« Depuis deux ans tout le monde est en sursis en Guinée. Il faut retenir qu’il y a plein d’Aliou Bah. On ne peut pas faire taire tout le monde. Il y aura des gens qui vont continuer à s’exprimer. La seule chose qu’on peut leur dire, c’est de continuer à préparer les cellules, il va y avoir toujours des Guinéens qui vont continuer à s’exprimer en toute indépendance… »
Abdoulaye Kourouma, ancien député et président du RRD (Rassemblement pour la Renaissance et le Développement), a vivement réagi à la condamnation du président du Mouvement Démocratique Libéral (Model), Aliou Bah. Dans une interview accordée à Guineematin.com ce mercredi, 8 janvier 2025, il a exprimé son inquiétude face à ce qu’il considère comme une dérive judiciaire qui risque de compromettre la transition actuelle en Guinée.
« Ce que je retiens, depuis deux ans, tout le monde est en sursis en Guinée. Il faut retenir qu’il y a plein d’Aliou Bah. On ne peut pas faire taire tout le monde. Il y aura des gens qui vont continuer à s’exprimer. La seule chose qu’on peut leur dire, c’est de continuer à préparer les cellules, il va y avoir toujours des Guinéens qui vont continuer à s’exprimer en toute indépendance. Malheureusement, ça me rappelle un peu la fin du régime Alpha Condé dont les jugements et les condamnations étaient arbitraires. Mais, on n’est pas ce qu’on pense être, on est ce que les gens pensent de nous », a déclaré Abdoulaye Kourouma.
Le président du RRD estime que les frustrations au sein de la population risquent de s’intensifier si la justice devient un outil de répression politique.
« Notre justice est en train de nous donner des images aujourd’hui qui vont encore nous repositionner ou nous rétrograder en matière de défense des Droits de l’homme et la liberté d’expression. Ce qui est dommage pour le pays. Notre appréciation à l’interne importe peu, mais ce que le monde extérieur va dire de notre justice, de notre liberté, de notre démocratie, c’est ça la vraie note de notre pays », a-t-il souligné.
Pour l’ancien député, ce genre de pratiques avait contribué à l’effondrement du régime précédent. Et, persister dans cette voie pourrait fragiliser davantage la transition en cours.
« Vous savez, c’est l’entourage et la justice qui ont conduit Alpha dans les erreurs. Et, c’est ce qui est en train de se passer. C’est la justice qui avait conduit Alpha dans les erreurs. C’est la justice qui était à la solide de l’exécutif, qui était à la solde des décideurs à un moment donné. Et c’était l’entourage qui ne voulait pas quitter dans les privilèges du pouvoir. Il ne le faisait pas pour Alpha, il le faisait pour eux-mêmes. L’histoire est têtue. Chacun de nous est ambassadeur de sa famille, mais chacun de nous contribue à l’éducation de la nouvelle génération. Chacun de nous contribue à la protection de l’avenir de sa progéniture par rapport aux actes qu’il pose. Si tu as été un bon juge, les gens diront un jour à ton fils que ton papa était un très bon juge. Si tu as été un juge qui a conduit le pays dans le chaos, les gens diront un jour à ton enfant que ton papa a posé des actes qui ont conduit le pays dans le chaos. Donc, chacun n’a qu’à être en harmonie avec sa conscience et que tout finit par finir », a-t-il averti.
Alors que la transition suscite de plus en plus d’interrogations, les appels à une gestion plus inclusive et à une justice indépendante se multiplient. Reste à savoir si le CNRD saura entendre ces revendications ou si la Guinée s’enfoncera davantage dans une crise politique et sociale.