mamaya, mais Bondon. À Kankan, une ville religieuse et sainte, cette activité était mal vue, surtout avec des joueurs de tam-tam à proximité. Les notables s’y opposaient fermement, mais les jeunes voulaient l’adopter. Alors, de porte-à-porte, ils ont cherché le soutien de certains sages. Finalement, El Hadj Dandjo Youssouf Komara a joué le rôle de médiateur et a réussi à convaincre la notabilité d’accepter cette danse, à condition de respecter certaines règles : protéger les femmes et respecter les moments de prière. C’est ainsi qu’un cuisinier du colon blanc, venu du Mali, qui était membre d’un groupe jouant un instrument appelé Bada au Mali, s’est joint aux jeunes. Les gnamakala, les bienfaiteurs qui évitent les conflits, et la famille Sididou ont également contribué à la popularisation de cette activité. Ils ont intégré leurs instruments traditionnels et leur style de danse, ce qui a donné naissance à la Mamaya, une cohabitation des cultures malienne et guinéenne.

En quelle année la Mamaya a-t-elle explosé et comment le nom « Mamaya » est-il apparu, sachant qu’à l’origine, elle s’appelait Bondon ?

La Mamaya a été introduite en 1936, mais elle a été vulgarisée en 1945. C’est cette année-là qu’elle a vraiment pris son essor. La composition de la chanson était là, et tout le monde voulait voir les artistes et les groupes d’âges se produire en public avec leurs tenues traditionnelles. Selon ce qu’on nous a raconté, lors de la répartition de cette danse dans la famille Sididou, une femme qui assistait souvent aux répétitions a demandé pourquoi son nom n’était jamais mentionné dans les louanges. Elle s’appelait Mama, et en voulant dire « Mama Fanan Yéyan » (Mama aussi est là, en malinké), cela a été déformé et est devenu « Mamaya ». C’est ainsi que le nom est apparu grâce à cette déformation linguistique.

Quel est le lien entre la Mamaya et la fête de Tabaski ?

Pour nous, la fête de Tabaski est la grande fête, le moment choisi par notre communauté pour se retrouver en famille, discuter des problèmes communautaires et décider de ce qu’il faut faire. Il fallait créer des activités de réjouissance pour prolonger ces retrouvailles. À l’origine, la Mamaya n’était pas liée à la fête de Tabaski, mais le dynamisme du temps a conduit à cette association. Cela a commencé en 1999 avec notre sèdè Doudiaya.

Qu’est-ce qui vous a amené à associer la Mamaya à la fête de Tabaski en 1999 ?

En 1999, une de nos camarades d’âge a été choisie comme marraine de la Mamaya à Balandou, une sous-préfecture située à 7 kilomètres de Kankan. Nous l’avons accompagnée et nous nous sommes interrogés : pourquoi ne pas organiser la Mamaya à Kankan, où elle est bien connue ? C’est ainsi que notre groupe d’âge a décidé d’organiser la Mamaya à Kankan à chaque fête de Tabaski.

Interview réalisée par Abdoulaye N’koya Sylla et Souleymane Kato Camara à Kankan pour Guineematin.com

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