Fête du 1er mai à Boké : un syndicaliste empêché de parler, les travailleurs en colère

La célébration de la fête internationale du travail ce mardi, 1er mai 2018, a été marquée par un événement qui témoigne suffisamment de la division qui règne au sein du mouvement syndical guinéen. La cérémonie a tourné autour d’une personne, le secrétaire général adjoint de l’UGTG en séjour dans la région, et qui a failli gâcher la fête. Le leader syndical, très apprécié par les travailleurs locaux, a été sevré de parole. Ce qui choqué les travailleurs qui ont voulu bouder l’événement, a constaté un correspondant de Guineematin.com dans la région.

La commémoration du 132ème anniversaire de la fête internationale à Boké, coïncide avec une tournée que le secrétaire général adjoint de l’union générale des travailleurs de Guinée (UGTG), Aboubacar Sidiki Mara, effectue dans la région minière. Une occasion pour lui de discuter avec les travailleurs des différentes sociétés minières qui évoluent dans la région autour de leur situation. Une démarche désavouée par les syndicalistes locaux ainsi que les autorités de la région administrative.

Et le secrétaire général de l’union locale des travailleurs (ULT), Elhadj Dembo Dramé, n’a pas manqué d’exprimer ce désaveu dans son discours d’ouverture de la fête internationale du travail. « Il est bon de défendre les travailleurs, c’est un droit reconnu par notre constitution. Mais comment est-ce qu’un syndicaliste peut venir directement prendre contact avec des travailleurs des entreprises minières sans passer par l’union locale ? », s’est interrogé monsieur Dramé, qui fait allusion à son homologue de l’UGTG même s’il ne l’a pas nommé.

Le gouverneur de Boké est venu ensuite enfoncer le clou en ces termes : « La liberté syndicale est consacrée dans notre constitution, mais pour la défendre il y a des règles à respecter. Si ces règles sont violées, nous allons nous en prendre à ceux qui les violent. Moi je ne veux pas le désordre ; c’est seulement dans l’ordre que nous pouvons faire respecter les droits des travailleurs », a indiqué le gouverneur de la région administrative de Boké, le général de brigade Siba Séverin Lohalamou.

Mais les travailleurs eux, la majorité en tout cas, ne sont pas d’accord avec cette position. Eux, sont plutôt favorables au combat d’Aboubacar Sidiki Mara. Et ils ont tenu aussi à l’exprimer haut et fort à travers des pancartes sur lesquelles on pouvait lire « à bas la sous-traitance SMB, UMS, WAP,… », mais aussi à travers des acclamations à l’endroit du secrétaire général adjoint de l’UGTG. Ces travailleurs, massivement mobilisés, voulaient entendre le leader syndical à l’occasion de cette cérémonie. Mais, les autorités n’ont pas accepté de donner la parole à Aboubacar Sidiki Mara, adulé par les uns et pestiféré par les autres.

Furieux, les travailleurs ont voulu bouder la salle pour protester contre le refus de donner la parole au syndicaliste. Mais ce dernier les a appelés au calme et à la retenue. Aux yeux de certains, les autorités qui ont ignoré le leader syndical ont plutôt fait sa promotion auprès des travailleurs. Car, dès la fin de la cérémonie, les employés des sociétés minières se sont alignés derrière le syndicaliste Aboubacar Sidiki Mara.

Pris comme un héros, Sidiki Mara a finalement prononcé son discours dans une cour privée située dans le quartier Goreye. « Nous venons d’assister à l’enterrement de la démocratie dans notre pays. Vous avez suivi monsieur le gouverneur tout de suite qui, lui-même reconnaît que la liberté syndicale est consacrée dans notre constitution, mais à Boké, c’est cette liberté qu’on veut violer. Il est clairement dit dans le code du travail que le travailleur, sans autorisation préalable, peut s’affilier à une organisation syndicale de son choix, et l’article 20 de la constitution donne la liberté d’association à tous les guinéens. Donc ce n’est pas par cette méthode d’intimidation qu’on peut faire adhérer un travailleur à un syndicat auquel il ne porte pas confiance. Celui qui me dit qu’il fallait passer par lui pour prendre contact avec des travailleurs, il va montrer le texte de loi qui dit cela », a déclaré le secrétaire général adjoint de l’UGTG.

« Pour déstabiliser quelqu’un il faut s’attaquer à ses idées et les tuer. Sinon, ils peuvent me tuer moi Mara aujourd’hui, mais si mes idées ne sont pas tuées, ils trouveront mille Mara après moi >>, a-t-il ajouté. S’inspirant de la grève récente des enseignants, Aboubacar Sidiki Mara a invité tous les travailleurs des sociétés minières de Boké à se donner les mains et resserrer les rangs derrière son organisation pour retrouver leur vie normale.

Pour rappel, ce même syndicaliste Aboubacar Sidiki Mara a échappé de justesse à une tentative d’assassinat dans la nuit du samedi au dimanche dernier dans un hôtel de la commune urbaine de Boké. Les individus qui ont attenté à sa vie ont été arrêtés et mis à la disposition des forces de sécurité.

De Boké, Mamadou Diouldé Diallo pour Guineematin.com

Tel : 622 671 242

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