L’Université Mahatma Gandhi de Lambanyi, dans la capitale guinéenne, a vibré ce samedi, 9 novembre 2024, au rythme de la cérémonie de dédicace du roman Hotcha Mö Agna, 5ème ouvrage de l’écrivain Amadou Diouldé Baldé. Des dizaines d’étudiants et d’élèves, des acteurs politiques et des ressortissants de Télimélé se sont réunis pour cette dédicace, rendant hommage à une œuvre qui fait écho à l’héritage Peul et à la lutte contre les violences sociales et de genre, a appris sur place Guineematin.com à travers un de ses reporters.
Amadou Diouldé Baldé, déjà reconnu pour sa plume engagée, a présenté ce roman comme un hommage à la culture Peulh et à sa langue, le Pular. Le titre Hotcha Mö Agna est un syllogisme. Hotcha, signifiant « ramassée » et Agna, « détestée », illustre le concept d’appartenance. À travers les 119 pages de son œuvre, divisées en onze chapitres, l’auteur explore des thématiques sensibles et actuelles, telles que le viol, les violences basées sur le genre et la stratification sociale au Fouta-Djallon.
« À travers cet ouvrage, je me porte comme porte-parole d’une société Peulh à travers sa culture qui a tendance à disparaître. J’ai tenu mon originalité dans ce que je fais, parce que j’aime bien que les gens soient ce qu’ils sont. Au-delà de cela, je suis en train de sensibiliser contra les violences basées sur le genre », a déclaré Amadou Diouldé Baldé.
En choisissant une expression tirée du pular, l’auteur cherche à sensibiliser la nouvelle génération à la sauvegarde de la langue maternelle qui, ces derniers temps, tend à être délaissée au détriment des langues occidentales. « Je dis toujours que la langue est l’élément fondamental de la culture. Quand tu perds ta langue, tu perds ta culture aussi. Donc, ça veut dire qu’au-delà de tout, le fait pour moi de choisir le titre en pular, c’est une façon pour moi de vulgariser et de sensibiliser les gens par rapport à l’importance de sauvegarder leurs langues maternelles », affirme l’auteur.
La cérémonie a été marquée par le discours inspirant de Boubacar Diallo, représentant de l’Harmattan Guinée, maison d’édition du roman. Insistant sur l’importance de soutenir les écrivains locaux, il a appelé la communauté à promouvoir les œuvres de Diouldé, à travers des dédicaces et des tournées dans les écoles de Guinée.
« Beaucoup de nos auteurs ne sont pas connus parce que nous ne les valorisons pas. J’encourage donc chacun à acheter ses livres et à l’accompagner pour des tournées dans les écoles, afin que les jeunes puissent le découvrir et s’inspirer de son parcours ».
De son côté, Dr Diao Baldé, président du parti Union pour la Guinée Nouvelle (UGN), préfacier d’un précédent ouvrage de Diouldé, a exprimé sa fierté pour cet auteur originaire de Télimélé.
« Nous, fils de Télimélé, nous devons être fiers d’avoir quelqu’un comme Diouldé. Il est un modèle pour notre jeunesse, et je les encourage à suivre ses traces. »
Stanislas Bangoura, directeur des études du complexe scolaire Yamassafou Bah, où Diouldé a fait ses études secondaires, et où il enseigne aujourd’hui la littérature, a également pris la parole. Il a rappelé comment l’école avait surnommé Diouldé. « Mon Français », en raison de son talent. Après ses études, Diouldé est revenu dans cet établissement pour enseigner et transmettre aux nouvelles générations l’amour de la littérature.
« Nous l’avons reçu comme élève au collège, et lors du test d’admission, son travail a fait que nous l’appelions « Mon français » et Dieu faisant les bonnes choses, la raison pour laquelle nous l’avons appelé ainsi, c’est elle qui nous réunit ici. C’est comme si Dieu le savait déjà. Il a suivi les traces que les professeurs de Yamassafou lui ont montré. Après ses brillantes études, il est revenu à Yamassafou, son école d’origine, celle qui l’a formé. Et aujourd’hui, il retourne l’ascenseur à l’école », s’est réjoui l’ancien professeur de Diouldé, devenu aujourd’hui son collaborateur par la force des choses.
Avec Hotcha Mö Agna, Diouldé Baldé signe un cinquième roman profondément ancré dans les réalités sociales et culturelles de la Guinée. En 2020, il publiait Le Pouvoir pour le Pouvoir, suivi de Kalèdjö en 2021, un livre sur la culture Peulh. En 2022, il a sorti La Proie du Prince Condé ; puis en 2023, Le Message de la Planète, une œuvre dédiée aux questions climatiques.
L’écrivain a conclu la cérémonie en remerciant les nombreux participants et en réaffirmant son engagement : « La culture est un bien précieux. En tant qu’écrivain, je veux continuer à défendre nos traditions et à sensibiliser sur les questions qui minent notre société », a-t-il laissé entendre.
Cette rencontre fut un moment fort, qui témoigne de l’importance de la littérature comme vecteur de mémoire et de changement social. Pour Djouldé Baldé et pour ses lecteurs, Hotcha Mö Agna n’est pas seulement un livre, mais un appel à la préservation de l’identité et à la lutte contre les violences faites aux plus vulnérables.
Lamine Kaba pour Guineematin.com
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