Les périodes de transition politique sont des moments charnières, cruciaux pour la refondation d’une nation en quête de stabilité et de démocratie. Le glissement du calendrier de la transition, bien qu’il suscite des inquiétudes et des critiques, doit être envisagé comme une opportunité d’éviter la répétition des pièges et erreurs du passé.
En Guinée, l’histoire récente nous a montré que des décisions précipitées et des manquements aux fondamentaux institutionnels peuvent avoir des conséquences coûteuses, graves et durables sur la stabilité, la paix, la quiétude sociale et le processus de construction de la démocratie.
En 2010, un moment clé pour la Guinée, une grande partie des citoyens ont confié aux partis politiques le soin de décider du chronogramme, de la cadence et de l’ordre des élections, ainsi que le choix du premier ministre et la quasi-totalité des membres du gouvernement. Plutôt que de doter la Guinée de lois et d’institutions fortes, ou du moins légitimes, chacun, convaincu de sa victoire certaine à la prochaine élection présidentielle, a préféré miser sur soit, avec la certitude d’être le futur Président de la République, lui conférant la légalité et la légitimité nécessaires, mais au détriment d’un référendum constitutionnel censé encadrer la fonction présidentielle, l’organisation et le bon fonctionnement de l’Etat.
Ainsi, par manque de temps nécessaire pour la transition et par méfiance à l’égard des détenteurs du pouvoir de l’époque, la Guinée n’a pas bénéficié d’une constitution légale et légitime. En somme, la transition a été bâclée.
Cette situation a entraîné de nombreux dysfonctionnements tels que : un fichier électoral contesté, le contenu de la constitution violé peu après sa promulgation, un président d’institution de gestion des élections CENI « importé » et des résultats définitifs des élections vivement contestés. Bref, des crises post-électorales sans précédent.
Les fondements essentiels n’ayant pas été établis en 2010, la conséquence principale en a été la crise du troisième mandat, avec son cortège de morts, de destructions matérielles et de reculs dans tous les domaines pour la Guinée.
En 2020, pour remédier à cette situation, les mêmes acteurs politiques ont sollicité l’intervention de l’armée guinéenne pour un redressement, aboutissant à la prise de responsabilité de l’armée le 5 septembre 2021, qui a été accueilli avec un soulagement général et un soutien massif des Guinéens. Une consultation nationale a ensuite été organisée pour recueillir les avis sur la durée de la transition, débouchant sur un consensus national qui a été transmis à la CEDEAO.
A cet effet, un accord dynamique a été établi entre le Gouvernement Guinéen et la CEDEAO qui repose sur des responsabilités partagées.
Cependant, pour diverses raisons, il devient évident que le délai convenu ne pourra être respecté.
Que devons-nous faire face à cette situation ?
L’intimidation, le chantage et les discours bellicistes ne sont pas la solution. Il s’agit de notre pays et de notre avenir commun.L’histoire récente nous enseigne que la précipitation, l’empressement ou une diligence déraisonnable ne sont pas les réponses adéquates. Il est impératif de mettre en place des lois et des institutions solides avant de se tourner vers le choix des dirigeants.
Ainsi, pour parvenir à un consensus national autour d’un nouveau chronogramme, le dialogue est essentiel. La rue, les chantages et des discours extrémistes sont loin d’être des solutions.
Face à cette réalité, des interrogations légitimes se posent pour éclairer la voie à suivre :
– Le CNRD a-t-il le droit d’établir un fichier électoral qui serait contesté dès le premier tour, comme en 2010 ? Non. Certainement pas
– Le CNRD doit-il renoncer à la responsabilité d’organiser les différentes élections crédibles pour construire une administration territoriale forte et des institutions robustes ? Non. Car cela compromettrait les avancées obtenues.
– Le CNRD doit-il céder à la pression et quitter le pouvoir sans avoir accompli les réformes fondamentales nécessaires pour garantir la stabilité future du pays ? Absolument pas.
Alors, le glissement du calendrier de la transition en Guinée, loin d’être une simple question de délai, doit être vu comme une opportunité de construire durablement les fondements d’une démocratie solide et d’un dialogue sincère. Il est crucial de tirer les leçons du passé pour ne pas répéter les mêmes erreurs. En ce sens, le dialogue, la patience et la nécessité de construction d’institutions fortes doivent primer sur la précipitation, l’empressement et l’esprit du chaos.
Le CNRD, en tant que garant de cette transition est dans l’obligation de veiller à ce que chaque étape soit franchie avec prudence, afin de garantir un avenir stable et radieux pour tous les Guinéens sans précipitation sur la base de pressions.
Concernant les acteurs politiques, ils doivent se souvenirs qu’en 2010, rassemblés et unis au sein des Forces Vives, ils ont été soutenus par la majorité du peuple de Guinée pour contraindre les militaires à quitter le pouvoir dans la précipitation avec l’espoir et la promesse venant d’eux que leurs rassemblements et leurs unions après l’élection d’un président civil allaient aboutir au développement de la Guinée et à la construction d’une démocratie solide.
Fort malheureusement, cela a été un espoir brisé.
Nos hommes politiques n’ont pas respecté leurs engagements ou serments à l’endroit du peuple de Guinée et cela malgré des nombreux morts pour cette cause.
On retiendra que nous avons demandé le départ des militaires en 2009 et nos compatriotes qui sont tombés au stade du 28 septembre en 2009 n’ont eu droit à la justice qu’a l’avènement du CNRD.
Cependant, depuis l’avènement du CNRD au pouvoir à sa tête le Général de Corps d’Armée Mamadi DOUMBOUYA, nous voyons une lueur d’espoir pour le développement de notre pays avec le rassemblement de tous les filles et fils de Guinée autour de lui venant de toutes les obédiences.
Alors la solution et la seule qui vaille est incontestablement l’apaisement des discours politiques et le dialogue pour un autre chronogramme guinéen consensuel.
Par Honorable Mohamed Bakary Keita