La chambre d’appel de la Cour de Répression des Infractions Économiques et Financières (CRIEF) a ouvert le procès opposant la Société des Eaux de Guinée (SEG) aux Établissements Yacouba Cissé. L’affaire porte sur un présumé détournement de deniers publics d’un montant de 1 milliard 532 millions de francs guinéens. Elle est relative à un contrat signé entre la SEG et les Établissements Yacouba Cissé, sous l’ancien régime. Ce contrat, d’une valeur de 3,5 milliards GNF, portait sur la fourniture de trois camions (deux citernes et un atelier) ainsi que de cinq véhicules tout-terrain pour améliorer la distribution d’eau potable à Conakry. Malgré le paiement total du montant, une grande partie des équipements n’a pas été livrée, selon la SEG, a appris sur place Guineematin.com à travers un de ses reporters.

Me Sékou Traoré, avocat de la SEG, dénonce. « Ces pratiques étaient monnaie courante sous l’ancien régime : des entreprises fictives obtenaient des contrats sans les exécuter. Les Établissements Yacouba Cissé ont perçu 3,6 milliards, soit plus que le montant initial du contrat, sans pour autant livrer tous les équipements. C’est inacceptable ! »
Me Traoré s’insurge également contre la décision rendue devant la chambre de jugement de la CRIEF, qui exonérait les établissements Yacouba Cissé du délit de détournement au motif qu’il n’était ni fonctionnaire ni dépositaire de l’autorité publique. Selon lui, cette interprétation du droit est erronée. « L’article 765 du Code pénal est clair, quiconque détourne des fonds publics peut être poursuivi, indépendamment de son statut. Ce jugement en première instance est une mauvaise application de la loi. Le parquet spécial a également interjeté appel, renforçant la détermination de la SEG à obtenir justice et à mettre un terme à ce pillage des ressources publiques ».
De leur côté, les Établissements Yacouba Cissé, représentés par Me Murielle Ouenssen Ouendo, réfutent les accusations de détournement. Pour eux, il s’agit d’un litige contractuel découlant des défaillances de l’État dans l’exécution de ses obligations.

« Ce contrat devait être exécuté en quatre mois, mais il a duré cinq ans en raison des retards de paiement de l’État. Cela a généré des frais supplémentaires, notamment des coûts de stationnement en Europe pour les camions commandés. Ces retards ne peuvent être imputés à notre client », a laissé entendre maître Murielle Ouenssen Ouendo.
La défense souligne également que certains équipements ont bel et bien été livrés, avec des procès-verbaux émis par les marchés publics pour en attester. Elle demande un examen approfondi des pièces du dossier afin de clarifier les responsabilités de chaque partie.
En outre, la défense insiste sur le caractère civil de l’affaire et conteste les accusations de détournement, espérant convaincre la chambre d’appel que l’État porte également une part de responsabilité dans ce différend.
La cour devra trancher entre ces deux narrations divergentes : d’un côté, une accusation de détournement de deniers publics, et de l’autre, une défense qui invoque un litige contractuel et des responsabilités partagées.
L’audience a été reportée pour permettre un examen approfondi des pièces et des arguments sur demande de la défense .
Lamine Kaba pour Guineematin.com
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