La conduite sur les routes guinéennes est émaillée de nombreux accidents provoqués parfois par le manque de maîtrise du code de la route par les usagers. L’État manque également d’une politique réelle pour engager des réformes dans la sécurité routière. Pour Boubacar Diallo, formateur en conduite automobile au Centre de perfectionnement aux techniques automobiles et mécaniques (CEPERTAM) de Concasseur, beaucoup reste à faire en Guinée pour garantir la sécurité routière. Dans une interview accordée à un reporter de Guineematin.com, il a fait une mise au point sur cette situation, prodiguant d’utiles conseils à tous les acteurs.
Selon Boubacar Diallo, la peur est l’un des plus grands obstacles à la conduite, insistant sur l’importance de maîtriser les pédales dans la voiture. « Je vais dire qu’il ne faut pas avoir peur. Quand tu as peur, tu ne peux pas conduire. Quand tu as peur, il ne faut pas conduire. Vous savez, dans la circulation, il faut savoir que, quand tu conduis, tu n’es pas seul sur la route. Parce qu’une fois que tu prends la route, il faut penser aux piétons, aux véhicules, aux animaux, et aussi aux autres usagers de la route. Quand tu as peur, là, il ne faut pas conduire. Quand tu prends la route, c’est l’ensemble des voies ouvertes à la circulation publique. C’est les véhicules, les motos, les vélos, les animaux. C’est ça qui constitue le public. Ce sont les usagers de la route. Mais, il faut avoir le courage de conduire. Il faut prendre exemple sur quelqu’un qui conduit bien. Il y a une femme, par exemple, qui conduit. Elle se dit : « Moi aussi, il faut que je conduise ». Parce qu’il ne faut pas avoir peur. Dans la conduite, il y a trois pédales. Il y a la pédale d’embrayage, qui sert à changer de vitesse ; il y a la pédale de frein, c’est ton ami ; et la pédale d’accélérateur, c’est ton ennemi. Donc, tu ne peux pas l’éviter. Quand tu vois l’accélérateur, il faut faire très attention. L’accélérateur, c’est ton ennemi. Le frein, c’est ton ami. C’est ça qu’il faut comprendre dans la circulation. Quand tu vois ton ennemi, il faut être très prudent », affirme-t-il.
Poursuivant, Boubacar Diallo dénonce le manque de formation adéquate des conducteurs et des policiers en Guinée. Pour lui, de nombreux conducteurs ne connaissent pas les règles de base du code de la route. Ce qui occasionne des accidents sur la voie publique. « Le code de la route repose sur quatre types de signalisations. Il y a les signalisations horizontales, ce sont les marquages peints sur la chaussée. On les appelle les signalisations horizontales. Elles ont une position horizontale. Ensuite, il y a les signalisations verticales, ce sont les panneaux plantés. Il y a aussi les signalisations lumineuses, comme les feux. Le feu rouge signifie qu’il faut s’arrêter. Quand le feu vert s’allume, il faut passer. Quand le feu jaune s’allume, il faut ralentir, car il annonce le rouge. C’est ça qu’il faut comprendre. Quand tu conduis, n’aie pas peur. On dit même que, quand tu es trop fâché, il ne faut pas conduire. Quand tu es trop content, il ne faut pas conduire ce jour-là. Vous savez, qu’est-ce qui cause les accidents dans la circulation ? La plupart des Guinéens, voire 80 % des Guinéens, ne connaissent pas le code de la route. Par exemple, on dit qu’une route à deux voies, qu’on appelle une route ordinaire, la vitesse en agglomération ne doit pas dépasser 50 km/h. Si la route est dégagée, tu peux rouler jusqu’à 50 km/h, mais en campagne, en brousse, tu peux rouler jusqu’à 80 km/h. En Guinée, c’est 80 km/h, mais en France, c’est 90 km/h. En Guinée, l’État a réduit la vitesse à cause de l’état des routes. Si la route est libre, tu peux rouler jusqu’à 80 km/h, mais en campagne, tu peux rouler jusqu’à 110 km/h. Ça, c’est pour les routes express. L’autoroute, vous savez, les gens ont tendance à dire qu’en Guinée, l’autoroute commence du Palais du Peuple jusqu’à Coyah. Mais je vous dis qu’en Guinée, l’autoroute, c’est celle qui va du Palais du Peuple jusqu’à l’aéroport. C’est ça l’autoroute. Maintenant, en ville, tu dois rouler à 80 km/h si la route est dégagée. Mais tout ce que j’ai cité, les routes, elles ont des panneaux d’interdiction, qui interdisent la circulation sur certaines voies. Ce que je veux ajouter, c’est que beaucoup de gens qui installent des panneaux de signalisation ne maîtrisent pas le code de la route. J’ai remarqué des choses dans la circulation, par exemple, des panneaux mal installés. Il est important que ce soit des gens qui connaissent le code de la route qui soient responsables de ces installations. Sinon, c’est grave. J’ai vu des panneaux en Guinée, comme celui d’un pont mobile, mais est-ce qu’il y a un pont mobile en Guinée ? Et sur le trottoir, on installe des panneaux, des lignes discontinues et des panneaux « arrêt » ou « stationnement interdit ». C’est un problème en Guinée. De plus, sur certains passages, il y a des panneaux « stop » alors qu’il n’y a pas de ligne continue pour indiquer l’arrêt, ce qui est aussi une erreur. Le code de la route est universel. Dans tous les pays du monde, tu vois les mêmes panneaux. Mais en Guinée, on peut voir des lignes de rive mal tracées sur les trottoirs, ce qui n’est pas conforme. Une ligne de rive doit être espacée de 3 mètres, mais ici on voit des lignes rapprochées, comme si elles étaient à 1 mètre. C’est un problème. Et aussi, il faut que les policiers maîtrisent le code de la route. 80 % des policiers ne connaissent pas le code de la route. Cela devient grave, car ils sont censés le faire respecter », lance-t-il
En outre, Boubacar Diallo dénonce le coût élevé des permis de conduire en Guinée avec leur délivrance qui ne fait pas dans les règles de l’art. « Les gens ont parfois leur voiture, mais ne respectent pas les règles : l’assurance, la visite technique, la vignette, le triangle, la boîte de pharmacie, tout doit être en règle. L’État doit revoir le système des permis de conduire. Avant, le permis coûtait 30 000 francs, maintenant il coûte 1 million 170 mille pour un permis de poids léger et 1 million 270 mille pour le transport en commun. C’est trop pour un Guinéen. L’État devrait réduire ce montant à 500 000 francs, ce qui serait plus raisonnable. De plus, les tests de conduite doivent être plus rigoureux. On doit évaluer les candidats à l’examen pour s’assurer qu’ils savent réellement conduire. Mais aujourd’hui, on donne des permis sans vérifier les compétences des conducteurs, et c’est là que les accidents arrivent. N’oubliez pas que la voiture est plus dangereuse que la maladie. Les tricycles sont également un problème en Guinée. L’État doit agir avant que ce phénomène ne prenne encore plus d’ampleur », conseille notre interlocuteur.
Ismael Diallo pour Guineematin.com
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