De la crise sanitaire à la crise touristique et économique : le secteur touristique principale victime de « EBOLA »

Hôtel Mariador RésidenceLa fièvre hémorragique à virus Ebola sévit dans notre pays depuis le début de cette année. N’ayant pas été canalisée dans sa région d’apparition, avec les flux migratoires, la fièvre s’est propagée un peu partout en Guinée a atteint certains pays de la sous région comme le Libéria, la Sierra Leone et le Nigeria…

Quel est son impact dans le secteur du tourisme ? Guineematin.com vous propose une esquisse de réponse d’un spécialiste,  Thierno Aliou Barry est chercheur en Tourisme à l’Université Libre de Bruxelles, ULB

Le tourisme est un secteur économique très inégalement réparti sur la sphère mondiale et très sensible aux risques politique et sanitaire. Malgré son inégale répartition, Il est actuellement un des seuls secteurs économique en nette progression malgré la crise financière mondiale et les différends géopolitiques mondiaux. De par sa transversalité, le secteur a en fait profité de la croissance des flux touristiques intra-régionaux dans les pays en développement et de l’attrait du voyage exotique pour les classes les plus aisées des pays développés principaux émetteurs du tourisme.

Selon la Banque Mondiale, les pays africains majoritairement sous-développés devraient dorénavant compter sur ce secteur pour rattraper leur retard économique en diversifiant leurs économies et combattre ainsi la pauvreté. La forte rotation aérienne sur le continent africain et l’augmentation des flux touristiques internationaux ces dernières années avaient amené les institutions financières internationales à placer le secteur touristique au cœur de ses stratégies de lutte contre la pauvreté.

Cependant, les ravages du virus Ebola en Afrique de l’Ouest présentent des vives inquiétudes pour les gouvernements et les partenaires au développement car au-delà des conséquences sanitaires c’est toutes les structures économiques des pays qui sont touchés et très particulièrement le très sensible secteur touristique. C’est d’autant plus inquiétant que dans les principaux pays touchés par le virus, le secteur touristique figure en bonne place dans leurs programmes d’investissement économique et de lutte contre la pauvreté après que tous ces pays aient traversé des années de tumultes politique et économique.

Selon l’institution onusienne spécialisée en tourisme (l’Organisation Mondiale du Tourisme) le secteur touristique représenterait actuellement en Guinée 4% de son PIB et a enregistré plusieurs centaines de millions de dollars d’investissements depuis 2010. Alors qu’en Sierra Leone, le secteur est l’une des quatre priorités du programme de développement économique entamé depuis 2010 et il emploie déjà plus de 5000 personnes directement et faisant vivre indirectement 35000 autres. Le Libéria enfin n’a pas encore développé son secteur touristique. Toutefois, ce pays connaissait ces dernières années l’afflux des investisseurs étrangers dans les secteurs prioritaires du gouvernement : les mines et l’agriculture ce qui a nécessité la mise en place des infrastructures d’accueil favorables au développement touristique. La Banque mondiale estime à cet effet que le Libéria doit régler la déficience de son marché touristique intérieur pour espérer ainsi dynamiser son secteur touristique afin de diversifier son économie car à moyen terme la gouvernance du secteur et ses perspectives de croissance sont médiocres.
Les conséquences économiques de l’épidémie sont donc énormes pour les 3 pays, les professionnels et les simples citoyens de ces pays qui vivaient et travaillaient dans ce secteur.

Les professionnels du tourisme guinéen ont déjà exprimé leurs inquiétudes au gouvernement face à la diminution de leur clientèle. Sans reprise des arrivées touristiques et un accompagnement de l’Etat Ils envisagent dans les prochains jours de recourir à des réformes structurelles de leurs entreprises dont les conséquences sociales seront la mise en congé temporaire et le licenciement tout simplement.
Les touristes majoritairement occidentaux quant à eux ont simplement déserté les sites et clubs hôtels, les recettes ayant disparues, les gouvernements ou les professionnels doivent trouver d’autres sources de financement afin de couvrir les frais de gestion des établissements hôteliers.

Un autre risque pour les pays est que la mise en place des plans sanitaires drastiques et des réactions à l’échelle internationale s’accompagnent actuellement à un risque de dégradation à long terme de l’image touristique des pays touchés et engendre un effet de généralisation dans les pays frontaliers.
BARRY THIERNO ALIOU,
Spécialiste & chercheur en Tourisme
Université Libre de Bruxelles, ULB
Email : [email protected]

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