L’Inspection régionale de la promotion féminine, de l’enfance et des personnes vulnérables de Kankan a célébré en différé la campagne des 16 jours d’activisme contre les violences faites aux femmes et filles. La cérémonie, qui bénéficie de l’accompagnement financier du Fonds des Nations Unies pour la Population (UNFPA), a eu lieu ce mercredi, 18 décembre 2024. La démarche vise à intensifier les efforts dans la lutte contre les Violences basées sur le genre (VBG), qui ont un impact dévastateur sur la santé physique et mentale des victimes. L’objectif principal de cette rencontre était d’informer et de sensibiliser les participants sur les conséquences des VBG et d’interpeller les décideurs à prendre leurs responsabilités, rapporte un des correspondants de Guineematin.com basé dans la préfecture.
Célébrée sous le thème « riposter et reconstruire après les violences « , la commémoration de cette journée avait pour but d’informer et sensibiliser sur l’importance de la lutte contre ces fléaux qui touchent de nombreuses femmes et filles dans la région.
Aminata Bérété, inspectrice régionale de la promotion féminine, de l’enfance et des personnes vulnérables de Kankan, revient sur la nécessité de lutter contre ce fléau.
« Cette commémoration offre l’opportunité d’attirer l’attention individuelle et collective sur la nécessité de faire face à ces violences avec plus de détermination, afin d’assurer la protection des droits des personnes qui en sont exposées. Qui parmi nous peut se réjouir de la survenue ou de la perpétration de 159 cas de viols à l’échelle du pays en moins de 9 mois ? Qui pour cautionner les 105 cas de violences conjugales dans le même intervalle de temps ? Aucun parmi nous ne souhaiterait en être ni auteur ni complice. Or, la frénésie avec laquelle ces actes se multiplient laisse penser qu’un silence coupable plane sur les actes qui, selon le cas des juristes, peuvent être des délits ou des crimes. Je me réjouis du choix du thème des 16 jours d’activisme intitulé ‘’riposter et se reconstruire après les violences’’. Par ce thème, nous comptons attirer l’attention des décideurs à tous les niveaux et susciter la prise de décisions et d’actions fortes en vue d’éliminer les multiples violences auxquelles les femmes et les filles sont exposées dans nos communautés. Certes, notre pays a signé différents traités et conventions. Ces textes reposent sur l’idée que les femmes ont le droit de vivre sans subir de violences. Ils invitent l’Etat, en vertu du Droit international, à faire en sorte que cette ambition devienne réalité. Cependant, malgré les initiatives dans une perspective d’éradication des VBG, la réalité montre que les actes de violence, sous différentes formes, restent récurrents. On voit bien ici que la ratification d’une multitude de conventions internationales relatives à la protection contre les VBG et l’adoption de lois sanctionnant tous les types de violences, sont loin d’avoir produit les effets escomptés », a-t-elle fait remarquer.
Devant cette situation, Aminata Bérété s’interroge : « Que faire ? Face à l’ampleur du phénomène et de ses conséquences sur les objectifs de développement, sur la société, sur la famille, sur les femmes, sur les hommes et sur les enfants, la mobilisation des acteurs pour y remédier est devenue une priorité nationale. La disponibilité de données fiables désagrégées devient également une nécessité pour mesurer l’ampleur, analyser les déterminants et aussi identifier les axes et les zones prioritaires d’intervention sur la question et en même temps faciliter le suivi-évaluation des actions entreprises. La situation des violences nous interpelle tous et nous demande d’agir. Agir, parce que nous sommes redevables des conventions et traités qui protègent les droits humains de la femme et de la fille auxquels notre pays est partie prenante ; agir, au regard de nos aspirations pour un développement durable et équilibré qui ne saurait aboutir si les femmes continuent d’être violentées ou privées de leurs droits ; agir enfin pour honorer la mémoire des nombreuses victimes et actrices de protection des droits des femmes », a laissé entendre l’inspectrice régionale de la promotion féminine, de l’enfance et des personnes vulnérables de Kankan,
A travers un plaidoyer, le Club des jeunes filles leaders de Kankan a mis l’occasion à profit pour mettre en lumière l’importance d’une mobilisation collective pour éradiquer ces violences.
