Conditions d’incarcération en Guinée : un activiste tire la sonnette d’alarme

Mamadou Kaly Diallo, défenseur des droits de l’homme

Il n’est un secret pour personne que les maisons d’arrêt de la Guinée sont caractérisées par le surnombre et la précarité. Les nombreuses dénonciations n’ont pas permis de renverser la tendance dans ces centres qui, au lieu de servir de lieux de rééducation, font dans la déshumanisation. Dans un entretien accordé à un reporter de Guineematin.com, Mamadou Kaly Diallo, activiste des droits de l’homme, a tiré la sonnette d’alarme.

Les conditions carcérales en Guinée inquiètent les activistes des droits de l’homme. Mamadou Kaly Diallo dénonce cet état de fait. « Depuis l’indépendance, les conditions de détention des prisonniers laissent à désirer parce qu’à mon avis, il n’y pas une culture du respect des droits de l’homme en Guinée. Pendant un bon moment, l’administration même pensait qu’on jette quelqu’un en prison pour le détruire ; or dans les conditions normales, un prisonnier n’est qu’une personne privée de sa liberté d’aller et de venir pendant un délai défini. Bien que la Guinée ait ratifié toutes les conventions sur la protection des droits de l’homme, qui prônent le respect de la dignité de la personne en tous lieux et en toutes circonstances et puis le respect de la valeur humaine, qu’elle soit détenue ou pas, cela a toujours été violé dans les lieux de détention », déplore-t-il.

Pour remédier à ce phénomène de pléthore dans les maisons carcérales, cet activiste propose quelques solutions. « Il faut, au niveau de l’Etat, construire les prisons modernes ; former, informer, sensibiliser ceux qui sont de l’administration pénitentiaire sur les conditions de détention. Il faut aussi instaurer des politiques de détention dans le respect de la dignité humaine dans certains pays, à l’image de l’Espagne aujourd’hui, où le travail du prisonnier est constitutionnel. Il faut instaurer des centres d’apprentissage à l’intérieur des centres de détention. Quand vous prenez l’Égypte aujourd’hui, on ne parle pas de prison mais de centre de rééducation et d’adaptation. Je pense qu’il faut prôner une telle politique publique qui pourrait non-seulement aller dans le sens du désengorgement des prisons, parce que nous sommes frappés par une pléthore des détenus un peu partout à travers le pays, pour des maisons d’arrêt qui datent de l’époque coloniale avec toutes les conséquences. L’exemple typique est la maison centrale de Conakry qui était préalablement destinée à 300 détenus. Aujourd’hui, on est à plus de 1 000 détenus. Et aussi, penser à des mesures de réinsertions après la détention », suggère Kali Diallo.

A la question de savoir si les activistes des droits de l’homme en Guinée font des démarches pour l’amélioration des conditions de vie des détenus, notre interlocuteur répond : « en tant que défenseur des droits de l’homme, ce que nous faisons, c’est le monitoring, c’est alerter, c’est informer, c’est proposer. C’est ce que nous sommes en train de faire. Interpeller l’Etat à respecter et à faire respecter cela. Et rappeler encore une fois qu’un prisonnier n’est privé que de la liberté d’aller et de venir. Je pense que ce sont des aspects importants. Donc, au gouvernement d’être respectueux de ces règles et pratiques. Parlant de comment améliorer les conditions, il faut s’accentuer sur les formations à tous les niveaux, des dirigeants, des dirigés. Et d’ailleurs, il y a de ces pays aujourd’hui, les maisons d’arrêt sont carrément détachées du Ministère de la justice. La justice fait son travail et les centres pénitentiaires sont sous la responsabilité du Ministère de l’administration du territoire. Tel est le cas de l’Egypte par exemple. Je pense qu’il faut aller dans ce sens-là. L’Etat de droit dans ça, c’est l’épanouissement, le bien-être social mais cela aussi doit être proportionnel aux conditions de vie des citoyens libres », a laissé entendre Mamadou Kali Diallo.

Il faut rappeler que la Guinée est l’un des rares pays qui a ratifié 8 conventions de promotion et de protection des droits de l’homme sur les 9 existantes.

Yayé Oumou Barry pour Guineematin.com

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