Alpha Kabinet Doumbouya sur la liberté de la presse : « je m’interroge encore… »

Alpha Kabinet Doumbouya, journaliste et ancien Directeur Général de la RTG
Alpha Kabinet Doumbouya, journaliste

Célébrée en Guinée (tout comme dans le reste du monde) le 03 mai de chaque année, la journée internationale sur la liberté de la presse est souvent mise à profit pour faire un diagnostic sur la situation des journalistes et le fonctionnement des médias dans notre pays. Cette journée est aussi une opportunité pour les professionnels des médias de se remettre en cause et de se pencher une fois de plus sur leur rôle dans cette société à la démocratie naissante et très fragile. Seulement, cette année, cette journée arrive à un moment de dures épreuves pour les journalistes. Car, certains d’entre eux (Amadou Diouldé Diallo et Ibrahima Sadio Bah) croupissent en prison. Egalement, beaucoup de journalistes tirent le diable par la queue avec des salaires misérables et une volonté à toute épreuve des autorités à savonner tous ceux qui osent avoir une pensée contraire à la leur.

Dans entretien accordé à Guineematin.com, à l’occasion de la célébration de cette journée, le doyen Alpha Kabinet Doumbouya, journaliste à la RTG, s’est interrogé sur la santé de la presse guinéenne et son avenir dans un monde très concurrentiel. Egalement, ce professionnel de média a exhorté les journalistes à ne pas baisser les bras face aux défis et aux obstacles du monde. « On ne doit pas se taire », martèle le doyen Alpha Kabinet Doumbouya.

Décryptage !

« Le constat est globale. Je dirais que la journée consacrée à la presse nous donne deux options. Il s’agit de réfléchir, de penser à nous-mêmes et de nous pencher sur notre situation. Je m’interroge encore si la presse se porte bien. Quelle est l’avenir de la presse dans un monde concurrentiel entre médias et la presse face aux décideurs politiques et économiques ? A notre départ on nous a dit que c’est un métier (le journalisme) qui ne nourrit pas son homme, mais on se rend compte avec l’âge que les choses se compliquent davantage. Ce qui était indexé par nos ainés semble minime par rapport à ce que nous voyons aujourd’hui. On nous interpelle souvent de donner des conseilles à la jeune génération. Je dis que c’est un combat, tout se résume par la responsabilité et le professionnalisme du journaliste. Le journalisme est un métier de privilège et on n’a pas à emprunter mille chemins. On a que six questions : qui a fait quoi ? Où ? Quand ? Comment ? Pourquoi ? Si vous êtes dans ce couloir, c’est balisé et on peut être professionnel. Mais, il arrive qu’on soit menacé par les décideurs politiques, les gouvernants. Souvent, les autres pouvoirs essaient de nous écraser par l’influence de nos rédactions, par la corruption, par la manipulation. Je crois que c’est ce que nous devons refuser. Sinon, la presse est généralement menacée et dangereusement menacée à l’interne comme à l’externe. A l’interne, les nouveaux médias menacent les médias classiques. Quand vous prenez aujourd’hui la place d’une agence de presse, ça ne représente rien aux yeux du décideur qui veut se voir à la télévision le soir, qui veut entendre sa voix à la radio. Nous parlons souvent d’instantanéité. Et, si vous prenez la radio, vous verrez qu’elle est en retard par rapport à d’autres canaux de communication comme les sites qui, à la minute, diffuse l’information.

Avec l’apparition du numérique, chacun est capable de donner l’information qu’il veut ; et, c’est à la portée de tout le monde. Mais, ce sont les journalistes seulement qui ont la technique de la collecte, du traitement et de la diffusion de l’information. Donc, on (les journalistes) ne doit pas baisser les bras, on ne doit pas se taire. Nous ne parlons pas dans le vide, nous parlons aux autres pour un changement de comportement. Il y aura toujours de résilience, le monde est fait de contradictions. Certains ne vont jamais accepter facilement, mais l’idéale c’est d’avoir la victoire finale », a-t-il indiqué.

Mamadou Baïlo Keïta pour Guineematin.com

Facebook Comments Box