Affaire Kassory Fofana à la CRIEF : les débats clos, le dossier renvoyé pour les plaidoiries et réquisitions

Ibrahima Kassory Fofana, ex Premier ministre guinéen

La chambre de jugement de la Cour de répression des infractions économiques et financières (CRIEF) a pris une décision clé dans l’affaire Ibrahima Kassory Fofana. A l’audience de ce mercredi, 15 janvier 2025, elle a ordonné la clôture du débat avant de renvoyer le dossier au 20 janvier pour la tenue des réquisitions et plaidoiries, arguant un refus de comparaître de l’ancien Premier ministre. Un renvoi qui n’a pas été du goût des avocats de la défense, qui l’ont fait savoir ouvertement, rapporte un journaliste que Guineematin.com avait dépêché à la CRIEF.

Cour de répression des infractions et financières

« La Cour constate le refus du prévenu Ibrahima Kassory Fofana de comparaître aux audiences le concernant, suivant procès-verbal de constat de refus de se présenter à l’audience de la CRIEF en date du 15 janvier 2025, dressé par Maître Mamoussa Condé, huissier de justice près les juridictions de Conakry. La Cour constate également l’ordonnance n°011 en date du 6 janvier 2025 de la Chambre de jugement relatif au transfert du prévenu Ibrahima Kassory Fofana dans un centre spécialisé pour une meilleure prise en charge. En conséquence, rejette la requête en date du 15 janvier 2025, composée par Maître Sidiki Bérété, avocat à la Cour, en faveur du prévenu Ibrahima Kassory Fofana. La Cour ordonne la clôture du débat dans la présente cause et renvoi au lundi 20 janvier 2025 pour les plaidoiries et réquisitions », a déclaré la Cour, représentée par M. Lansana Soumah.

Cette décision fait suite à des échanges concernant une demande de transfert de Kassory Fofana dans un centre médical spécialisé, plus précisément à l’hôpital américain de Paris. Les avocats de la défense avaient introduit cette requête, invoquant la nécessité d’une meilleure prise en charge médicale.

L’affaire, initialement prévue pour permettre la comparution du prévenu et l’ouverture des débats de fond, a été marquée par l’absence de Kassory Fofana, une fois de plus. Le juge Lansana Soumah a ouvert l’audience en constatant cette absence avant de donner la parole au ministère public.

Le procureur spécial, Ali Touré, a expliqué que Kassory Fofana, comme lors des audiences précédentes, avait affirmé aux gardes pénitentiaires qui étaient allés le chercher qu’il est toujours malade et incapable de se tenir debout pour comparaître devant la Cour. Le ministère public a demandé à la Cour de rejeter la requête de la défense, estimant qu’elle constituait un abus.

Ali Touré, procureur spécial près la CRIEF

Selon le procureur spécial près la CRIEF, Ali Touré : « la défense abuse de la tolérance de la Cour en déposant des requêtes alors que leur client refuse de comparaître. Selon l’article 485 du Code de procédure pénale guinéen, seuls les prévenus présents devant la Cour peuvent se faire assister par un défenseur et bénéficier des droits de la défense. La loi ne permet pas à un avocat de saisir la Cour au nom d’un prévenu absent. La requête déposée est considérée comme invalide, car elle concerne une personne qui n’a jamais comparu. Rejetez purement et simplement la requête. Qu’il vous plaise d’ordonner la suite de la procédure principale. Le ministère public conclut en demandant à la Cour l’application stricte de la loi ».

Me Sidiki Béreté, avocat

En réaction à la décision de la Cour, Maître Sidiki Bérété, l’un des avocats de la défense, a exprimé son indignation. « Aujourd’hui, l’heure est sombre encore pour le droit. C’est la Cour qui a ordonné l’évacuation sanitaire de Dr Ibrahima Kassory Fofana. La Cour a constaté l’arrêt-là et la Cour refuse d’exécuter, et le procureur refuse d’exécuter cette mesure. Et on déclare les débats clos. On appelle ça, mission accomplie. La mission de la CRIEF, c’est de servir la transition. Il est difficile de soutenir Monsieur Ibrahima Kassory Fofana couché dans son lit de malade qui ne peut pas se tenir debout. Quand on lui refuse un soin, quand on lui refuse les droits élémentaires et humanitaires, et qu’on ordonne la clôture des débats sans débat, on ordonne les réquisitions, les plaidoiries, c’est sombre pour la justice. L’espoir est perdu devant la justice. Le peuple de Guinée ne croit maintenant qu’à son propre destin, qu’à la divinité. Mais on ne peut plus croire en la justice. Il est grave d’ordonner à un prévenu qui est sous son lit de malade, qui ne peut pas se tenir debout, sans qu’il ne soit à même de se défendre. On clôture le débat, il n’y a pas eu ouverture du débat. Et ça veut dire que le sale boulot, ordonné toujours dans la mission de la CRIEF, c’est condamner ces hommes politiques, leur faire taire et les faire disqualifier. Tout continue à être dessiné dans le mauvais sens. Vous avez refusé même la décision d’évacuation qui a été obtenue. On nous a refusé la parole. Ça veut dire qu’ils viendront le condamner par défaut. Quand on sait que la justice n’est plus impartiale, et comment dirais-je équitable, que ce n’est plus une justice au service du peuple de Guinée, c’est une justice au service de la transition. Je crois que l’heure est sombre pour le peuple de Guinée. En tout cas, Kassory est victime de harcèlement, de détention arbitraire et de coups de force au-delà du coup d’État. Ses comptes sont gelés. Il n’a plus de vie privée. Et alors là, il est condamné à mourir. Étant malade, on lui refuse le soin. Le 20 janvier 2025, on viendra pour les écouter. Nous, on va observer. Mais s’il y a une décision, on va faire des recours. On ne va pas essayer de croiser les bras. Mais c’est grave quand même. Sans débat, on lui refuse le soin et on va essayer de le juger par défaut. De toute façon, la force reste à la loi. La bataille continue conformément à la loi », a martelé maître Bérété, très amer.

Mamadou Laafa Sow pour Guineematin.com

Tél. : 622919225

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