Lisso (Boffa) : le chef du poste de santé de Missira alerte sur le manque de matériels et de personnel

Le district de Missira, relevant de la sous-préfecture de Lisso, dans la préfecture de Boffa, fait face à des défis majeurs en matière d’accès à une santé de qualité. Face aux difficultés du moment, les habitants de cette localité, située à 135 kilomètres de Boffa-centre, ne savent plus à quel saint se vouer. Dans un entretien accordé à un reporter de Guineematin.com à Conakry, le chef du poste de santé de Missira a partagé les difficultés quotidiennes auxquelles il est confronté pour garantir des soins de qualité à cette population. Mohamed Yarie Soumah a notamment évoqué le manque de personnel et de matériels adéquats pour la prise en charge des patients.

Mohamed Yarie Soumah, infirmier

« C’est un poste de santé qui a été construit par la communauté depuis 1990. Actuellement, il est dans un état délabré. Quand je venais en 2020, ce sont les animaux qui habitaient dans le bâtiment. Mais, comme je suis un agent de santé, je suis fait pour sauver des vies, je suis venu à un moment où la communauté était en difficulté pour avoir un agent de santé », dit d’entrée Mohamed Yarie Soumah.

Poursuivant, il a expliqué certaines difficultés. « En tant que chef du poste de santé, les difficultés que nous rencontrons là-bas sont de divers ordres. Vu la distance, quand une femme entre en travail, on est obligé de la transporter dans un hamac pour le poste de santé. Et s’il se trouve que moi je ne peux pas gérer le cas, elle est automatiquement référée à Fria ou à Boffa dans des conditions difficiles, compte-tenu de l’état de nos routes. Ou quand vous faites appel à l’ambulancier, il arrive tardivement. En tant que chef de poste, je suis le seul personnel. Je suis agent CPN (consultation Prénatale), agent CPC (consultation primaire curative), agent PEV (programme élargi de vaccination). Bref, tout ce qui vient là-bas se résume à ma personne. Même pas un seul stagiaire depuis 2020. Au-delà, il y a beaucoup de pathologie que je détecte là-bas à savoir : les cas de paludisme, cas de bronchite… Les cas qu’on ne peut pas gérer, comme le paludisme grave caractérisé par l’anémie, on réfère ça à Boffa », a-t-il fait savoir.

Par ailleurs, le chef du poste de santé de Missira a attiré l’attention sur la vétusté du poste en question, qui peine à répondre aux besoins médicaux d’une population estimée à 1 000 habitants, en raison du manque de matériels adéquats nécessaires pour la meilleure prise en charge des patients. « Le poste n’a pas de matériels. Quand je venais, il n’y avait même pas de portes. À mon arrivée, j’ai fait des portes, on a confectionné les portes et certains lits. Après, j’ai acheté quelques matériels à mes frais, comme la boîte d’accouchement, le tensiomètre et le stéthoscope. En novembre 2024, il y a une ONG qui nous a dotés de certains matériels de réanimation comme le pingouin et le ballon de masque. Ces matériels-là nous aident à réanimer certains nouveau-nés en souffrance lors de l’accouchement. On rencontre des cas de complication. Parce que normalement, une femme enceinte, lors de sa première consultation prénatale, on doit faire beaucoup d’examens. Mais, avec l’état dans lequel nous travaillons, on ne peut pas faire ces examens faute d’équipements. Quand une femme enceinte est reçue, c’est de l’examiner pour voir la hauteur utérine. En même temps, prendre sa tension et prescrire si possible les médicaments pour le traitement de l’infection en même temps voir le suivi. Compte tenu de la distance, une femme peut rentrer en travail et faire 2 jours sans se présenter au poste. Donc, parfois, vous recevez une malade qui est dans un état critique. Comme ça, on l’aide juste pour les premiers soins avant de le référer à Boffa. Il y a même certaines d’entre elles qui rendent l’âme en cours de route ou c’est le nouveau-né qui a des complications à l’accouchement », a fait savoir Mohamed Yarie Soumah.

Malgré ces conditions de travail difficiles, Mohamed Yarie Soumah, diplômé de l’école nationale de santé de Kindia, réussit des interventions extraordinaires. C’est le cas de la conduite avec succès de la naissance de quadruplés, le vendredi 24 janvier dernier, dans son service. « Le vendredi 24 janvier 2025, j’ai dirigé un accouchement de quadruplés d’une dame âgée de 26 ans. Quand elle est entrée en travail à 22 heures, ses parents ont voulu l’envoyer à Fria ou Boffa. Mais, compte tenu de la distance, la femme a été conduite dans mon poste à 2 heures. Malgré nos maigres moyens, j’ai réussi à diriger l’accouchement sans problème. Les deux premiers bébés, c’étaient des présentations céphaliques et les deux autres, c’était par siège. Donc, on était obligé de réanimer les deux derniers nouveau-nés. N’eut été les matériels, comme le pingouin et le ballon de masque, les deux derniers n’allaient pas survivre. Après l’accouchement, je ne pouvais pas les garder à mon niveau. C’est ainsi que j’ai fait appel aux autorités sous-préfectorales. Du coup, on nous a fait venir une ambiance dont moi-même j’ai payé le prix du carburant à 250 mille GNF pour transporter la mère et les nouveau-nés à Boffa. C’était samedi. Le dimanche soir, on a appelé une autre ambulance qui va aller de Boffa pour Conakry à 700 mille francs guinéens. Aujourd’hui, la maman et ses nouveau-nés, toutes des filles, se trouvent au service de nutrition à l’hôpital Donka. Et tout se passe bien de ce côté », a-t-il expliqué.

En outre, Mohamed Yarie Soumah lance un cri de cœur à l’endroit des partenaires et autorités sanitaires du pays afin de voler au secours du poste de santé de Missira. « L’appel que j’ai à lancer aux partenaires et autorités de la transition, mais surtout au département de la santé, c’est de nous aider pour la construction d’un poste de santé digne de nom et bien équipé, pourvue que nous puissions mieux répondre aux besoins de santé de cette communauté de Missira. C’est un district qui est très éloigné du centre-ville de Boffa. Il n’y a pas de routes encore moins de réseau téléphonique stable. Or, le district compte 12 secteurs avec près de 1000 habitants qui se servent de ce poste de santé », a-t-il lancé, avant d’interpeller l’État sur sa prise en charge en tant que fonctionnaire ou tout au moins contractuel.

Malick DIAKITE pour Guineematin.com

Tél : 626-66-29-27

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