L’exploitation minière dans la préfecture de Télimélé n’est pas sans conséquences. Les sociétés minières présentes sur les lieux sont accusées de ne pas respecter le contenu du code minier, qui consiste à créer des conditions pour minimiser les impacts sur les communautés directement affectées. Dans la journée de ce dimanche, 29 décembre 2024, de nombreux citoyens ont manifesté sur la route minière reliant Dapilon (Boké) à Télimélé. Ils dénoncent le manque d’eau, la destruction des cultures, l’absence d’écoles et de centres de santé, ainsi que le non-respect des compensations communautaires. Interrogés par des reporters de Guineematin.com, ils ont interpellé les autorités sur leur situation, devenue invivable.
Depuis 2016, les habitants de Télimélé font face à une situation de plus en plus insupportable, marquée par des promesses non tenues et des conditions de vie qui se détériorent chaque jour. L’exploitation minière de la bauxite par CDM Chine, Henan-Chine, WAP-Winning, SMB, et Achapoura a pourtant entraîné des conséquences dramatiques pour les communautés locales.
Ousmane Bah, citoyen de la sous-préfecture de Kawessi, raconte les difficultés qui ont conduit au blocage de la route.
« Le motif du blocage de la route, c’est parce que depuis 2016, la société est venue se présenter à nous en nous disant qu’elle était venue travailler sur nos terres, et que le gouvernement lui avait accordé l’autorisation et qu’il allait revenir recenser nos lieux. Nous avons dit OK. Du coup, nous leur avons demandé quels points ils voulaient mettre en place. Ils nous ont proposé 1 hectare pour 1 million 500. Ils sont venus par mine, ont recensé plus de 600 hectares. Pour nous, comme ils ont fait cela, il y aurait un avantage. Ils ont commencé à faire le déboisement et la poussière venait se poser sur nos jardins. De 2016 jusqu’en 2024, il y a eu beaucoup de difficultés. Nous ne ridiculisons pas ce qu’ils ont fait pour nous, mais ils ne respectent pas les droits des communautés. Ceux qui sont dans les ressources humaines ne prennent pas les gens de la communauté, mais plutôt leurs proches et leurs familles. Et si nous nous revendiquons, ils viennent dire que, dans chaque village, ils vont prendre 5 personnes en faisant un sondage, et dans ce cas, ces personnes ne travaillent que 12 jours et sont payées à 50 000 FG par jour. Ils sortent, d’autres rentrent. Donc, c’est comme ça qu’ils nous ont trompés », a expliqué Ousmane Bah.
L’intervention des autorités n’ayant pas régler le problème, les protestataires disent être engagés à continuer la lutte. « Le préfet a tenté de faire des négociations et nous a envoyé au bureau des Chinois. Là-bas, il nous a dit d’écrire nos 7 points de revendication et de lui donner, qu’il allait gérer. Depuis, nous n’avons rien vu. Après, nous avons demandé à gérer la relation communautaire nous-mêmes, car si c’est nous, nous pourrons gérer. Ce que nous demandons, nous, la communauté, c’est d’avoir un pourcentage sur chaque tonne extraite pour la communauté. Et les camions qui transportent la bauxite, ils n’ont pas de syndicat, nous voulons cela aussi, parce qu’ils ne roulent pas doucement. Nous avons enregistré 200 personnes tuées sur la route. S’ils respectaient le code minier, nous n’aurions pas à parler, car ils devraient aussi ouvrir une école professionnelle pour la formation des jeunes de la localité. Donc, si cela n’est pas fait, nous ne laisserons pas la route », a-t-il martelé.
Pour sa part, Mohamed Wéliya Diallo, agriculteur à Kélinko 2, explique que les conditions de vie des communautés sont devenues de plus en plus alarmantes.
« Avant, la pluie venait partout, mais rien ne se gâtait. Si la saison sèche arrivait, nos arbres ne séchaient pas. Aujourd’hui, tout ce que nous plantons, que ce soit des colas, des bananes, des avocats, des oranges, des mangues… tout cela a séché, tout est fini. Actuellement aussi, nos forages, la plupart d’entre nous, c’est l’eau de la bauxite que nous buvons. Les pompes sont bloquées depuis plus de 5 mois maintenant, et l’eau qui y est n’est pas douce. Dans d’autres lieux où l’eau est douce, la pompe se gâte et ils ne la réparent pas. Cela nous fatigue beaucoup. Nos arbres qui n’ont pas été recensés, c’est gâché, nous ne les utilisons pas, nous n’avons pas de vie. Nous n’avons pas eu de réparation. Que l’État vienne en aide », a lancé cet agriculteur.
Pour sa part, Fatoumata Binta Camara, représentante des femmes à Kawessi, dénonce les conditions de travail au sein des sociétés minières et appelle à l’aide de l’État, en particulier au Général Mamadi Doumbouya.
« Les hommes, avec leur souffrance, les femmes en souffrent aussi. On n’a ni eau ni électricité, nos enfants n’étudient pas, il n’y a pas d’écoles, ni de centres de santé ni d’eau. Leur douche, ils ont mis les raccords sur le fleuve où on puise de l’eau. Nos maris travaillent jusqu’à la fin du mois et ne sont payés qu’à 1 million 100 mille et 1 million 200 mille GNF ; d’autres c’est à 800 000 FG. Le riz coûte presque 600 000 FG. Il se trouve qu’il y a 10 ou 11 enfants qui doivent manger. Donc, nous souffrons aussi parce que si tu peux aider ton mari, c’est lorsque tu gagnes. Nous demandons au Général Mamadi Doumbouya de nous aider. Ils (les miniers) ont gâché nos terres, on n’a pas d’espace pour travailler. Maintenant, on paye pour avoir de quoi manger », a-t-elle lancé.
Ismael Diallo et Lamine Kaba pour Guineematin.com
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