Amadou Lama Diallo, 12 ans de stage à la RTG : « Parfois, notre seul repas était des galettes et des patates »

Amadou Lama Diallo, journaliste

Dans les médias publics guinéens, de nombreux journalistes passent par des années de stage avant d’obtenir un statut officiel. Après 12 à 15 ans de « stage », plusieurs d’entre eux parviennent à intégrer la fonction publique. C’est le cas du journaliste Amadou Lama Diallo, qui a fait 12 longues années à la radio nationale (RTG), avant de voir le bout du tunnel ces derniers jours. Dans un entretien accordé à une équipe de reporters de Guineematin.com, notre confrère a partagé ses peines et ses joies.

Après douze ans d’attente, Amadou Lama Diallo voit enfin ses efforts récompensés. Son parcours témoigne de la difficulté d’insertion professionnelle dans le secteur public guinéen, mais aussi de la détermination et de la passion qui animent de nombreux jeunes journalistes.

Décryptage !

Guineematin.com : Vous êtes journaliste à la RTG depuis maintenant douze ans, vous venez d’intégrer la fonction publique. Quels sont vos sentiments après toutes ces années d’attente ?

Amadou Lama Diallo : Effectivement, cela fait douze ans, depuis 2013, que je suis à la RTG. À l’époque, nous étions soixante candidats à passer un test pour devenir stagiaires. Seuls dix d’entre nous avaient été retenus : cinq pour la télévision et cinq pour la radio. Depuis ce jour, nous avons travaillé sans relâche. Cette année, un concours spécifique a été organisé pour nous permettre d’intégrer la fonction publique, et grâce à Dieu, j’ai été retenu. C’est une immense joie et un soulagement après douze ans de service. Nous remercions le président de la République, le général Mamadi Doumbouya, qui a œuvré pour l’engagement des jeunes guinéens. Nous remercions également le ministre Fana Soumah, ainsi que les syndicalistes de la RTG, notamment Sâa Martin Fancinadounou, pour leurs efforts en faveur de notre régularisation.

Douze ans en tant que stagiaire, ce n’est pas rien. Pouvez-vous nous raconter votre quotidien durant cette période ?

Oui, ce n’était pas facile. Quand on arrive à la RTG, il faut du temps pour se faire une place. Certains passent cinq ans sans jamais entendre leur voix à la radio ou apparaître à la télévision. Moi, après trois mois seulement, j’ai eu la chance de faire mon premier reportage. Je m’en souviens encore, c’était sur la consommation du thé en Guinée. J’ai appris le journalisme sur le terrain, car j’avais fait des études en sociologie à l’université. Grâce aux encadreurs comme Amara Kamara, Aminata Sangaré, Oumar Barry, David Yombouno et Mohamed Touré, j’ai pu acquérir les bases du métier.

On imagine que vivre sans salaire pendant si longtemps a dû être un défi. Comment faisiez-vous pour subvenir à vos besoins ?

C’était extrêmement difficile. Travailler douze ans sans toucher de salaire, tout en ayant une famille à nourrir, ce n’est pas évident. Beaucoup de gens pensent qu’on gagne bien notre vie parce qu’ils nous entendent à la radio ou nous voient à la télévision, mais la réalité est tout autre. Heureusement, ma famille m’a beaucoup soutenu. Mon oncle, avec qui je vivais à Lambanyi, m’a énormément aidé. Il m’avait donné une moto, ce qui me permettait de me rendre à la RTG. Il m’a aussi soutenu financièrement, et je lui en serai toujours reconnaissant.

Vous avez été retenu au concours, mais ce n’est pas le cas de tout le monde. Un mot pour vos amis qui n’ont pas eu cette chance ?

Oui, c’est vrai, et c’est une situation difficile. Je pense à mes amis comme Fodé, Mohamed Bangoura, Malipan et bien d’autres, qui, après quinze ans pour certains, n’ont pas été retenus. Je leur demande de garder espoir, de ne pas abandonner. Nous savons à quel point le chemin est dur.

Comment faisiez-vous pour vous nourrir et gérer les dépenses du quotidien ?

(Sourire) ! Il faut être résilient. Souvent, nous achetions des galettes et des patates auprès d’une vendeuse derrière la RTG. C’était parfois notre seul repas de la journée. Aujourd’hui, je suis marié et père de famille, donc les responsabilités ont grandi. Ma femme m’a toujours soutenu malgré les difficultés. C’était une épreuve pour nous, mais elle a toujours cru en moi et en mon avenir dans ce métier.

Entretien réalisé par Lamine Kaba, Malick Diakité, Mohamed Lamine Touré et Aye Bobo Bah 

Tél:620995917

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