Conakry : Sékou Léno et plusieurs autres jugés pour détention, consommation et vente de chanvre indien

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Poursuivie pour détention, consommation et vente de substances psychotropes (chanvre indien), une dizaine de personnes, dont deux femmes, ont comparu devant le tribunal correctionnel de Dixinn, lundi 06 janvier 2025. Appelés à la barre pour donner leurs versions, ces prévenus ont tous nié les faits qui leurs sont reprochés. Ils ont dénoncé les tortures qui leur auraient été infligés par les forces de l’ordre pendant les interpellations et leur audition par les officiers de police judiciaire, a constaté sur place Guineematin.com à travers un de ses reporters.

Marié et père de 3 enfants, Sékou Léno est l’un des prévenus dans cette affaire. Il raconte. « Un jour, je quittais mon lieu de travail quand on m’a interpellé et fait monter dans la pick-up. A l’intérieur, j’ai trouvé qu’il y avait déjà d’autres personnes. On nous a conduit au commissariat. Une fois là-bas, ils nous ont fouillés, mais ils n’ont rien trouvé sur moi. Vu qu’ils n’ont rien trouvé sur moi, j’ai cru qu’ils allaient me relâcher. Mais, ils n’ont relâché personne. »

Âgée de 33 ans, Aïssatou Camara est née à Conakry. Célibataire et mère d’un enfant, elle est également poursuivie dans ce dossier. « Les agents m’ont trouvé dans notre cour, et quand ils sont entrés, ils se sont directement introduits dans la maison. Après, ils ont demandé si c’est chez moi. J’ai dit oui. Ils sont entrés dans ma chambre et le père de mon enfant était couché à l’intérieur. Ils se sont mis à fouiller ma chambre. Quand ils ont fini, ils m’ont prise et embarquée. Mais ils n’ont rien trouvé chez moi », a-t-elle déclaré.

Né à Boffa, David Onivogui, âgé de 35 ans, a également plaidé non coupable. « Comme c’était la fête, j’étais sorti pour blaguer un peu avec ma copine. C’est dans ces circonstances qu’on m’a interpellées. L’endroit où on m’a attrapé, c’est là où j’avais l’habitude d’aller pour boire, parce que je reconnais quand même que je bois de l’alcool, mais je ne consomme pas de la drogue », a confié ce prévenu.

Né en 1984 à Tougué, Saikou Oumar Baldé est un célibataire sans enfant. Comme les autres prévenus, il a nié les faits qui lui sont reprochés. « Ma mère a fait un accident de moto, elle a le pied fracturé, c’est moi qui reste auprès d’elle pour l’aider.  J’avais fini de faire les corvées de ma mère et j’étais entré me coucher pour me reposer. C’est à ce moment qu’ils sont venus s’introduire dans notre cour et m’ont intimé, avec des armes, d’ouvrir la porte. Quand j’ai ouvert la porte, ils m’ont pris, malmené et embarqué dans leur pick-up. Moi, je ne fume pas et ne vends pas de la drogue. »

Constatant que sa déclaration à la barre est opposée à celle qu’il avait donnée lors de son audition, le tribunal a cherché à savoir si oui ou non c’est lui qui y a apposé de signature. « C’est vrai que j’ai signé ce papier, mais ce sont eux qui ont écrit. Je ne sais pas ce qu’ils ont écrit, car je ne sais ni lire ni écrire. Aussi, je ne pouvais pas refuser parce qu’ils m’ont malmené », a fait savoir Saïkou Oumar Baldé.

Même son de cloche pour Ousmane Kanté, âgé de 39 ans, célibataire sans enfant. « Je travaille pour une société qui offre des services de sécurité. Je partais pour mon lieu de travail vers la soirée quand j’ai croisé des gendarmes. Ils m’ont dit de monter dans le véhicule, j’ai dit non que je n’allais pas monter parce que je n’ai rien fait. Je leur ai dit que je me rendais à mon lieu de travail. Quand j’ai refusé de monter, l’un d’entre eux m’a giflé. C’est comme ça qu’ils m’ont interpellé. Quand je suis monté dans le pick-up, j’y ai trouvé beaucoup d’autres personnes, il y avait même un autre agent de sécurité dans le lot. Mais, lui et beaucoup d’autres ont été relâchés après avoir payé de l’argent. Quelques-uns ont payé 500 mille francs guinéens, d’autres plus. Mais moi, puisque je ne me reprochais de rien, je n’ai pas payé », a-t-il dénoncé.

Comptable de profession, Oumar Bah est lui aussi prévenu dans cette affaire. « Lorsqu’on m’a interpellé, j’étais assis dans un bar qui se trouve derrière le marigot, en train de boire une boisson alcoolisée. Quand ils sont venus me trouver, ils m’ont demandé ce que j’avais dans mon sac, j’ai répondu que c’était de la nourriture. Ils m’ont dit d’ouvrir mon sac, je l’ai fait ; et ils ont effectivement trouvé que je disais la vérité. Ils m’ont demandé, il y avait quoi d’autre, j’ai répondu qu’il n’y avait qu’une somme de 30 mille francs guinéens. L’un d’entre eux a introduit sa main dans mon sac pour fouiller. Après avoir fini, ils ont dit que c’est vrai que je n’ai rien, mais que comme ils ont pris tout le monde, il faudrait qu’ils m’embarquent moi aussi. J’ai dit d’accord, allons y. Ils n’ont absolument rien trouvé sur moi. »

Même s’ils ont tous nié les accusations mises à leur charge, le ministère public a trouvé intrigant le fait qu’ils ont tous été interpellés aux alentours du marigot.

Lors des débats, les prévenus ont dénoncé avoir été torturés par les gendarmes. Indigné face aux comportements des gendarmes pendant les interpellations, le conseil des prévenus a affirmé que si ses clients ont signé des aveux lors des auditions préliminaires, c’est parce qu’il y a eu torture. Il a demandé au tribunal d’accorder à ses clients la liberté provisoire.

Une demande à laquelle le ministère public s’est farouchement opposée, arguant qu’il s’agit de faits graves.

Après avoir écouté les deux parties, le tribunal, présidé par le juge Aboubacar Thiam, a renvoyé l’affaire au jeudi 9 janvier 2025 pour la suite des débats, les réquisitions et les plaidoiries.

Mariama Barry pour Guineematin.com 

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