Les Forces Vives de Guinée ont réitéré leur position de ne plus reconnaître la junte au pouvoir en Guinée à partir du 31 décembre 2024. Ils se disent favorables à la mise en place d’une transition civile début 2025 et pourraient appeler à des manifestations. Au même moment, la junte multiplie les restrictions des libertés avec l’arrestation hier jeudi, 26 décembre 2024, d’Aliou Bah, président du Mouvement démocratique libéral (MoDeL). Pour Youssouf Camara, membre du bureau politique de l’UFDG, le CNRD cherche à effrayer la population par ce geste et tous ceux qui ont une position contraire à la junte. Il l’a dit dans un entretien accordé à Guineematin.com à travers un de ses reporters.
Tout d’abord, Youssouf Camara est revenu sur les termes du communiqué des forces vives de Guinée. « Le communiqué des forces vives contient l’ensemble des problèmes de notre pays. Nous avons parlé de la question de la censure de la presse. Vous savez que les médias sont bâillonnés aujourd’hui. Les médias les plus importants, les médias audiovisuels, sont fermés. Il y a des journalistes qui sont au chômage. Et nous avons parlé également de la pauvreté à travers la corruption et le détournement des fonds publics. Parce que la première cause de la pauvreté, c’est la mauvaise gestion. La Guinée est un pays riche. Si nous gérons convenablement ce que nous avons comme ressources, le guinéen lambda doit vivre très bien. Mais contrairement à cela, vous avez appris les différents scandales de détournement, dans l’affaire Simandou, aux Douanes, aux impôts, à la Banque centrale, à la SONAP. Aujourd’hui, notre déclaration met en exergue toute cette mauvaise gestion de la junte, qui s’est présentée au lendemain du 5 septembre comme étant le sauveur de notre économie, comme étant l’organe qui va mettre fin à toutes ces mauvaises pratiques. Mais on voit que la situation ne fait que s’empirer. Ensuite, nous avons parlé du non-respect des engagements des autorités du CNRD face à la CEDEAO. Les 24 mois qui ont été édictés avec 10 points comme activités à mener qui devaient commencer à partir du 1er janvier 2022 n’ont pas été respectés. Nous estimons que tous les manquements aux droits de l’homme, les cas de kidnapping et d’enlèvement sont, entre autres, les différents points qui interpellent aujourd’hui les autorités en place », a déclaré Youssouf Camara.
Par ailleurs, ce responsable communal de l’UFDG à Matam affirme que l’opposition a toutes les raisons de ne plus reconnaître la légitimité des autorités actuelles. « L’opposition, à travers les forces vives, à toute la légitimité de ne plus reconnaître les autorités du CNRD. Raison pour laquelle un appel à manifestation doit débuter à partir du 6 janvier. Moi, j’interpelle le peuple de Guinée, de saisir cette possibilité. Parce que si nous continuons dans ces dérives dictatoriales, nous pensons que nous allons tous subir les conséquences de cette dictature. Donc, c’est le bon moment, puisque l’appel politique, le communiqué qui a été fait, ne demande pas seulement que d’organiser des élections. Ce communiqué prend en compte les questions sociales du pays, les questions sécuritaires, les questions de gestion de nos fonds, donc le problème est global. Raison pour laquelle nous demandons l’observation de ces journées de manifestation par nos concitoyens, pour prouver à l’opinion nationale et internationale que le pays va mal et que personne n’est épargnée aujourd’hui. C’est ça la réalité », a-t-il déploré.
En outre, le secrétaire fédéral de l’UFDG à Matam a condamné l’arrestation du président du parti MoDeL, Aliou Bah, et exigé sa libération. « Le cas d’Aliou Bah, c’est la suite logique de ce que nous avons dit. C’est que personne n’est à l’abri aujourd’hui en Guinée. Vous avez récemment suivi la sortie du ministre de la Justice qui estime qu’il y a des gens mal intentionnés qui s’habillent en tenue militaire et qui ont des armes de guerre, qui sèment ces cas d’enlèvement et de kidnapping. Je répète ce que le ministre a dit. Vous voyez combien de fois l’irresponsabilité du premier département de la justice, qui est censé assurer la justice pour tous, la sécurité et la liberté pour tous nos citoyens ? Donc, si c’est ce département qui sort dire que désormais, il y a des personnes mal intentionnées qui sont armées, qui ont des équipements militaires, je crois que c’est trop scandaleux que de reconnaître au moins la responsabilité de l’État. Parce que quoi qu’il en soit en Guinée, il n’y a pas de boutique d’achat de tenues militaires, il n’y a pas de boutique officielle d’achat d’armes. C’est seul l’État qui commande ces équipements. Et c’est l’État qui gère ces équipements. Donc, moi je pense que le cas d’Aliou Bah, nous interpellons l’opinion, aujourd’hui c’est Aliou Bah, demain ça va être quelqu’un d’autre. Monsieur Aliou Bah est un leader politique, il n’a pas reçu une injonction d’interdiction de sortie du territoire, il n’est pas poursuivi par la justice. Je me demande où nous allons. Aliou Bah est un leader responsable, les assemblées générales qu’il a animées à son siège ne sont teintées d’aucune offense vis-à-vis des autorités de la transition, ni du chef de l’État. Il n’a fait que dire la vérité. Mais aujourd’hui, comme on veut noyer le poisson dans le l’eau, il faut trouver d’autres astuces. Nous allons partir comme ça, la chaîne va vraiment s’allonger. C’est une façon d’effrayer la population, de faire taire tout le monde : les journalistes, les acteurs de la société civile et les politiques. A ce rythme, la Guinée risque de devenir un royaume où aucune liberté ne pourrait être exercée. C’est le bon moment pour respecter les consignes, y compris la libération immédiate et sans condition du président de MoDeL, Aliou Bah », a lancé Youssouf Camara.
Mariama Barry pour Guineematin.com