« Chères autorités administratives, judiciaires, militaires et paramilitaires. Nous, membres du Club des Jeunes Filles Leaders de Guinée antenne Kankan, portant la voix des autres jeunes filles et femmes de la région, venons très respectueusement auprès de vos différentes et augustes autorités, vous supplier de veiller sur l’application rigoureuse de la Loi. Par ailleurs, nous sollicitons votre soutien et votre engagement discontinu dans cette lutte infernale pour la cause des jeunes filles et femmes de la Guinée, en général, et de notre région en particulier. Quant à nous, nous sommes engagées et déterminées plus que jamais à continuer le combat quotidien pour la défense de nos droits. Nous sommes plus que jamais engagées pour la lutte contre les violences faites aux femmes et aux jeunes filles guinéennes pour enfin accélérer la création de ce monde juste et égalitaire où le genre n’est plus une barrière. Le changement, c’est nous, et c’est maintenant », a lancé Siré Kaba, vice-présidente du Club des jeunes filles leaders de Kankan.
Au cours de cette rencontre, qui a mobilisé des leaders communautaires, des responsables d’ONG, des représentants de l’administration, ainsi que des partenaires techniques et financiers, des stratégies à mettre en place pour soutenir les victimes et promouvoir les droits des femmes et des enfants ont été largement discutées. Ces acteurs ont exprimé leur volonté de collaborer pour renforcer les actions de sensibilisation et de prévention.
Prenant la parole, Mamadou Tafsir Diallo, volontaire à UNFPA, a donné quelques statistiques des VBG dans la région.
« L’une des violations des droits de la personne les plus répandues au monde est la violence basée sur le genre. Du mois de janvier à octobre 2024, 500 cas de VBG sont enregistrés dans les 5 préfectures de la région de Kankan ; 379 cas de toutes formes de violences ont été gérés, dont 66 déférés à la justice. Les VBG ne connaissent aucune frontière sociale, économique ni nationale, ni sur les réseaux sociaux, milieu géographique, âge, niveau d’éducation, lieu d’habitation, emploi et richesse. Elle met en mal la santé, la dignité, la sécurité et l’autonomie des survivant·e·s. Elle reste entourée d’une culture du silence, soutenue par des croyances et des valeurs culturelles qui l’encouragent, la justifient ou estiment qu’il s’agit d’une caractéristique ordinaire des relations hommes-femmes. Il faut ajouter qu’une adolescente sur 4 a déjà subi des violences sexuelles de la part d’un partenaire ou conjoint. Toutes les 11 minutes, une femme est tuée par son partenaire. La violence basée sur le genre n’est pas uniquement une violation des droits des femmes et des filles. L’impunité dont jouissent les agresseurs et la terreur générée par leurs actes ont un effet sur toutes les femmes et toutes les filles. Les coûts sociaux et économiques sont énormes et limitent les contributions des femmes et des filles au développement international, aux processus de paix et au progrès, et ont des conséquences dramatiques à l’échelle de la planète. Dans la région de Kankan, l’UNFPA accompagne l’inspection régionale de la promotion féminine, de l’enfance et des personnes vulnérables dans la prévention, la lutte et l’accompagnement des victimes de VBG. Notre organisation accompagne également l’inspection régionale de la jeunesse dans le cadre de la promotion de la masculinité positive à travers la mise en place et l’animation des centres conviviaux pour former les futurs hommes et maris modèles à la santé sexuelle et reproductive. L’UNFPA soutient et promeut activement la prévention et l’élimination de la violence à l’égard des femmes et des filles, sous toutes ses formes, notamment par le biais de sa participation aux 16 jours d’activisme contre la violence basée sur le genre », a-t-il déclaré.
Représentant le gouverneur de Kankan à ce rendez-vous, Aboubacar Tounkara, le directeur de cabinet du gouvernorat de Kankan a loué les efforts du gouvernement et des partenaires techniques financiers dans la lutte contre les violences faites aux femmes.
« Je voudrais saluer l’engagement personnel de son excellence monsieur le président de la République à prendre des mesures concrètes pour mettre fin et observer une tolérance zéro à l’égard des violences. Je tiens également à remercier et à accompagner les acteurs à tous les niveaux pendant les quinze jours et oser espérer que les résultats des actions initiées avant, pendant et après la campagne, contribueront à réduire significativement l’impact des violences à l’égard des femmes et des filles. En louant la bienveillante attention que son excellence monsieur le président de la République, le Général d’armée Mamadi Doumbouya accorde aux questions de promotion et de protection de la femme dans notre pays, je voudrais saisir l’opportunité de la présente cérémonie pour exprimer une fois de plus toute ma gratitude aux partenaires aux développement, particulièrement l’UNFPA pour sa précieuse contribution à l’épanouissement de la femme et de la fille », a indiqué monsieur Tounkara.
Depuis Kankan, Souleymane Kato CAMARA pour Guineematin.com