Amadou Diouldé Diallo : « George Weah ne doit pas donner l’impression que son élection est une sorte de revanche »

Les réactions se multiplient en Guinée après l’élection de la légende du football à la tête du Liberia. La victoire de George Weah, au delà de la surprise qu’elle a créée, pourrait même faire tache d’huile, estiment certains observateurs. Dans une interview accordée à un reporter de Guineematin.com, hier vendredi 29 décembre 2017, Amadou Diouldé Diallo, journaliste et historien soutient qu’au delà d’être sportif, George Weah « a su intégrer dans le football le social. Il ne s’est jamais éloigné de ses compatriotes ». Cependant, pour notre interlocuteur, Mister George doit « créer une certaine osmose entre les descendants d’esclaves et les natifs du Liberia ».   

Guineematin.com : que vous inspire l’élection George Weah à la tête du Liberia ? Comment en est-on arrivé là ?

Amadou Diouldé Diallo : les gens pensent qu’il suffit d’être footballeur de renommée internationale comme George Weah pour arriver là où il est arrivé. Non, ce n’est pas le football seulement. George Weah a su intégrer dans le football le social. Il ne s’est jamais éloigné de ses compatriotes. Il est un fils du ghetto, il l’a assumé et lorsque le football lui a donné les moyens de sortir du ghetto, il est encore resté attaché au ghetto en procédant au partage de ce que le football lui a donné. Je prends pour exemple, la Coupe d’Afrique des Nations de 1996 en  Afrique du Sud. Le Liberia était qualifié et c’est lui qui a payé tous les frais de l’équipe nationale. Il a même exigé que les joueurs viennent avec leurs épouses. C’est quelque chose de marquant. C’est parce qu’il a géré le social, en étant footballeur. Il n’a pas cherché à s’éloigner de son milieu naturel, il est resté, il a vécu la vie naturelle de son terroir. C’est une victoire fort-intéressante dans un pays où il y a, quoi que vous fassiez, des clivages entre les élites, descendants d’esclaves venus des Etats-Unis vers 1847 ; et les autochtones qui sont là et qui sont toujours considérés comme les natifs. Il y a une sorte de rupture. Maintenant qu’il est arrivé à ce sommet, il s’agit de pouvoir créer un  phénomène d’osmose qui permette justement d’éviter de ne pas renforcer cette fracture, d’œuvrer à sa disparition. Ce n’est pas un coup de baguette magique mais sans renier son identité du terroir. Il ne doit pas justement être également le porteur de sagaie et de glaive contre les élites pour donner l’impression que son élection est une sorte de revanche de l’histoire.

Guineematin.com : cette transition à la fois démocratique et pacifique n’est-elle pas un bon signal pour l’Afrique de l’Ouest  où la démocratie est entrain de s’enraciner lentement mais sûrement ?

Amadou Diouldé Diallo : c’est toute l’Afrique. Nous sommes dans cette sous-région, nous la vivons et nous savons aujourd’hui le flux de l’information et la libre circulation des personnes et leurs biens. Mais, il ne faut quand même pas oublier des changements notoires ailleurs, comme au Zimbabwé, au Botswana ou en Afrique du Sud. Le problème, c’est qu’il y a des mutations qui sont entrain de s’opérer. Parce que sociologiquement, une société se renouvelle tous les 25 ans. La démocratie actuelle, même si elle n’est pas parfaite, mais elle est là. Aujourd’hui, vous avez des sociétés civiles très fortes, il y a des contre-pouvoirs, il y a la liberté de la presse. Il y a une presse plurielle qui fait qu’on peut s’exprimer. Il y a un renouvellement, des mutations profondes. Ceux qui pensent que l’Afrique va être à la traîne, que l’Afrique va évoluer du fait de leur volonté de calquer la réalité d’aujourd’hui à celle d’hier, ils se trompent. Les régimes doivent tenir compte de cet aspect, si non, c’est le vent du changement qui va les emporter. C’est ce que nous vivons. Le cas de George Weah peut susciter des envies ailleurs.

Guineematin.com : vous venez d’être réélu au poste de vice-président de l’Association Internationale de la Presse Sportive (AIPS)/Afrique. Expliquez-nous comment ça s’est passé.

Amadou Diouldé Diallo : c’était un congrès électif. Je suis à l’AIPS depuis 2004 et membre du bureau exécutif de l’AIPS Afrique. L’AIPS a été créée le 04 juillet 1924 à Paris à la faveur des jeux olympiques. Son siège était à Budapest, en Hongrie. Il a été transféré à Lausanne, en Suisse. Moi j’ai été membre du comité exécutif de l’AIPS/Afrique de 2004 à 2013. En 2013, le congrès de Sotchi, en Russie, j’ai été élu vice-président. C’est ce que j’ai été mettre en jeu à Nairobi, au Kenya. Grâce à Dieu et à la bénédiction de tous les guinéens, la presse africaine m’a renouvelé sa confiance. J’ai été réélu au poste de vice-président de l’AIPS/Afrique, le 18 décembre 2017. La durée du mandat est de quatre ans et l’AIPS/Afrique a son siège à Casablanca, au Maroc.

Guineematin.com : vous avez un dernier mot monsieur Diallo ?

 Amadou Diouldé Diallo : c’est de remercier tout le monde du soutien. On n’est jamais produit de soi-même. Il a fallu que les anciens qu’on a trouvés à la maison de la radio décrochent un pied pour nous donner un petit espace pour évoluer. C’est pourquoi, dès mon retour de Nairobi, je suis allé rendre une visite de courtoisie à l’ancien président de l’Union des Journalistes Sportifs Africains, qui est le président d’honneur de l’AIPS/Afrique. Il s’agit de Cheikh Fantamady Condé, actuel secrétaire général de la Cour Constitutionnelle. Je profite également de votre micro pour dire un grand merci à nos aînés Fodé Bouya Fofana, Oumar Dieng et Lanfia Touré, qui m’ont donné de la place pour que je puisse m’affirmer. Je rends hommage aussi à ceux qui ne sont plus de ce monde, comme mon maître, le doyen Pathé Diallo, Boubacar Kanté, le doyen Abdoulaye Sylla, mon petit frère Gassimou Sylla.

Propos recueillis par Alpha Mamadou Diallo pour Guineematin.com

Tel 628 17 99 17

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