Côte d’Ivoire : à la rencontre d’Assiatou Sow, née à Aboisso, qui se bat pour maîtriser le Poular

Quand on naît et qu’on grandit loin des milieux favorables à sa langue maternelle, il devient très difficile voire impossible d’en avoir la maîtrise. Il y en a cependant qui parviennent à relever le défi, bénéficiant de l’apport des membres de la famille ou de la communauté d’origine. C’est le cas de mademoiselle Assiatou Sow, née à Aboisso, une ville située au sud de la Côte d’Ivoire sur la nationale Abidjan-Lagos, à la frontière avec le Ghana. Dans un entretien accordé à l’envoyé spécial de Guineematin.com sur place, elle a raconté la stratégie qui lui a permis de parler le Poular.

La situation linguistique de la Côte d’Ivoire est telle que le français, la langue étrangère, l’emporte dans les dialogues sur les différents dialectes. Ce qui, souvent, entraîne un oubli progressif de sa propre langue.

Pour échapper à cette « aliénation », Assiatou Sow, grâce à sa maman qui, une fois à la maison, l’oblige à s’exprimer en Poular, fait en sorte que sa langue maternelle soit son premier moyen de communication. « Bon, pour la langue, c’est ma maman qui me l’a apprise. Mon papa, lui, il ne l’exige pas trop, bien qu’il la maîtrise. Alors qu’avec ma maman, c’est une obligation. Dès que j’emploie le français en m’adressant à elle, elle me rappelle que je dois tout dire en langue Poular. Que ce soit à la maison ou au dehors, à sa présence, c’est le Poular que j’utilise pour communiquer », explique Assiatou Sow, originaire de Labé.

Aujourd’hui, sa performance dans sa propre langue, Assiatou Sow la doit à sa maman qui continue d’accentuer les efforts pour bien éduquer ses enfants. La jeune fille constate déjà l’importance de maîtriser sa langue maternelle. « Oui, j’y vois déjà de l’intérêt. Parce que la seule fois que je suis partie en Guinée, alors que j’étais petite, je ne comprenais rien du tout dans cette langue. Et l’entourage se moquait de moi en me traitant de perdue. Donc, si tu peux même un peu, tu vas t’améliorer après. Et aujourd’hui, je pense que ça ne sera plus le même jugement », renchérit-elle.

Depuis plus de 15 ans, Assiatou Sow n’est pas partie chez elle, en Guinée. Mais, pour renforcer son vocabulaire, elle opte pour une autre stratégie. Dans cette localité où les Guinéens sont en grand nombre, elle tisse des amitiés avec un nombre important de locuteurs de la langue Poular. « Ici à Aboisso, j’ai beaucoup d’amies Guinéennes qui parlent la même langue que moi. Certes, je ne comprends pas tout ce qu’ils disent, mais je capte beaucoup de choses », affirme-t-elle, fièrement.

A l’ère de la mondialisation, le risque de perdre sa langue et ses racines est énorme. Comme Assiatou Sow, en Côte d’Ivoire, nombreux sont des Guinéens, nés et grandis dans ce pays, victimes de ce phénomène devenu mondial et récurrent.

De retour d’Aboisso, Mamadou Malal Baldé pour Guineematin.com

Tel : +225 0142 24 28 28

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