Cinq individus exerçant des activités de reprographie à proximité du tribunal de Mafanco ont été jugés mardi, 7 janvier 2025, devant cette même juridiction. Ces prévenus, tous prestataires dans les domaines de la photocopie, impression, scannage, sont poursuivis pour “faux en écriture publique” portant sur la falsification de documents publics, notamment des actes devant être établis par le greffe d’une juridiction. Mais, à la barre, les cinq prévenus ont réfuté les accusations portées contre eux. Ils ont affirmé avoir commis une simple erreur en gardant ces documents dans leurs machines, a constaté Guineematin.com à travers un de ses reporters.
Les faits remontent à décembre 2024, lorsque des enquêteurs de la police ont perquisitionné les machines de ces prestataires à Mafanco. Les investigations ont révélé que ces derniers, qui opéraient à proximité du tribunal de Mafanco, avaient pris pour habitude la falsification des documents officiels tels que des casiers judiciaires, des actes de naissance, des jugements supplétifs et des jugements d’hérédité, certificat médical, visa d’entrée de la police de l’air et des frontières… Ces documents étaient falsifiés ou vierges, parfois non signés et non cachetés.
Au cours du procès, les cinq prévenus ont fermement clamé leur innocence. Ils ont affirmé n’avoir commis aucune malversation, arguant que la garde de ces documents était le fruit d’un simple oubli. Selon leurs déclarations, ils auraient conservé ces documents par inadvertance, ne comprenant pas l’ampleur des actes qu’ils étaient en train de garder par devers eux.
« On fait le scannage, impression, photocopie… On reçoit des clients qui viennent scanner leurs documents. En principe, on supprime les éléments une semaine après le service, voire un mois. Mais, c’est l’oubli. On oubliait de supprimer les éléments au fur et à mesure dans l’ordinateur », s’est défendu Mamadou Hady Bah, stagiaire depuis 6 mois dans ce centre de prestations.
Relancé par le juge audiencier par rapport au certificat de visite et de contre visite vierge retrouvé dans son ordinateur, Mamadou Hady Bah reste droit dans ses bottes.
« C’est quelqu’un qui a envoyé ça pour impression et la copie est restée avec nous. »
« Pensez-vous que ce service n’a pas d’imprimante là-bas pour faire ce travail ? » réplique le juge.
Le prévenu s’abstient de répondre et se mure dans un silence.
À la question du parquet de savoir pourquoi il n’y a que des actes administratifs et judiciaires qui ont été retrouvés dans sa machine, le prévenu répond : « Ce n’est pas nous. C’est des gens qui nous envoient ces actes pour l’impression ou scannage. »
Pour sa part, Kassim Camara, étudiant en informatique, abonde dans la même logique que son prédécesseur.
« Mon travail consistait à faire l’impression, le scannage, et la photocopie là-bas. Depuis le décès de mon papa en 2022, c’est là-bas que je travaille. C’est les gens qui nous envoient ces documents pour imprimer et/ou scanner », a-t-il déclaré.
Mais confronté à un jugement supplétif signé par le juge Nouhan le 5 mai 2024, alors que ce dernier a été muté à Télimélé depuis le 12 janvier 2024, Kassim Camara a répondu par : “aucune idée”.
Selon le juge Mohamed Sangaré, le juge Nouhan ne pourra en aucun cas délivrer un tel acte 5 mois après son départ au tribunal de Mafanco.
Mamadou Saliou Keita, élève informaticien, est lui aussi accusé de modification du jugement héréditaire et du certificat de visite et de contre visite. Comme ses prédécesseurs, il a aussi pointé du doigt “des clients” qui auraient envoyé ces documents pour l’impression.
À l’image de ces prévenus, deux autres ont réitéré les mêmes déclarations devant le tribunal correctionnel.
Dans ses réquisitions, le ministère public a indiqué que la République de Guinée et ses institutions ont été foulées au sol par cet acte. Il a également qualifié leurs agissements de “ahurissant”. Il estime surtout que ces agissements n’ont d’objectif que d’altérer la vérité. Le parquetier audiencier a demandé au tribunal de retenir les prévenus Kassim Camara, Thierno Mamadou Tounkara, Fodé Condé, Mamadou Saliou Keita et Mamadou Hady Bah dans les liens de la prévention. Pour la répression, de les condamner à 6 mois d’emprisonnement dont 3 mois assortis de sursis et au paiement d’une amende d’un million de francs guinéens, chacun.
À l’entame de ses plaidoiries, l’avocat de la défense a tout d’abord tenu à rappeler qu’il existe des services en Guinée qui sont capables de délivrer des actes non remplis à des citoyens en ignorant les conséquences. L’avocat a ensuite reconnu le tort de ses clients, avant de demander au tribunal de leur accorder de larges circonstances atténuantes.
Finalement, le tribunal a mis l’affaire en délibéré pour décision être rendue ce 9 janvier 2025.
Malick DIAKITE et Houssainatou Sow pour Guineematin.com
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