La réinsertion des jeunes détenus dans les prisons guinéennes reste une préoccupation majeure avec des conditions de détention et infrastructurelle inadaptées. Des activistes des droits de l’homme ont souvent dénoncé cette situation, sollicitant plus d’actions de la part de l’Etat pour faire face au défi. Interrogée à ce sujet par un reporter de Guineematin.com jeudi, 12 Septembre 2024, maître Halimatou Camara, avocate au barreau de Guinée, activiste des droits humains, dénonce les détentions prolongées tout en soulignant l’absence de programmes d’insertion dans les établissements pénitentiaires du pays. Elle rappelle le rôle de l’État dans ce processus en mettant en place des infrastructures modernes.
D’entrée, l’avocate a salué certaines avancées sur le plan législatif, même si beaucoup reste à faire. « Aujourd’hui, nous avons un code de procédure pénale et un code pénal qui datent de 2016. La révision de ces textes a été plutôt bénéfique pour l’aménagement des peines, notamment par rapport à l’utilisation de certains mécanismes dans notre code de procédure pénale et notre code pénal pour permettre, par exemple, à certaines personnes de réaménager leurs peines. Il y a eu ce qu’on appelle le juge de l’application des peines, mais il se trouve que nous n’avons jamais eu de juge de l’application des peines. Et c’est terrible. Cela signifie que toutes les réformes qui ont été faites n’ont pratiquement servi à rien. Il y a d’abord la question de la détention systématique des personnes. On les détient systématiquement parce qu’il y a souvent des problèmes par rapport aux adresses ou à la mise à disposition des personnes pendant une procédure judiciaire », dénonce-t-elle.
Revenant sur la réinsertion sociale des détenus, maître Halimatou Camara parle également d’insuffisances. « Cela ne justifie pas totalement ce système qui facilite la mise en détention et qui, au cours de la détention, ne propose rien pour que les personnes puissent apprendre un métier ou se réinsérer socialement. C’est extrêmement compliqué. Il n’y a pas de système pérenne. Je me rappelle qu’il y a quelques années, il y avait des instructeurs à la prison civile, par exemple, pour épauler les détenus, des personnes qui étaient censées les conseiller, les aider, les soutenir. Mais à mon avis, cela reste insuffisant. Il faut aller au-delà. Il faut d’abord revoir les détentions, éviter les détentions systématiques, et aussi mettre en œuvre le juge de l’application des peines pour que cela devienne une réalité et pas seulement une idée. De plus, il est nécessaire de construire de nouvelles prisons qui tiennent compte de tous ces facteurs. Quand on est en prison, la vie ne doit pas s’arrêter pour l’individu. C’est aussi une occasion d’apprendre, de se former et peut-être de devenir utile à la société. Sur le plan de l’obligation de soigner, nourrir et insérer professionnellement, cela incombe à l’État. Dans nos textes, un large pouvoir est donné au procureur de la République, notamment en matière de flagrant délit, pour recourir systématiquement à la détention. Il faut rendre cela crédible en s’assurant que tous les éléments de droit sont respectés dans la mise en détention, même si celle-ci peut être longue. Je pense que la liberté n’a pas de prix et qu’il faut véritablement la sacraliser. La détention doit être une exception », a-t-elle martelé.
Ismael Diallo pour Guineematin.com
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