Après trois ans de travaux, le pont unique et moderne de Tanènè, remplaçant les anciens ponts métalliques sur le fleuve Konkouré, a été officiellement inauguré hier, dimanche 27 avril 2025, par les autorités. Cet ouvrage, financé par le Fonds d’Entretien Routier et construit par le groupement LEDUC–SOGEA SATOM, porte le nom du président de la Transition, Général Mamadi Doumbouya. Il est long de 126 mètres et s’accompagne de 7 km de routes d’accès et d’une station de péage et de pesage moderne. Sa mise à disposition devrait permettre de fluidifier le trafic sur la route nationale Conakry-Boké. Mais, des voix s’élèvent déjà pour dénoncer les tarifs appliqués au niveau des postes péage et de pesage.
Pour de nombreux transporteurs interrogés ce lundi par un reporter de Guineematin.com à Conakry, les tarifs appliqués au niveau de ce pont sont un fardeau de plus qui amenuise leurs recettes. Au-delà du paiement de 20.000 francs guinéens exigé au péage, les conducteurs de taxi et de minibus se plaignent de la multiplication des barrages routiers et des extorsions d’argent par les brigades mobiles déployées tout au long du trajet.

« Premièrement, nous félicitons le Général Mamadi Doumbouya et nous sommes reconnaissants envers nos responsables. Pour le problème de Tanènè, nous souhaitons qu’ils nous aident concernant les minibus : qu’ils nous assistent à hauteur de 5000 pour l’aller et 5000 pour le retour. D’autres feront l’aller-retour en une seule fois. Par exemple, 10.000 à l’aller et 10.000 au retour, c’est trop cher pour nous. Nous prions pour que les minibus paient 10.000 pour toute la journée. En plus, les brigades mobiles fatiguent beaucoup les chauffeurs. Nous demandons que le nombre de barrages soit réduit, en commençant par ceux de la Cimenterie, KM 5, 4 Ponts, Kolaya, Dondé, et Kolia. À chaque barrage, le chauffeur doit payer 10.000. Si tu ne t’arrêtes pas, ils considèrent cela comme une infraction. D’autres réclament jusqu’à 100.000 francs ou ils coupent un reçu. Même s’ils ne peuvent pas supprimer tous les barrages à cause du transport, ils peuvent au moins limiter le nombre, par exemple en installant seulement deux barrages jusqu’à Boké. Concernant les bagages volumineux, ils ont raison : si un bagage dépasse un mètre, ils peuvent verbaliser, car c’est risqué de transporter des passagers avec de telles charges. Mais pour les barrages, nous demandons leur diminution », a dit Ibrahima Diallo, de la section syndicale de Tombolia.
Abondant dans le même sens, Alpha Mamoudou Bah, chauffeur, dénonce les brigades mobiles misent sur ce tronçon. Selon lui, même en ayant des papiers en règle, les conducteurs sont contraints de payer pour éviter la saisie de leur véhicule.

« D’ici jusqu’à Kamsar, partout où tu passes, tu dois donner de l’argent. À la Cimenterie, s’ils t’arrêtent, ils te réclament 100.000 francs. De Kagbelen, tu es obligé de prendre des raccourcis. Même là, s’ils t’attrapent, ils te réclament entre 100.000 et 300.000 francs. Parmi nous, certains travaillent pour des propriétaires de véhicules, d’autres ont acheté leurs véhicules à crédit. On doit se soucier de faire une recette journalière, sans compter le carburant. Au nouveau pont ouvert, ils demandent 20.000 francs pour un petit véhicule pour traverser. C’est trop pour nous. Partout où tu passes, si tu as des bagages, ils te demandent 10.000 ou 20.000 francs. Même si tu as tous tes papiers en règle, ils ne les acceptent pas, ils exigent de l’argent sous peine d’immobiliser ton véhicule. Ce n’est pas normal. Au niveau du Grand Moulin, ils ont mis un barrage où ils coupent des reçus. Un de nos collègues qui allait à Kamsar a dû payer 1 million de francs. Nous demandons de l’aide : nous souffrons énormément. Si le péage fonctionne, au moins qu’on limite les barrages à un seul au dernier poste. Sinon, tu peux partir de Conakry et ne rien rapporter à ta famille, alors que le propriétaire du véhicule n’attend que son argent », a-t-il souligné.
Mamadou Saliou Barry, chauffeur, résident à Kamsar, partage la même frustration. Il estime que le paiement du péage devrait logiquement entraîner la suppression des barrages mobiles.

« Les difficultés que nous rencontrons sur la route de Boké sont énormes. À la Cimenterie, dès que tu arrives, que tu aies tes papiers en règle ou non, ils te réclament de l’argent. En allant vers Dubréka, c’est pareil : ils te forcent à payer 5000 ou 10.000 francs, même s’ils vérifient tes papiers sans motif valable. Au niveau du Grand Moulin, ils coupent des reçus. Pour Abdoulaye Boké (un chauffeur), ils ont coupé un reçu de 1 million de francs, et pour d’autres 500.000 pour les bagages. Ce n’est pas normal. Si le Président accepte que ça continue ainsi, nous ne serons pas d’accord. Notre seule richesse, c’est de rouler pour gagner notre vie. Nous souffrons. Le péage a été fixé à 20.000 francs pour nous. Donc, si nous payons le péage, il ne devrait plus y avoir de brigades mobiles pour nous extorquer de l’argent. À Dondé, ils fouillent nos bagages, que nous soyons en fraude ou pas, ils s’en moquent. Cela fait plus de 30 ans que je suis sur cette route et je n’ai jamais transporté de produits frauduleux. Les chauffeurs souffrent sur la route de Boké. Nous demandons au Président de revoir cette situation », a-t-il indiqué.
Ismael Diallo pour Guineematin.com
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