Endométriose : une maladie silencieuse aux conséquences dévastatrices, selon Dr Ousmane Adolfo Diakité

Dr Ousmane Adolfo Diakité, spécialiste en premier degré de Gynécologie obstétrique

L’endométriose est une maladie chronique et invalidante qui touche environ 10 % des personnes menstruées. Pourtant, elle reste souvent méconnue et sous-diagnostiquée. Le Dr Ousmane Adolfo Diakité, gynécologue-obstétricien interrogé par un reporter de Guineematin.com, apporte des précisions sur les causes et la prise en charge de cette pathologie complexe.

L’endométriose se caractérise par la présence anormale de tissu semblable à l’endomètre (la muqueuse utérine) en dehors de la cavité utérine. Ce tissu réagit aux fluctuations hormonales du cycle menstruel et provoque des inflammations et des douleurs pouvant être très invalidantes, apprend-on. Selon la localisation des lésions, les patientes peuvent souffrir de symptômes variés : douleurs pelviennes chroniques, règles extrêmement douloureuses (dysménorrhée), douleurs pendant les rapports sexuels (dyspareunie), troubles digestifs, urinaires et, dans certains cas, infertilité.

« Malheureusement, l’endométriose est souvent diagnostiquée tardivement, avec un retard moyen de sept ans. Cela signifie que pendant des années, les patientes souffrent sans explication, et la maladie a le temps de causer des dommages importants », a fait savoir le Dr Ousmane Adolfo Diakité.

L’origine exacte de l’endométriose demeure incertaine, mais plusieurs théories scientifiques tentent d’expliquer son développement, affirme le Dr Diakité Ousmane Adolfo. « Il s’agit de la théorie du reflux menstruel (John A. Sampson, 1927) : des fragments d’endomètre remonteraient dans la cavité abdomino-pelvienne via les trompes de Fallope et s’y implanteraient. La théorie embryonnaire : des cellules embryonnaires résiduelles se développeraient sous certaines influences hormonales et immunitaires. La théorie de la migration lymphatique et vasculaire : des cellules endométriales voyageraient via le sang ou la lymphe pour s’implanter ailleurs dans l’organisme. Les facteurs immunitaires et génétiques : un dysfonctionnement du système immunitaire empêcherait l’élimination des cellules anormales, favorisant ainsi leur implantation et leur prolifération. L’impact environnemental : des perturbateurs endocriniens (pesticides, bisphénol A, phtalates…) pourraient favoriser l’apparition de la maladie », fait-il savoir.

Des recherches récentes ont aussi mis en lumière un lien possible avec une infection bactérienne due à la bactérie Fusobacterium, suggérant une nouvelle piste pour comprendre les mécanismes de l’endométriose. « À ce jour, il n’existe pas de traitement curatif de l’endométriose, mais plusieurs solutions permettent d’en atténuer les symptômes. Le traitement médical : bloquer les règles. L’endométriose étant une maladie hormono-dépendante, la première approche thérapeutique consiste à supprimer les cycles menstruels grâce à une pilule en continu, un dispositif intra-utérin hormonal ou d’autres traitements hormonaux. L’objectif est de mettre la patiente en aménorrhée, c’est-à-dire d’empêcher la survenue des règles, pour éviter l’inflammation et la progression des lésions », explique le Dr Diakité.

Lorsque les traitements médicamenteux échouent, une chirurgie peut être envisagée pour retirer les lésions endométriosiques. Cependant, cette intervention est complexe et doit être réalisée par des spécialistes expérimentés. « L’idéal serait d’opérer une seule fois, car multiplier les chirurgies peut aggraver la situation », avertit le médecin.

L’endométriose ne se limite pas aux douleurs physiques ; elle affecte profondément la vie des patientes. « Cette maladie a un impact considérable sur la vie professionnelle, sociale et intime. Elle peut engendrer des absences répétées au travail, des difficultés dans le couple et un isolement psychologique ».

Selon le Dr Diakité, le soutien des proches est essentiel. Il peut se traduire par de petits gestes : apporter une bouillotte lors des crises, aider dans les tâches quotidiennes, accompagner aux consultations médicales ou simplement être à l’écoute. « Il est crucial de croire les patientes lorsqu’elles expriment leur douleur. Trop souvent, leur souffrance est minimisée, ce qui les pousse à se replier sur elles-mêmes. Or, vivre avec l’endométriose, c’est comme inviter une troisième personne invisible dans sa vie… Grâce à la sensibilisation croissante et aux avancées scientifiques, la prise en charge de l’endométriose évolue. Toutefois, il reste encore beaucoup à faire pour améliorer le diagnostic précoce et développer des traitements plus efficaces ».

Pour conclure, le Dr Ousmane Adolfo Diakité déclare que la lutte contre cette maladie passe par une meilleure information du grand public, une formation accrue des professionnels de santé et un soutien renforcé pour les patientes. « L’endométriose ne doit plus être une maladie taboue ni une souffrance silencieuse ».

Kadiatou Barry pour Guineematin.com

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