Administration de la justice en Guinée en 2020 : « la gouvernance n’a pas été en faveur des huissiers », dixit Me Sory Daouda Camara

Me Sory Daouda Camara, président de la chambre nationale des huissiers de justice de Guinée
Me Sory Daouda Camara, président de la chambre nationale des huissiers de justice de Guinée

Chargés d’exécuter les décisions de justice rendues par les cours et tribunaux en Guinée, les huissiers de justice du pays ont passé une année 2020 très pénible. En plus de la pandémie de COVID-19 qui impacté toute la chaine judiciaire du pays, les huissiers de justice ont eu de la peine à faire leur travail. Et, C’est le pouvoir exécutif qui aurait mis dans les roues de ces auxiliaires de justice qui contribuent à l’administration d’une bonne et saine justice.

Dans un entretien accordé à Guineematin.com lundi dernier, 04 janvier 2021, le président de la chambre nationale des huissiers de justice de Guinée, Me Sory Daouda Camara, a laissé entendre que les huissiers ne sont pas retrouvés dans la gouvernance au cours de l’année 2020. Car, ils ont été empêchés de faire convenablement leur travail.

« A l’instar de tous les autres secteurs, la profession d’huissier de justice a connu d’énormes difficultés durant l’année écoulée. C’est vrai que la Covid-19 a impacté la quasi-totalité des secteurs ; mais, concernant la profession d’huissier de justice, nous avons enregistré et nous continuons d’enregistrer des difficultés. La gouvernance n’a pas été en faveur de notre profession. Vous savez, la justice c’est une chaîne. Il y a les magistrats qui rendent les décisions de justice, des avocats qui plaident, il y a les notaires, il y a des greffiers. Mais, au-delà de tout cela, qu’est-ce qui fait la justice ? C’est l’application des décisions rendues. Il n’y a pas en matière de textes, je peux lancer le défi, je ne vois pas ce pays qui est mieux meublé que la Guinée, en tout cas dans notre sous-région, en matière de législation. Nous avons les plus beaux textes. Ce n’est pas tout, on est allé au-delà, des réformes ont été apportées au sein du système de la Justice. Mais, tout cela concours à quoi lorsque les décisions rendues au nom du peuple de Guinée ne sont pas appliquées ? Et finalement, on s’interroge pourquoi un département de la justice ? Pourquoi un ministre de la Justice garde des sceaux ? Pourquoi les magistrats ? Pourquoi nos tribunaux si au finish les décisions rendues sont simplement classées dans les tiroirs. Ce qui me pousse à dire que nous, nous ne nous sommes pas retrouvés dans la gouvernance courant l’année écoulée, si la gouvernance a existé. Nous savons qu’elle a bien existé ; mais, elle n’a pas été en faveur des huissiers de justice », a indiqué Me Sory Daouda Camara.

Cependant, pour le président de la chambre nationale des huissiers de justice de Guinée, c’est le président de la république, Alpha Condé, qui aurait empêché les huissiers de faire le travail pour lequel ils ont prêté serment. Le chef de l’Etat aurait interdit au procureur de la Cour d’Appel de délivrer des réquisitions à ces auxiliaires de justice pour une exécution des décisions rendues par les Cours et tribunaux.

« La justice a fonctionné dans son ensemble ; mais, le pouvoir ne nous a pas permis d’exécuter les décisions de justice. C’est le pouvoir qui nous a empêchés et qui continue de nous empêcher de travailler. Les propos du procureur près la Cour d’Appel de Conakry en font foi. C’est lui qui a l’obligation d’accompagner les huissiers dans le cadre de l’exécution des décisions de justice. Mais, le procureur a fait savoir qu’il lui a été formellement interdit de prêter son concours. Parce que prêter son concours consiste à nous délivrer un document qu’on appelle réquisition. C’est cette réquisition qui met la force publique en mouvement. Et si jusqu’à date il continue à nous dire : je ne peux pas parce que le président de la République m’en interdit, est-ce que nous pouvons affirmer que l’année 2020 a été une année dont les huissiers se sont retrouvés dans la gouvernance ? Non. Et, jusqu’ici, les mêmes difficultés persistent. Nous sommes en contact avec le garde des sceaux qui est un brillant avocat, qui connaît nos problèmes. Il a recensé nos maux. Nous attendions l’installation de monsieur le président de la République, chose qui est déjà faite, pour que nous soyons reçus par le président de la République. Nous comptons mettre cette rencontre avec le président à profit pour exposer de façon claire nos problèmes afin qu’il puisse les résoudre conformément à la loi, conformément à son serment », a dit Me Sory Daouda Camara.

Ibrahima Sory Diallo pour Guineematin.com

Tél. : (00224) 621 09 08 18

Facebook Comments Box