Dans la commune urbaine de N’zérékoré, où l’économie locale repose fortement sur le commerce informel, le dernier déguerpissement le long des bordures du marché de la ville a suscité des inquiétudes et des préoccupations parmi les marchands et les habitants. Ce déplacement forcé, orchestré par les autorités dans un souci de réaménagement urbain et de sécurité routière, ne se contente pas de bouleverser les occupations quotidiennes des vendeurs. Il soulève également des questions sur les droits des personnes à travailler et à subsister.
Dans la journée d’hier, lundi 7 avril 2025, Guineematin.com est allé à la rencontre de ces victimes de déguerpissement. Elles dénoncent cette décision et pointent du doigt le manque de place à l’intérieur du marché.
Décryptage !

Agathe Kpoghomou, vendeuse de condiments : « Nous ne sommes pas contentes d’être arrêtées ici sous le chaud soleil. Nous sommes toutes inquiètes, car nous n’avons pas de places. Et le pire, il n’y a pas de place dans le marché. Nous ne sommes pas contre cette décision, mais nous voulons qu’elles (les autorités) nous cherchent un endroit où on peut rester. Nous sommes nombreux, et dès que la population augmente, la recherche du quotidien galope aussi. Nous avons assez d’enfants et beaucoup de dépenses à faire, dès qu’on rentre dans le marché, nos amis qui ont déjà des tables nous chassent. Or, le marché c’est pour tout le monde. Et encore une fois ici, les autorités nous demandent aussi de rentrer. Comme ça, nous n’avons pas où aller. Nous sollicitons les autorités de venir nous montrer où nous devons effectuer nos marchés et nous allons occuper. Car, celui qui va désobéir à cette loi pourrait subir des conséquences graves. Nous avons assez de soucis : si on ne vient pas ici, d’autres risques de se donner pour l’argent et cela gâte le nom des femmes ».

Helene Gbamou, vendeuse : « Quand tu nous vois arrêtées comme ça, nous n’avons pas de tables à l’intérieur du marché. Nous sommes parfois gênées d’être là sous le soleil, mais on n’a pas le choix. Nous avons maintes fois demandé pour avoir une table, mais rien. Nous avons beaucoup de choses à régler : la nourriture des enfants, leur santé, leur scolarisation, leurs autres besoins. C’est ici qu’on se débrouille pour avoir un peu afin de couvrir ces besoins, mais malheureusement on n’a pas de table. Nous demandons aux autorités communales, à Mamadi Doumbouya et son gouvernement de venir au secours. Car, dès que nous rentrons dans le marché, ceux qui ont des tables nous chassent de quitter devant leurs marchandises. Et voilà que c’est le seul coin où on peut se débrouiller, car nous n’avons pas d’autres places si ce n’est qu’au bord de la route. Nous n’avons pas encore été à la mairie pour dire aux autorités, mais nous en parlons aux autres qui ont déjà des tables. Pour cela, nous demandons aux autorités de nous chercher un lieu avec des tables pour quitter la route ou de nous laisser nous débrouiller ici ».

Mamadou Aliou, boutiquier : « Moi j’apprécie cette idée des autorités. Car, parfois nous n’avons même plus de passage pour aller dans les différents lieux et cela crée souvent des accidents ici. Nous avons des camions, des véhicules, des motos et beaucoup d’autres moyens de déplacement. Même en étant à pied parfois tu ne peux pas traverser librement le marché de N’zérékoré et tu risques même de renverser des marchandises. Mais, il faut signaler une seule chose, nos autorités d’ici commencent très bien les choses et elles ne terminent point. Nous avons vu beaucoup de décisions comme ça, après deux jours, on ne voit plus rien. C’est vrai on est nombreux, mais dans l’ordre qu’on peut bien faire. Ils viennent souvent s’asseoir devant nos boutiques ici, et quand tu leur demande de se déplacer, ils t’insultent. Comme tu vois aujourd’hui, la route est libre, tu peux passer comme tu veux, seulement nous ne voulons pas qu’elles (les autorités) abandonnent après ».
De Nzérékoré, Roger Louhoule BLEMOU pour Guineematin.com